Archive for novembre, 2021

MACRON ET LA NOUVELLE STRATÉGIE MILITAIRE DE L’UE


À la mi-décembre prochain, les 27 Chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE auront à examiner un projet de nouvelle stratégie militaire dont les principales orientations viennent d’être révélées par le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell . Il s’agit, selon ce dernier, de « définir une vision stratégique commune de la sécurité et de la défense de l’UE pour les cinq à dix ans à venir » et de rendre l’UE « plus audacieuse dans ses réactions face aux crises et aux menaces dans son proche voisinage » (selon le site « Euractiv »), la Russie et la Chine occupant une place prépondérante dans ce document de 28 pages…Quant à la fameuse zone Indo-Pacifique, il est prévu d’y intensifier les escales, les patrouilles et les exercices maritimes avec les « partenaires régionaux » que sont le Japon, la Corée du Sud, l’Inde, l’Indonésie et le Vietnam…
Il est notamment question, dans cet esprit, de créer, d’ici 2025, une force d’intervention conjointe permettant de « déployer rapidement 5000 hommes et comprenant des composantes terrestres, aériennes et maritimes ». Le document précise logiquement que ces nouvelles ambitions supposent une augmentation du budget de défense des Etats participants. L’adoption finale de ce document, en discussion depuis des mois entre les Etats membres, est prévue en mars 2022, durant la présidence française du Conseil européen. Paris veut en faire un acte majeur de sa présidence de l’UE (qui ne se renouvelle que tous les 14 ans). 
Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, parle avec lyrisme de cette « boussole stratégique » censée définir « une approche proprement européenne des menaces qui pèsent sur nous aujourd’hui »et renforcer « nos capacités opérationnelles » (nos interventions militaires) ou « industrielles » (nos usines d’armements et nos ventes d’armes), en « défendant nos intérêts »…(1) Une remarque s’impose : bien que M. Le Drian ait prononcé 11 fois le mot « souveraineté » dans ce discours consacré aux « convictions » européennes d’Emmanuel Macron, le concept est pour le moins inadapté à l’  » Europe de la défense « , puisque, loin de conduire les pays de l’UE à prendre leurs distances avec l’OTAN, ce projet est, selon M. Borrell, « un moyen de rendre l’OTAN plus forte » – un constat apparemment partagé par Joe Biden lui-même ! 
Autant dire qu’il y a lieu de suivre avec vigilance et de s’expliquer avec clarté sur cette nouvelle étape d’une tentative de militarisation de l’Union européenne, pourvoyeuse de tensions supplémentaires alors que l’heure est plus que jamais depuis 30 ans a une stratégie de désescalade, de détente et de coopération. 

———(1) Discours au Sénat (16/11/21)

25 novembre 2021 at 7:50 Laisser un commentaire

ÉCONOMIE, CLIMAT : LA CHINE EST UN PARTENAIRE OBLIGÉ

« Le spectre d’un ralentissement de la Chine pèse sur l’économie mondiale » titrait récemment « Le Monde ». Evoquant une prévision de croissance en baisse par rapport aux 8% initialement envisagés à Pékin pour 2022, l’un des experts cités par le quotidien notait à ce propos : « Le monde s’est tellement habitué à ce rythme élevé qu’il en a oublié les bénéfices qu’il en retirait », tandis qu’un autre prévenait « Personne ne peut prendre le relais de la Chine, car aucun pays n’a sa taille » (1).
Trois semaines plus tôt, le quotidien économique « Les Echos » évoquait déjà le « risque » que « le monde s’enrhume » quand « la Chine éternue » (2). C’est particulièrement vrai pour l’Europe. Voilà qui devrait suffire à mesurer combien il serait contre-productif de suivre Biden dans sa guerre économique et sa croisade politique contre Pékin. 
Mais il y a plus, car le raisonnement vaut tout autant pour la lutte, vitale, contre le dérèglement climatique. Sans une étroite coopération avec la Chine sur ce terrain crucial, les Européens peuvent dire adieu aux espoirs nés à la Conférence de Paris de 2015.
A quoi rime, dès lors, la campagne de dénigrement menée contre Pékin à ce sujet ? De fait, l’image de la Chine qu’on délivre au « grand public » à ce propos tient en deux formules : la Chine est « le premier pollueur de la planète, loin devant les Etats-Unis » et « à rebours des appels de la communauté internationale à décarbonner , la Chine rouvre de mines de charbon ». C’est ce qui s’appelle des mensonges par omission.
En effet, on « oublie » de rappeler que l’on compare ainsi deux pays de dimension sensiblement différente. En effet, si l’on se réfère aux émissions de gaz à effet de serre par habitant, ce sont les États-Unis qui polluent plus de deux fois plus que la Chine !
Par ailleurs, s’il est exact que, pour des raisons conjoncturelles (pénurie d’électricité), Pékin -historiquement très dépendant au charbon- a bien  repris l’exploitation de mines à l’arrêt , pourquoi taire ses efforts gigantesques déployés parallèlement dans les énergies renouvelables qui font aujourd’hui de la Chine -comme pays-  le No 1 mondial dans l’éolien, le solaire et l’hydroélectricité, et de loin !
De même, faut-il rappeler que l’engagement de Pékin d’atteindre la neutralité carbone avant 2060 et un pic d’émissions avant 2030, minimisé par certains commentateurs en marge de la COP 26, avait été qualifié -dans les conditions propres à la Chine- de « tournant historique » par de nombreuses ONG (3). 
Autant il ne s’agit pas de s’auto-censurer sur les critiques légitimes à formuler vis-à-vis de la Chine comme de tout autre pays, autant rien ne justifie de jeter le discrédit sur un pays dont nous sommes, qui plus est, durablement, un partenaire obligé.

(1) Le Monde (7/11/2021)
(2) Les Échos (18/10/2021)
(3) La Tribune (22/9/2021)

19 novembre 2021 at 5:02 Laisser un commentaire

  « EUROPE DE LA SANTÉ »: PEUT (BEAUCOUP) MIEUX FAIRE !


Tandis que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que « l’Europe est à nouveau à l’épicentre de la pandémie », mais souligne qu’ « aujourd’hui , nous en savons plus et que nous pouvons en faire plus », où en est « l’Union européenne pour la santé » (UE4HEALTH) dont l’idée fut lancée en mai 2020 par la Présidente de la Commission, suite à une initiative franco-allemande ? 
Sur la base de l’expérience affligeante du « chacun pour soi » au début de la crise sanitaire, il s’agissait d’obtenir des Etats membres -jaloux de leurs prérogatives en la matière- qu’ils acceptent d’assumer en commun quelques missions essentielles comme : la constitution de réserves stratégiques de fournitures médicales disponibles à un coût abordable , la formation de professionnels de la santé déployables dans toute l’UE, le renforcement de la surveillance des menaces sanitaires, l’amélioration des systèmes de santé afin d’améliorer l’accès aux soins, un surcroît de recherche sur les maladies transmissibles …et bien d’autres tâches à plus long terme.
Bref, il fallait se donner, ensemble, les moyens d’être plus réactifs et plus efficaces face aux futures crises sanitaires.
Cette louable ambition se heurta tout d’abord au mur de l’argent. Il y eut une bataille homérique sur le budget à accorder à ce nouveau programme : la Commission proposait de l’ordre de 10 milliards d’euros pour les 7  prochaines années, les gouvernements ne voulaient lâcher qu’ 1,7 milliard ! Le Parlement européen arracha de haute lutte un compromis à 5,1 milliards pour la période 2021-2027. Un montant qui, bien que plus de 10 fois supérieur au budget-santé européen des 7 dernières années, reste évidemment insuffisant…
L’autre critique récurrente que s’attire l’UE, dans ce domaine comme dans d’autres, tient à son fonctionnement.
Ainsi, 19 organisations européennes de santé viennent-elles de se plaindre du manque de transparence de la toute nouvelle « Autorité de préparation et de réaction aux urgences sanitaires » (HERA, lancée en septembre dernier). Celle-ci doit œuvrer pour « l’intérêt public », axer la recherche sur les « besoins de santé publique » et être exemplaire dans l’action pour « un accès équitable et abordable aux outils médicaux », plaident ces acteurs de la société civile, qui appellent à un « débat démocratique et participatif » associant institutions et citoyens (1).
Cette action salutaire intervient quelques semaines après un précédent conflit entre quatre grandes ONG de la santé et la Commission européenne, qui leur avait coupé les subventions de fonctionnement, avant de se rétracter. 
Après ce démarrage chaotique, souhaitons que « l’Europe de la santé » émerge enfin concrètement ! L’actualité nous rappelle combien nous en avons besoin.

———-(1) Euractiv ( 3/11/2021 )

12 novembre 2021 at 6:52 Laisser un commentaire

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