Archive for juin, 2021

APRÈS LE SOMMET BIDEN-POUTINE, L’UE S’INTERROGE 

Quelles relations l’UE doit-elle établir avec la Russie ? Cette question stratégique est à nouveau à l’ordre du jour de la réunion des  27 Chefs d’Etat et de gouvernement ce 24 ou 25 juin. On se souvient que, le 5 février dernier, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, s’était rendu à Moscou pour tenter  -contre l’avis des « durs » de l’UE- d’ouvrir la voie à des rapports moins tendus avec le Kremlin. Mais, de façon surprenante (et très contre-productive), le pouvoir russe avait choisi ce moment précis pour renvoyer trois diplomates européens (pour participation à une manifestation pro-Navalny). Ce fut pain bénit pour les gouvernements européens les plus russophobes , qui en profitèrent pour exiger un nouveau durcissement de nos relations. Tel était jusqu’à ces derniers jours le contexte des discussions prévues cette semaine.
Les nostalgiques de la guerre froide dans l’UE se sentaient d’autant plus sûrs d’eux que le nouveau président américain, garant de « l’ordre international libéral », montrait l’exemple en décidant une série de sanctions contre la Russie et en allant jusqu’à insulter son président. Certes, ils s’inquiétaient de la perspective du Sommet Biden-Poutine, qualifié par certains d’ « énorme cadeau » fait au Kremlin. Mais on les avait rassurés : cette rencontre ne pouvait susciter « aucune illusion », les rapports entre leurs deux pays étant « au plus bas ».
Seulement voilà : le Sommet en question ne s’est pas tout à fait déroulé comme les discours agressifs entendus récemment, notamment lors de la réunion de l’OTAN, de la bouche même de Joe Biden, l’avaient laissé supposer.  Naturellement, les différends y ont été abordés franchement, mais sans provoquer de blocage . « Il y a une vraie perspective d’amélioration de la relation avec la Russie » déclara le président américain, ajoutant : « J’ai un bon sentiment après la rencontre (…) Poutine ne veut pas la guerre froide ». Le président russe constata, pour sa part, qu’ « il n’y avait aucune animosité », mais au contraire une « conversation constructive », évoquant même « des germes de confiance ». Les décisions prises par les deux dirigeants , sur les plans tant diplomatique (le retour des ambassadeurs dans les deux capitales) que stratégique (réduction des armements nucléaires, coopération en matière de cybersécurité ) , semblent en témoigner. L’avenir dira s’il s’agit d’un faux-semblant ou d’une amorce de changement . 
Dans l’immédiat, voilà qui ringardise quelque peu ceux qui, en Europe, s’apprêtent à pousser de plus belle  à l’hystérisation des rapports entre les deux grands acteurs du continent ! L’expérience n’a-t-elle pas montré que la politique systématique de tensions et de sanctions ne fait qu’empoisonner le climat international, sans le moindre résultat concret ?
Il est temps pour l’UE de sortir de l’engrenage de la crise ukrainienne et d’entamer avec ce partenaire complexe mais incontournable une relation sans tabou ni condescendance , d’égal à égal, face aux nombreux enjeux qui nous sont communs.

24 juin 2021 at 6:11 Laisser un commentaire

CRISE EN IRLANDE DU NORD, « DERNIER BASTION DE L’EMPIRE »

Mais quel est donc le cas de force majeure qui justifierait que Boris Johnson invoque « l’article 16 » de l’accord Brexit -article qui lui permettrait en cas de « graves difficultés économiques, sociétales ou environnementales », de ne pas appliquer le « Protocole nord-irlandais » ? Rappelons que ce texte -signé par Boris Johnson avec Bruxelles en 2019- impose des contrôles douaniers européens pour les produits, notamment agricoles et alimentaires, circulant entre l’Angleterre et l’Irlande du Nord. Cette mesure est la conséquence logique du Brexit dans une Irlande divisée entre la province du Nord (partie intégrante du « Royaume uni ») et le reste de l’Irlande (membre de l’UE). Sauf à rétablir une frontière dure entre ces deux entités -ce qui annulerait le traité de paix crucial signé il y a 23 ans- , les marchandises britanniques entrant en Irlande du Nord circulent ensuite librement sur toute l’île, donc aussi dans le marché unique européen. D’où la nécessité, depuis le Brexit, d’effectuer les contrôles avant l’entrée des marchandises en Irlande du Nord. 
Problème : ce « Protocole » est un crime de lèse majesté aux yeux des forces les plus rétrogrades du Royaume -les « loyalistes » ou « unionistes » d’Irlande du Nord- …qui soutiennent la majorité conservatrice au pouvoir à Londres. Petit rappel à leur propos. L’Irlande a acquis son indépendance en 1922. Toute l’Irlande ? Non : la majorité protestante de deux comtés du Nord-Est de l’île a exigé son rattachement à la Grande-Bretagne. Elle a obtenu à cette fin, un an avant l’indépendance du pays, la création d’une entité propre : l’Irlande du Nord. Un siècle plus tard, ces nostalgiques de temps révolus célèbrent toujours en grande pompe la victoire du protestant Guillaume d’Orange sur le roi catholique Jacques II, à la bataille de Boyne, en juillet 1690 ! Leurs tristement célèbres marches, sectaires et triomphalistes, destinées à provoquer les républicains, favorables à la réunification de l’île, culminent traditionnellement le 12 juillet, date de la « Victoire » la plus emblématique des « protestants » sur les « catholiques » il y a plus de trois siècles ! On croit rêver .
Le problème est que cette droite dure ne se contente pas de défiler, elle menace aujourd’hui de rallumer la mèche des « Troubles », cette sanglante guerre civile de trente ans entre les deux communautés de la province qui a pris fin en 1998 grâce aux accords dits du « Vendredi saint ». Les émeutes d’avril dernier, annonce-t-elle, pourraient se répéter voire s’amplifier à l’approche du mythique 12 juillet, si les « loyalistes » n’obtiennent pas satisfaction : à savoir la remise en cause du « Protocole » maudit, accusé de faire le jeu des républicains. Ils s’accrochent d’autant plus fiévreusement à la couronne britannique qu’il sentent approcher le début de la fin de cette survivance anachronique de ce que les républicains tiennent non sans raison pour « le dernier bastion de l’Empire » (Pr Considère-Charon). Les sondages n’annoncent-ils pas que le ou la prochain.e  No1 de l’exécutif de la province viendrait des rangs de nos amis du Sinn Fein, en mai 2022 ?! Raison de plus pour ne pas céder à la bataille d’arrière-garde de Boris Johnson.

18 juin 2021 at 5:58 Laisser un commentaire

 « SÉCURITÉ », QUELS MÉFAITS SONT COMMIS EN TON NOM !



Si la sécurité, dans toutes ses dimensions -individuelle, sociale, nationale, internationale, alimentaire, sanitaire, environnementale…- , est un droit à défendre , l’instrumentalisation du sentiment d’insécurité est, quant à elle, un crime à combattre. L’actualité européenne nous confirme l’étendue des méfaits commis au nom de la « sécurité ». 
L’important Sommet de l’OTAN, le 14 juin prochain, à Bruxelles, mérite, à ce égard, toute notre attention. Il y sera question d’une « mise à jour » des principales tâches de sécurité à l’horizon 2030. Joe Biden aura à cœur de rappeler à ses alliés que, lui à la Maison Blanche, l’Organisation militaire occidentale, loin d’être « en état de mort cérébrale », est  appelée à resserrer les rangs et à renforcer ses moyens pour « défendre la démocratie ». Il sera question, dans cet esprit, de verser plus d’argent dans le budget commun, car « Dépenser en commun est un multiplicateur de force », cela « envoie un message très clair à nos propres populations ainsi qu’à tout adversaire potentiel », et puis « c’est une façon d’investir dans le lien entre l’Europe et l’Amérique du Nord » -vient de souligner le Secrétaire général de l’Organisation, Jens Stoltenberg. Ce « budget commun » -qui s’ajouterait aux budgets de défense nationaux-  pourrait servir à financer le stationnement de troupes dans les pays baltes (à la frontière russe), les missions de surveillance aérienne, la modernisation des bases alliées, la défense antimissile, et plus si affinités…
Gageons que, pour justifier ce nouveau « concept stratégique », l’on invoquera les dépenses militaires chinoises et russes, en omettant de préciser qu’elles sont près de quatre fois  (pour la Chine) et  plus de dix fois (pour la Russie) inférieures à celles des seuls Etats-Unis ! Le pire est que cette gabegie obscène s’auto-alimente, chaque « camp » se sentant obligé de « rattraper son retard » sur celui d’en face…au nom de la sécurité.
Qui plus est, cette dérive sécuritaire nourrit  le détestable climat de néo-guerre froide. La ministre allemande de la défense, Annegret  Kramp-Karrenbauer, vient encore de le démontrer en brandissant la « menace » que représenterait la Russie et le « défi stratégique » qu’incarne la Chine.
En vertu de quoi, elle apporte aujourd’hui son soutien aux nouveaux plans de l’OTAN. Qui osera commencer à rompre avec cette logique diabolique mondiale ?
Une autre variante des horreurs commises dans « l’ Europe des droits de l’homme », au nom de la « sécurité » , vient d’être illustré par une initiative du gouvernement autrichien, qui dépasse l’entendement : la publication d’une « carte de l’islam » répertoriant les noms et adresses de plus de 600 associations musulmanes et mosquées du pays afin (dixit la ministre Susanne Raab) de débusquer « dans les arrière-cours » des « idéologies » opposées aux « valeurs de la démocratie libérale » ! Qu’est-ce sinon de l’ islamophobie? Si l’on ne sait pas toujours où commence la stigmatisation raciste, l’Histoire nous a appris où elle peut finir.  Est-ce donc si difficile de comprendre que la sécurité humaine est aux antipodes de toutes ces dérives ?

10 juin 2021 at 6:08 Laisser un commentaire

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