LES FOSSOYEURS DU PROJET EUROPEEN
14 février 2013 at 8:07 1 commentaire
Dira-t-on un jour du 8 février 2013 – où a été conclu le « bon compromis » entre les Chefs d’Etat et de gouvernement sur le budget européen pour la période 2014-2020- qu’il fut un signe annonciateur de l’effondrement du projet européen? A moins d’un véritable sursaut, c’est plausible. Car, loin de tirer du bilan effroyable de la cure d’austérité de ces dernières années (12% de chômeurs dans la zone euro et un quart de la population de l’UE menacé de pauvreté!) la conclusion qu’un changement de cap est vital, les principaux dirigeants européens viennent d’engager leur « Union » dans une descente aux enfers.
Tout budget est l’expression de choix politiques. Comment qualifier ceux qui ont abouti à ce fiasco: pour la première fois, le cadre financier pour les sept prochaines années est en recul absolu sur celui des sept années précédentes? (Moins 3% en chiffres nets, moins 10% par rapport aux richesses produites) et ce malgré l’explosion des besoins, les promesses de « croissance » …et l’arrivée, cette année d’un 28 ème pays membre (La Croatie) !
Scandale suprême: les maigres dépenses de solidarité sont les plus cruellement rabotées. L’aide aux plus démunis? Elle chute de 40% tout en concernant huit pays de plus que jusqu’ici ! Le fonds de secours aux victimes de grosses restructurations ? Il est réduit des deux tiers ! Les crédits de solidarité en cas de catastrophe naturelle ? Moitié moins ! En revanche, les Etats qui, à l’instar de la Grande- Bretagne (depuis l’ère Thatcher en 1984 !), ont exigé et obtenu un rabais annuel de leur versement au budget européen (De l’ordre de quatre milliards d’euros par an pour la seule Grande-Bretagne !) le conservent: Allemagne, Pays-Bas, Finlande, Suède, Autriche, et désormais aussi Danemark. C’est bien de « dé-construction européenne » qu’il faut parler.
A qui la faute? A l’horrible Camerone, bien sûr, et à son chantage thatchérien destiné à séduire l’électorat le plus conservateur et europhobe d’outre-Manche. Mais tout autant à ceux qui lui ont cédé par complicité (Merkel partage sur le fond sa conception purement libre-échangiste de l’Europe) ou qui ont capitulé par manque de vision sinon de courage politique. Le Président français aurait pu -aurait dû- prendre la tête d’une contre-offensive en en appelant tant au Parlement européen (qui n’aurait pu que le suivre) qu’aux peuples européens eux-mêmes. « Quelle Europe voulons-nous? C’est le moment de choisir et d’agir ! » Cela aurait provoqué une crise? Oui, mais une crise salutaire, à même de mobiliser les Européens pour leurs aspirations communes. Quant au budget, en attendant, c’est l’actuel qui aurait, selon les traités, été prolongé -ce qui aurait été provisoirement acceptable. Trois jours plus tôt, François Hollande se faisait applaudir par les parlementaires de Strasbourg en déclarant: « Où serait la cohérence d’avoir défini au mois de juin un pacte de croissance et de faire ensuite un pacte de déflation à travers le cadre financier européen? « En effet ! Belle occasion perdue de faire suivre des paroles fortes par des actes clairs! Désormais, c’est aux députés européens de prendre leurs responsabilités en refusant d’entériner ce budget de fossoyeurs du projet européen. Ils ont le pouvoir de ré-ouvrir le jeu. Tout doit être fait pour qu’ils résistent aux pressions que certains gouvernements ne manqueront pas d’exercer sur eux pour les faire rentrer dans le rang.
La morale de l’histoire est que, décidément, il est temps que la gauche de transformation s’empare avec détermination du drapeau européen pour lui donner de tout autres couleurs !
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vbjcdkjsckjsbkd | 17 février 2013 à 4:40
Extrait d’un article de Jacques Sapir :
« On avait de l’eau jusqu’à la ceinture, et le vieux con a dit d’avancer », billet publié sur le carnet Russeurope le 14/02/2013, URL: http://russeurope.hypotheses.org/864
La perte de compétitivité de l’économie française ces dernières années est frappante. On voit d’ailleurs qu’il ne s’agit pas d’une tendance générale. Nous avons connu des périodes de déficit et d’excédent commerciaux par le passé. Mais, depuis la création de l’Euro, le problème s’est visiblement aggravé.
François Hollande et Jean-Marc Ayrault ont donc pris acte de l’inanité de leurs rêveries. Mais cela ne s’étend pas, hélas, à leur politique. Alors même que les fondements de cette dernière ont été massivement invalidés par les faits, que ceci est, désormais, reconnu par tous, on poursuit dans l’erreur. Alors reviennent en mémoire les paroles de la chanson de Graeme Allwright : « On avait de l’eau jusqu’à la ceinture, et le vieux con a dit d’avancer ». Cela finit mal dans la chanson, mais cela finira encore plus mal dans la réalité.
De reniements en reniement, François Hollande aura de plus en plus de mal à démontrer que sa politique se différencie de celle d’un Nicolas Sarkozy. Il perd sa légitimité électorale rapidement. On s’en émeut dans la gauche du PS et au « Front de Gauche ». Les déclarations se multiplient qui appellent à un changement de politique. Tout cela est bel et bon mais ne répond pas aux deux questions suivantes. La première porte sur le projet d’une réelle politique de croissance. Il ne suffit pas dire que l’on veut une politique de croissance, il faut dire comment on peut y parvenir dans le cadre contraignant qui est celui de la France aujourd’hui dans la zone Euro. Alors que le Japon dévalue le Yen massivement, que les États-Unis font une politique de relance appuyée sur une monnaie faible, on voit bien qu’il n’est pas possible d’avancer vers l’objectif de croissance avec un Euro fort et qu’il n’est pas non plus possible de faire bouger l’Allemagne sur ce point. Le problème est donc clair. Soit nous gardons l’Euro, et la politique de Sarkhollande ou de Hollkozy est la seule possible. Soit nous rompons avec l’Euro. Mais se profile alors une seconde question. À quoi servent donc tant les députés dit « de gauche » du PS que ceux du Front de Gauche ? On a vu, la nuit du 13 au 14 février, lors du débat sur la loi bancaire, que le gouvernement, avec la morgue d’une Karine Berger et la suffisance d’un Pierre Moscovici, rejetait toute modification à sa politique. Il en a le pouvoir. Mais les députés de la « gauche » du PS et du Front de Gauche ont aussi celui de provoquer une crise gouvernementale soit en refusant de voter un texte par trop scandaleux soit en déposant, pour les seconds, une motion de censure sur la politique économique du gouvernement. On dira que c’est « faire le jeu de la droite ». Balivernes ! Ce qui fait le jeu de la droite, c’est la désespérance que produit la politique de ce gouvernement.
Il ne reste plus beaucoup de temps devant nous avant que nous soyons confrontés à une catastrophe économique majeure, par perte de compétitivité, et aux conséquences sociales et politiques de cette dite catastrophe. Il est de la responsabilité de chacun d’arrêter ce gouvernement sur la pente funeste sur laquelle il nous entraîne. Il est donc important que chacun prenne ses responsabilités.