Archive for janvier, 2021

L’ACCÈS AU VACCIN ANTI-COVID : « UN ÉCHEC MORAL » !

« Le monde est au bord d’un échec moral catastrophique et le prix de cet échec sera payé par les vies et les moyens de subsistance dans les pays les plus pauvres du monde » : le cri d’alarme du Directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Dr Tedros Ghebreyesus, devrait faire rougir de honte tant l’industrie pharmaceutique -totalement dénuée de scrupule, et pour laquelle la pandémie est avant tout un bon filon pour le business- que les dirigeants occidentaux, sûrs de la supériorité de leur pays sur les nations plus défavorisées, et donc de leur priorité quasi-naturelle dans l’accès au vaccin.
Commençons par les responsables politiques visés par le directeur de l’OMS. Les chiffres qu’il dévoile parlent d’eux-mêmes : 39 millions de doses du vaccin contre le coronavirus ont été administrées (le 18 janvier dernier) dans 49 pays aisés, tandis que dans « un des pays au revenu le plus bas » (non cité), « seulement 25 (!) doses ont été administrées ». Plus précisément encore (toujours selon l’OMS) : 10 Etats, dont plusieurs européens, concentrent 95 % des vaccinations ! Devant les risques de pénurie du précieux sérum, certains de leurs dirigeants poussent leur avantage jusqu’à payer au prix fort des commandes complémentaires, quitte à assécher les stocks destinés aux pays en développement ou à les rendre financièrement inaccessibles pour ces pays . Cette attitude risque de mettre en péril la réalisation du programme « Covax » mis sur pied il y a des mois par l’OMS à partir d’un accord passé avec de nombreux Etats . Ce programme devait assurer l’accès de 92 pays à revenus faibles ou moyens à deux milliards de doses de vaccins. Une fois vaccinés leurs personnels de santé et les populations âgées, les pays riches devaient partager leurs doses avec Covax. Qu’en sera-t-il ?
Quant aux sévères critiques adressées par le Dr Tedros aux grands groupes pharmaceutiques, elles reposent sur leur insatiable appât du gain qui les a conduits à donner la priorité à l’approbation de leur vaccin auprès des Etats les plus riches plutôt que de le soumettre à l’examen de l’OMS en vue d’obtenir une autorisation à l’échelle mondiale. Le Dr Tedros pointe là un véritable enjeu de civilisation qui concerne à la fois le « big pharma » et tous les dirigeants politiques qui cèdent au « nationalisme vaccinal » : puisque, désormais, le monde entier est touché par la pandémie et qu’il y aura progressivement des vaccins pour tout le monde, « nous devons -dit le directeur de l’OMS- travailler ensemble comme une seule famille mondiale pour donner la priorité à ceux qui sont les plus exposés aux maladies graves et à la mort, dans tous les pays« . Le choix inverse est non seulement égoïste, il est illusoire : dans un monde aussi interdépendant, la fameuse « immunité collective » tant fantasmée ne s’obtiendra pas à l’échelle d’un seul pays ni même d’un groupe de pays tant que le virus et ses multiples variants circuleront partout ailleurs. Il est temps d’arrêter de discourir sur le « multilatéralisme » et de le pratiquer vraiment.

28 janvier 2021 at 4:26 Laisser un commentaire

LE 22 JANVIER 2021, L’ONU ET LES ARMES NUCLÉAIRES

 

C’est ce 22 janvier qu’entre en vigueur le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) adopté par l’ Assemblée générale des Nations unies le 7 juillet 2017. La règle veut, en effet, que le texte voté franchisse ce seuil symbolique 90 jours après sa ratification par un cinquantième État, ce qui fut le cas du Honduras le 24 octobre dernier. 
Hasard du calendrier, cet événement coïncide, à deux jours près, avec le départ forcé de Donald Trump qui, avant même son élection, en réponse à des questions précises et pertinentes d’un journaliste de la chaîne MSNBC sur le recours éventuel à des armes nucléaires, avait répondu : « Pourquoi les Etats-Unis fabriquent-ils des armes si ce n’est pas pour les utiliser ? (…) Je ne me priverai jamais d’aucune de mes options (…) Pour personne ! » Comme quoi, le danger nucléaire n’est pas l’apanage de la Corée du Nord ou de l’Iran : il est consubstantiel à l’existence d’un arsenal diabolique qui s’étend désormais à au moins neuf pays (1) , sans parler de ceux qui hébergent l’arme nucléaire à travers l’OTAN (2). 
On savait depuis la guerre froide qu’il était irresponsable de faire courir à l’humanité le risque d’un engrenage fatal dégénérant en conflit nucléaire suite à une crise internationale échappant au contrôle de ses protagonistes ou celui d’une dramatique erreur débouchant sur l’irréparable. Ce danger est encore plus réel dans le monde sans boussole que nous connaissons depuis plusieurs décennies. Mais il s’y ajoute désormais un scénario-catastrophe, jusqu’alors insoupçonné : depuis le cauchemar-Trump, personne ne peut plus ignorer le péril que peut représenter la possession des codes nucléaires par un Chef d’Etat à l’état mental douteux, comme l’a fort justement souligné la Présidente de la Chambre des Représentants des Etats-Unis, Nancy Pelosi. Que le sort de la paix mondiale puisse dépendre d’un seul individu est, en tout état de cause, une anomalie que tout esprit rationnel devrait juger inacceptable !
 L’entrée en vigueur du TIAN -qui n’a, hélas, pas de caractère contraignant pour les puissances nucléaires- devrait, à tout le moins, être l’occasion de relancer le débat sur tous ces enjeux , ainsi que sur l’urgence de panser les nombreuses plaies ouvertes par l’ancien hôte de la Maison-Blanche, dans ce domaine ultra-sensible. Deux dossiers sont, à cet égard, particulièrement cruciaux. Le premier d’entre eux est l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien, torpillé par Trump, et qui doit être restauré de toute urgence. L’autre est la prolongation du traité américano-russe New Start  sur la réduction des armes nucléaires stratégiques -une négociation que Trump avait gravement compromise,  alors que ce traité majeur arrive à échéance le 5 février prochain !
 Il est décidément grand temps de faire gagner en crédibilité et en soutien auprès de nos contemporains une vision de la sécurité internationale libérée du spectre nucléaire !

——–(1) Etats-Unis, Russie, Royaume-Uni, France, Chine, ainsi que Inde, Pakistan, Corée du Nord et Israël.(2) Allemagne, Belgique, Pays-Bas, Italie et Turquie.

21 janvier 2021 at 3:40 Laisser un commentaire

« LES AMÉRICAINS PIÉTINENT LA SOUVERAINETÉ EUROPÉENNE »

Au Congrès des Etats-Unis, républicains et démocrates, pour une fois unis, ont adopté,  dans les tous derniers jours de 2020, le budget américain de la défense.
En quoi cela nous concerne-t-il ? En ceci qu’au détour d’une phrase, celui-ci prévoit « l’expansion des sanctions concernant la construction de Nord Stream 2 ». Il s’agit -on le sait- du projet européen de gazoduc reliant la Russie à l’Allemagne à travers la mer Baltique et destiné à doubler les livraisons de gaz naturel russe vers l’Europe occidentale. Ce projet est, depuis son lancement, fermement combattu  par Washington, qui entend exporter vers l’UE son propre gaz, liquéfié, dont il est grand producteur. Le chef de la « diplomatie » de Trump, le sinistre Mike Pompéo, avait annoncé la couleur lors d’une visite à ses amis polonais : les Etats-Unis feraient tout ce qui est en leur pouvoir pour faire échouer ce projet. D’où une avalanche de sanctions unilatérales prévoyant notamment le gel des avoirs et la révocation des visas américains pour les entrepreneurs liés au gazoduc ! Tout cela au nom de …la « protection de la sécurité énergétique de l’Europe » ! Cette offensive , totalement illégale, a réussi à retarder le chantier, mais non à l’arrêter définitivement jusqu’ici. C’est pourquoi les parlementaires américains viennent de décider de renforcer encore leurs sanctions. Celles-ci visent dorénavant  on seulement les entreprises vendant, prêtant ou fournissant des navires chargés d’ installer les tuyaux du gazoduc, mais également tous ceux qui « facilitent » la provision de ces navires ou participent directement ou indirectement à des « activités » concourant à la mise en place des tuyaux ! Quelque 120 entreprises de 12 pays européens seraient concernés ! On croit rêver (1) . « Les Américains piétinent la souveraineté européenne » souligne un responsable de l’Institut français des relations internationales. Pourtant, les dirigeants européens se montrent particulièrement timides dans leur réaction à cette pratique ultra-dominatrice qu’est l’extraterritorialité de certaines lois américaines. 
On relèvera avec d’autant plus d’intérêt les premières déclarations du Chef du gouvernement portugais, le socialiste Antonio Costa, (au site Lusa.pt.) à propos d’un autre dossier transatlantique sensible : l’Accord de principe UE-Chine sur la protection des investissements, signé le 30 décembre dernier entre Bruxelles et Pékin (et dont la conclusion dépend du vote du Parlement européen).
Des voix se sont élevées pour déplorer cette décision sans concertation préalable avec le président américain élu, Joe Biden . Celui-ci s’inquiète , en effet, du « défi stratégique que pose la Chine et son assurance grandissante sur la scène internationale ». Réponse très pertinente du Premier Ministre du Portugal -qui préside l’UE durant ce semestre- : « Le processus de négociations était en cours. Cela serait très mal vu si nous décidions de le bloquer (…) pour nous aligner sur d’autres parties (…) L’autonomie stratégique de l’Europe à l’échelle mondiale dépend de sa capacité à dialoguer avec chacun de ses homologues « .
Voilà qui est dit. 


————-(1) voir le site « Euractiv » (6/1/2021) 

15 janvier 2021 at 12:36 Laisser un commentaire

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