Archive for février, 2013

MONTI : DE « SUPER MARIO » AU SUPER FIASCO

wurtz-l-humanite-dimanche      La contre-performance électorale du Chef du gouvernement italien sortant est tout sauf anecdotique. Elle offre de multiples sujets de méditation à tous les dirigeants européens qui avaient vu en Mario Monti  le « sauveur » de l’Italie et dans sa trajectoire politique atypique un modèle pour l’Europe « postdémocratique ». Ils ne peuvent que constater aujourd’hui que, dans leur laboratoire politique italien,  l’opération   « Super Mario » vient de déboucher sur un super fiasco.FW

Pourtant, jusqu’à une période récente, il n’y avait chez eux aucune place aux doutes. Le Président du Conseil européen, M. Van Rompuy, assurait il y a peu qu’ « il n’y a pas d’alternative à M. Monti pour l’Italie ». Pour le grand argentier allemand, Wolgang Schäuble, Mario Monti était « le bon dirigeant, au bon endroit,au bon moment ». Quant à François Hollande, il lui paraissait incontestable qu’il avait « permis à l’Italie de se redresser ». Vraiment?

Le chômage y a bondi au-delà de 11% sans compter un sous-emploi colossal.114 000 entreprises y ont fermé pour la seule année 2012. Des milliers de jeunes diplômés s’exilent . Tout le pays s’est appauvri et le Sud du pays s’enfonce dans la misère. Aux 200 milliards d’euros d’ « économies » déjà décidées sous Berlusconi, le sauveur Monti a rajouté une purge de 100 milliards au prix de nouvelles réductions drastiques de dépenses publiques et d’une lourde taxe sur le logement. L’âge de la retraite a été repoussé à 66 ans et l’indexation des pensions sur l’inflation supprimée. Le marché du travail a été fortement « flexibilisé » et les licenciements facilités. « Ce qu’il a fait -souligne le directeur-adjoint de campagne de M. Monti…pour louer son courage- c’est Thatcher multiplié par mille »! Et pourquoi tous ses sacrifices? A la place de la croissance annoncée, l’économie plonge dans la récession. Quant à l’écrasante dette publique, loin d’amorcer sa décrue, elle a…augmenté de quelque 120 milliards d’euros! On marche sur la tête. Des révisions déchirantes s’imposent aux croisés de l’austérité. Telle est la première exigence qui émerge du bilan des quinze mois de régime expérimental Monti.

Mais il faut aller plus loin, en éclairant la nature de la mission confiée par les principaux dirigeants européens à leur ancien Commissaire: rassurer à n’importe quel prix les marchés financiers vis-à-vis de la troisième économie de la zone euro. Une responsable de l’Union bancaire privée , à Genève, Mme Christel Rendu de Lint (citée par l’Expansion), résume bien l’enjeu de l’opération Monti: « Ce que veulent les marchés, c’est un gouvernement stable qui applique à la lettre les exigences de l’Union européenne, et au final de l’Allemagne. C’est ce que M.Monti a fait à la lettre. « Ce qui l’a fait trébucher. De là, une deuxième leçon d’envergure pour qui veut regarder en face l’avenir de l’UE: même avec un « homme providentiel » et le soutien résolu de Bruxelles, la loi des marchés, ça ne passe pas. Donc, pas d’échappatoire à une profonde réforme de la Banque centrale européenne, propre à donner aux Etats de la zone euro les moyens de se libérer de la dictature des marchés financiers.

Enfin,l’avenir de la démocratie en Europe est le troisième enjeu mis au jour par l’expérience Monti. Au plus haut niveau de l’UE, on a cru que le fait de propulser l’un des leurs -qui plus est un ancien de Goldman Sachs- sans élection à la tête d’un gouvenement « technique » grâce aux pressions des « investisseurs » sur les taux d’intérêts, était la solution idéale pour se libérer des contraintes de la démocratie élective. Une sorte de tutelle, en somme. Eh bien, c’est  raté!

28 février 2013 at 8:37 Laisser un commentaire

« GRAND MARCHE TRANSATLANTIQUE »: ATTENTION DANGER !

wurtz-l-humanite-dimanche                 Le Conseil européen et le Président Obama l’ont tous deux annoncé, à quelques jours d’intervalle : d’ici l’été prochain, des négociations doivent s’ouvrir entre l’Union européenne et les Etats-Unis en vue d’aboutir en 2015 à la création de la plus vaste zone de libre-échange jamais réalisée: le « Grand marché transatlantique ». Un projet vieux de 20 ans refait ainsi surface. Quels en sont les enjeux? Les jeux sont-ils faits? Comment agir?

Les enjeux? A en croire l’ineffable Président de la Commission européenne, M. Barroso, c’est bien sûr « le moyen de promouvoir la croissance et l’emploi ». Ben voyons! Son commissaire au commerce, chargé du dossier,Karel De Gucht, est plus explicite: les négociations visent notamment « la suppression de tous les droits de douane (entre l’UE et les USA), la libéralisation des services et l’accès aux marchés publics. « Angela Merkel, partisane de longue date de l’idée d’un tel « grand marché » qu’elle juge « fascinante », précisait dès 2007 qu’il fallait ainsi « parvenir à une plus grande harmonisation des normes règlementaires entre l’UE et les Etats-Unis. « Un accord-cadre conclu entre les deux grands blocs la même année soulignait la nécessité de « réduire les obstacles bureaucratiques « aux échanges. Etc…Or,il faut savoir que ce que les fanatiques du libéralisme désignent ainsi comme des « barrières protectionnistes qui entravent les échanges », c’est, pour l’essentiel, un ensemble de normes sociales, sanitaires et environnementales; des aides à des secteurs à protéger contre la concurrence sauvage (comme l’agriculture ou la culture); ou encore des limites fixées aux « investisseurs » étrangers dans l’accès à certains marchés publics. Ces mesures spécifiques correspondent souvent à des choix de société qui , ensemble, dessinent les contours d’un « modèle européen » en comparaison d’autres modèles de société en vigueur dans le monde.
On sait combien ce « modèle européen » est aujourd’hui laminé de toutes parts par la financiarisation et la marchandisation de l’Union européenne! Les scandales sanitaires à répétition, le poids grandissant de l’agro-business à l’encontre de l’agriculture paysanne, les assauts permanents contre « l’exception culturelle » et notamment les aides au cinéma, ou bien l’annonce de… »la mort du modèle social européen » par le Président de la Banque centrale européenne en personne nous rappellent que ce dont les Européens ont un besoin urgent, c’est une offensive de reconquête (et de modernisation par le haut) d’un modèle européen avancé, et non d’une « harmonisation » par le bas de ce qu’il en reste avec les règles et pratiques ultra-libérales en vigueur outre-Atlantique!
Le danger du projet annoncé est d’autant plus sérieux qu’il est de plus en plus justifié par la « nécessité urgente » de constituer un super bloc occidental (plus de 50% du PIB mondial) pour illustrer « notre » suprématie face à la Chine…Est-il besoin de le souligner: il y aurait tout à redouter d’un tel enrôlement des Européens dans une guerre économique sans merci au service des « champions » du capitalisme occidental! (Tel Warren Buffett qui vient d’acquérir Heinz pour la broutille de 21 milliards d’euros?)

Mais les jeux ne sont pas faits. Les contradictions en présence sont énormes. D’autres offensives pour le même projet ont échoué. Celle de 1995 fut enrayée par le véto français sur l’AMI (Accord Multilatéral sur l’Investissement). Celle de 1998 s’enlisa avec la guerre d’Irak en 2003 et le refroidissement des relations avec Washington. Celle de 2007 se fracassa sur la crise financière. Celle d’aujourd’hui doit être contrée par un appel résolu à l’intelligence des citoyens et l’exigence d’un vrai débat démocratique sur l’Europe qu’ils appellent de leur voeux.

21 février 2013 at 7:59 Laisser un commentaire

LES FOSSOYEURS DU PROJET EUROPEEN

wurtz-l-humanite-dimanche     Dira-t-on un jour du 8 février 2013 – où a été conclu le « bon compromis » entre les Chefs d’Etat et de gouvernement sur le budget européen pour la période 2014-2020- qu’il fut un signe annonciateur de l’effondrement du projet européen? A moins d’un véritable sursaut, c’est plausible. Car, loin de tirer du bilan effroyable de la cure d’austérité de ces dernières années (12% de chômeurs dans la zone euro et un quart de la population de l’UE menacé de pauvreté!) la conclusion qu’un changement de cap est vital, les principaux dirigeants européens viennent d’engager leur « Union » dans une descente aux enfers.fw

Tout budget est l’expression de choix politiques. Comment qualifier ceux qui ont abouti à ce fiasco: pour la première fois, le cadre financier pour les sept prochaines années est en recul absolu sur celui des sept années précédentes? (Moins 3% en chiffres nets, moins 10% par rapport aux richesses produites) et ce malgré l’explosion des besoins, les promesses de « croissance » …et l’arrivée, cette année d’un 28 ème pays membre (La Croatie) !

Scandale suprême: les maigres dépenses de solidarité sont les plus cruellement rabotées. L’aide aux plus démunis? Elle chute de 40% tout en concernant huit pays de plus que jusqu’ici ! Le fonds de secours aux victimes de grosses restructurations ? Il est réduit des deux tiers ! Les crédits de solidarité en cas de catastrophe naturelle ?  Moitié  moins ! En revanche, les Etats qui, à l’instar de la Grande- Bretagne (depuis l’ère Thatcher en 1984 !), ont exigé et obtenu un rabais annuel de leur versement au budget européen (De l’ordre de quatre milliards d’euros par an pour la seule Grande-Bretagne !) le conservent: Allemagne, Pays-Bas, Finlande, Suède, Autriche, et désormais aussi Danemark. C’est bien de « dé-construction européenne » qu’il faut parler.

A qui la faute? A l’horrible Camerone, bien sûr, et à son chantage thatchérien destiné à séduire l’électorat le plus conservateur et europhobe d’outre-Manche. Mais tout autant à ceux qui lui ont cédé par complicité (Merkel partage sur le fond sa conception purement libre-échangiste de l’Europe) ou qui ont capitulé par manque de vision sinon de courage politique. Le Président français aurait pu -aurait dû- prendre la tête d’une contre-offensive en en appelant tant au Parlement européen (qui n’aurait pu que le suivre) qu’aux peuples européens eux-mêmes. « Quelle Europe voulons-nous? C’est le moment de choisir et d’agir !  » Cela aurait provoqué une crise? Oui, mais une crise salutaire, à même de mobiliser les Européens pour leurs aspirations communes. Quant au budget, en attendant, c’est l’actuel qui aurait, selon les traités, été prolongé -ce qui aurait été provisoirement acceptable. Trois jours plus tôt, François Hollande se faisait applaudir par les parlementaires de Strasbourg en déclarant: « Où serait la cohérence d’avoir défini au mois de juin un pacte de croissance et de faire ensuite un pacte de déflation à travers le cadre financier européen? « En effet ! Belle occasion perdue de faire suivre des paroles fortes par des actes clairs! Désormais, c’est aux députés européens de prendre leurs responsabilités en refusant d’entériner ce budget de fossoyeurs du projet européen. Ils ont le pouvoir de ré-ouvrir le jeu. Tout doit être fait pour qu’ils résistent aux pressions que certains gouvernements ne manqueront pas d’exercer sur eux pour les faire rentrer dans le rang.

La morale de l’histoire est que, décidément, il est temps que la gauche de transformation s’empare avec détermination du drapeau européen pour lui donner de tout autres couleurs !

14 février 2013 at 8:07 1 commentaire

Articles précédents


Entrer votre adresse e-mail pour vous inscrire à ce blog et recevoir les notifications des nouveaux articles par courriel.

Rejoignez les 5 282 autres abonnés

Chronique européenne dans l’Humanité Dimanche

Intervention au Parlement européen (vidéo)

GUE/NGL : vidéo

février 2013
L M M J V S D
 123
45678910
11121314151617
18192021222324
25262728  

Archives

Catégories

Pages

Pages