Archive for Mai, 2025

CACHEZ CES ALERTES RÉPÉTÉES QUE JE NE SAURAIS VOIR…

En l’espace de quelques jours, dans des pays connaissant des situations politiques apparemment  aussi différentes que l’Allemagne du très réactionnaire Chancelier Merz, la Grande-Bretagne du travailliste Starmer et la Roumanie du conservateur Iohannis (à la présidence) et du social-démocrate Ciolacu (au gouvernement), se sont successivement produits des chocs politiques inédits, sur lesquels il est opportun de revenir. 

5 mai, coup de théâtre au Parlement d’Allemagne : pour la première fois depuis la fondation de la République fédérale d’Allemagne, un Chancelier désigné, bénéficiant officiellement d’une majorité de députés, ne réussit pas à se faire élire au 1er tour. 18 membres issus de sa coalition ont décidé de transformer une pure formalité en camouflet politique retentissant. Pourquoi ?Rappelons que le contrat de législature conclu entre la CDU (droite) et le SPD (sociaux-démocrates) avait suscité un profond malaise chez une partie de ces derniers -notamment les jeunes- en raison de son orientation profondément inégalitaire, de sa fuite en avant militariste et de ses clins d’œil à l’extrême-droite en matière d’immigration. Certains de leurs représentants ont voulu agir en lanceurs d’alerte : réveillez-vous ! Il ne suffit pas de classer l’AfD « groupe extrémiste de droite avéré » pour enrayer la peste brune !

2 mai, séisme politique en Grande-Bretagne : les premières élections (partielles) depuis le retour au pouvoir des travaillistes, en juillet dernier, se sont soldées par un raz-de-marée d’extrême-droite, le parti « Reform UK » de Farage raflant la majorité des postes de conseillers locaux en jeu, s’emparant d’une agglomération de plus d’un million d’habitants et arrachant au Labour un poste de député  malgré un mode de scrutin très favorable aux grands partis. Les raisons de cette désillusion manifeste de l’électorat populaire vis-à-vis du pouvoir ne sont que trop évidentes. Après 14 ans de politique conservatrice impitoyable, il attendait autre chose des travaillistes que des coupes budgétaires massives dans les aides aux plus vulnérables, compensées par « la plus forte augmentation du budget militaire depuis le fin de la guerre froide » (Starmer) ! Au feu ! 

4 mai, panique en Roumanie : cinq mois après l’annulation du premier tour de l’élection présidentielle et de l’interdiction faite au candidat, d’extrême-droite, arrivé en tête, de se présenter à nouveau, un autre candidat d’extrême-droite triomphe à sa place. Pourtant, sur les points mis en avant par la plupart des responsables politiques roumains et européens pour expliquer ce vote, les deux nationalistes ne tiennent pas le même discours : le premier admirait Poutine, le second l’a qualifié de « criminel de guerre »; l’un combattait l’OTAN et l’UE, l’autre dit « ne pas voir l’avenir de (son) pays en dehors de cette alliance militaire » et ses élus européens siègent aux côtés de la « pro-européenne » Meloni…C’est qu’en fait, c’est avant tout la politique subie par la population roumaine qui fournit aux démagogues leurs arguments les plus convaincants. Avec un salaire moyen de 500 euros et des services publics plus que défaillants, « le risque de pauvreté et d’exclusion (est, en Roumanie) le plus important d’Europe » (Eurostat), tandis que l’ultra-militarisation du pays ( un bataillon multinational sous commandement français y est déployé  ) lasse les habitants qui aspirent à vivre en paix. L’absence d’un vrai débat politique fait le reste. Gare au second tour, le 18 mai ! 

Puissent les forces de gauche permettre à notre propre pays d’échapper à ce funeste destin, en faisant enfin la démonstration qu’elles ont pris la mesure de l’enjeu. 

19 Mai 2025 at 10:55 Laisser un commentaire

LES GAGNANTS ET LES PERDANTS DU « RÉARMEMENT » DE L’EUROPE

2370 milliards d’euros, soit plus de 7 fois le budget 2024 de la France, ou bien 11 fois le montant de l’aide publique mondiale au développement, ou encore…36 fois le budget de tout le système des Nations Unies et de ses 43 entités (OMS, FAO, UNESCO, UNICEF, OIT…) : tel est le montant délirant des dépenses militaires mondiales durant l’année écoulée(1). En augmentation constante depuis 10 ans, elles viennent d’enregistrer la plus forte progression depuis la fin de la guerre froide. 

Le cas de l’Union européenne mérite une attention particulière, le plan de « réarmement » de 800 milliards d’euros (d’ici 2030), adopté le 6 mars dernier par les Chefs d’Etat ou de gouvernement, devant se traduire par une nouvelle explosion, encore plus insensée, des dépenses militaires au fil des cinq prochaines années. À cet égard, plusieurs projets en cours doivent nous alerter. Concernant la France, tout d’abord: Emmanuel Macron a annoncé son intention de s’inscrire dans cette fuite en avant, en évoquant une augmentation progressive de…50% de la part des richesses produites consacrée à cette gabegie ! (2) L’Allemagne ensuite : le nouveau Chancelier, Friedrich Merz, entend affirmer le leadership européen de son pays en ambitionnant de porter ses dépenses militaires de quelque 80 milliards d’euros en 2025 (déjà en augmentation de 28% en un an !) à un niveau-record se situant entre…200 et 400 milliards d’euros d’ici 2035 ! (3). La Grande-Bretagne, enfin : un « Sommet UE-Royaume uni » doit se tenir le 19 mai prochain, à Londres, censé aboutir à un « partenariat stratégique », officiellement fondé sur « la prospérité de tous les citoyens du Royaume uni et de l’UE » ! Sauf qu’au cœur de ce « New Deal » post-Brexit figure un projet de « Pacte de défense et de sécurité » qui permettrait aux entreprises britanniques de défense d’accéder au pactole de 150 milliards d’euros que l’Union européenne a décidé de consacrer au financement des investissements de défense…

Si les marchands d’armes sont, sans surprise, les grands gagnants de cette folle course aux engins de mort, qu’en est-il des perdants ? Il y a, naturellement, en tout premier lieu, les travailleurs, qui ont tout à craindre de « l’économie de guerre » dont rêvent d’irresponsables politiciens et dont se gargarisent des commentateurs à l’abri du besoin. Comme le souligne sans gêne le Secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte, il faudra bien utiliser « une petite fraction » des dépenses sociales pour augmenter les dépenses de défense…Mais ce n’est pas tout. D’autres priorités vont pâtir de cette militarisation à outrance. Ainsi des objectifs du « Pacte vert » européen en matière de lutte contre le dérèglement climatique, appelés à être en partie sacrifiés : « Nous serons plus flexibles et pragmatiques pour les atteindre » vient d’annoncer la Présidente de la Commission, Von der Leyen, provoquant une vive réaction d’Ana Toni, directrice générale de la prochaine Conférence sur le climat de l’ONU, qui a qualifié ce recul européen d’ « extrêmement décevant ». Autre abandon inacceptable : on évoque une baisse à venir de…35% de l’aide européenne au développement dans le cadre du budget pluriannuel 2028-2034, en cours de discussion ! La démocratie elle-même, subit des attaques significatives dans ce contexte : le matraquage évince le débat et la dramatisation étouffe l’analyse responsable. Le social, l’humanisme, l’esprit de responsabilité : tout nous commande de refuser cette dérive toxique ! 

——–

(1) Rapport de l’Institut international de recherche sur la paix (SIPRI)

(2) Figaro, 2/3/2025

(3) Site « Toute l’Europe » (28/4/2025)

6 Mai 2025 at 5:23 Laisser un commentaire

POUR LE CONGO AUSSI : AGIR POUR LA PAIX !

« Quelque 11 000 spectateurs sur les gradins et dans la fosse de l’Accor Arena et une trentaine d’artistes sur scène pour lever des fonds pour les enfants de l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) » relatait RFI le 23 avril dernier ! Par-delà son objectif direct, cette belle initiative de solidarité a eu le mérite d’attirer l’attention sur l’incommensurable tragédie dans laquelle est plongée la population de la région congolaise du Kivu depuis plusieurs décennies, et ce, jusqu’il y a peu, dans l’indifférence quasi-générale.  

A la base, il y a le terrifiant génocide des populations tutsies au Rwanda voisin en 1994 et la fuite massive vers le Zaïre (future RDC) aussi bien de Tutsis voulant échapper aux massacres que de Hutus par peur des représailles. C’est dans ce contexte incandescent, auquel s’ajoutent l’héritage colonial et l’extrême faiblesse de l’Etat de la RDC, que la région du Kivu -par ailleurs riche de ressources minières très convoitées- est devenue, depuis plusieurs décennies, le théâtre de conflits  effroyables impliquant des groupes armés, avec le soutien actif du Rwanda de Paul Kagamé. Le bilan humain de ces guerres sans fin est insoutenable : des millions (!) de morts et des millions de personnes déplacées. 

La dernière phase de ce drame a commencé il y a plus de trois ans quand le groupe armé M23 , qui avait déjà sévi en 2012-2013 avant d’être défait par l’armée congolaise et la force de maintien de la paix des Nations unies (MONUSCO), a recommencé à semer la terreur et le chaos dans cette région. En janvier dernier, la grande ville de Goma, au Nord du lac Kivu, puis, en février, celle de Bukavu, au Sud -deux villes stratégiques- sont tombées aux mains du groupe rebelle M23, puissamment appuyé par l’armée rwandaise : ce désastre a fait franchir au conflit congolais un nouveau et dangereux palier. 

« Derrière ces conflits complexes où s’entremêlent de nombreux acteurs et intérêts, une victime reste constante : la population congolaise », notent très justement deux chercheurs belges présents sur le terrain (1). Ils décrivent un « quotidien pavé d’humiliations  constantes et d’un traitement dégradant » et rappellent : « Après l’entrée des rebelles, la ville de Goma était jonchée de cadavres. Peur et souffrance se mêlaient au chaos ambiant et à une dégradation économique fulgurante (…) La population, déjà fragilisée, a sombré dans une panique totale ».

Il aura fallu ce nouveau drame, qui risque de conduire à un nouvel embrasement régional, pour que réagissent -mollement- les fervents alliés du régime rwandais. Cela vaut notamment pour l’Europe. Le 19 février 2024, avait même été signé un protocole d’accord entre l’Union européenne et le Rwanda visant à « favoriser le développement de chaînes de valeur durables et résilientes pour les matières premières critiques »…des territoires congolais occupés ! Dans un communiqué publié le même jour, il était clairement mentionné que l’objectif de cet accord était « de renforcer le rôle du Rwanda dans la promotion du développement durable et des chaînes de valeur résilientes en Afrique »! 

Habituellement prompte à décider des sanctions contre des pays violant le droit international, l’UE a attendu…le mois dernier pour prendre les premières mesures concernant le Rwanda. Faut-il le rappeler : Agir pour la paix, cela vaut aussi pour le Congo !

————-

(1) Héritier Mesa (Université libre de Bruxelles) et Ramazani K. Lucien (Université catholique de Louvain). 

2 Mai 2025 at 10:15 Laisser un commentaire

Newer Posts


Entrer votre adresse e-mail pour vous inscrire à ce blog et recevoir les notifications des nouveaux articles par courriel.

Rejoignez les 5 297 autres abonnés

Chronique européenne dans l’Humanité Dimanche

Intervention au Parlement européen (vidéo)

GUE/NGL : vidéo

Mai 2025
L M M J V S D
 1234
567891011
12131415161718
19202122232425
262728293031  

Archives

Catégories

Pages

Pages