Archive for mars, 2023

NETANYAHOU :  L’IMPUNITÉ  ALIMENTE L’ESCALADE

Chaque année, le 30 mars, les Palestiniens commémorent la « Journée de la Terre ». Cette journée de lutte fait référence à une puissante grève des Palestiniens d’Israël qui eut lieu ce même jour en 1976 pour protester contre la confiscation de 2500 hectares de terre en Galilée par le gouvernement de l’époque. L’armée réprima dans le sang cet acte de résistance avec une violence inouïe : c’est cette tragédie, et la cause à laquelle elle est intimement liée -la défense de leur terre au sens le plus large- , qui réunissent en cette journée l’ensemble des Palestiniens. 

C’est la proximité de ce moment emblématique -et du début du ramadan…- qu’a choisie la coalition d’extrême-droite au pouvoir en Israël pour voter, à la Knesset, le 21 mars dernier, l’annulation de la loi ordonnant en 2005 l’évacuation de quatre colonies de Cisjordanie. Cette décision est ouvertement provocatrice. Il s’agit, en effet, de revenir 18 ans en arrière, quand le pourtant très réactionnaire chef du gouvernement d’alors, Ariel Sharon, partisan du « Grand Israël », s’était senti contraint de faire un geste vis-à-vis de ses parrains occidentaux , dans un contexte de fortes pressions internationales contre la prolifération des colonies dites « sauvages », car établies sans autorisation préalable des autorités . 

Parmi les rares ministres qui s’étaient alors opposés à Sharon figurait un certain Benjamin Netanyahou. Celui-ci entend signifier aujourd’hui qu’il se sent assez fort pour casser la timide concession de son lointain prédécesseur. Les colons évacués en 2005 pourront donc se réinstaller sur des terres privées palestiniennes. Parmi eux figure une députée proche du ministre suprémaciste Ben Gvir, en charge de…la Sécurité nationale et de la Cisjordanie ! Le ministre des finances, l’ultra-orthodoxe Smotrich, s’était, quant à lui, illustré deux jours plus tôt dans une « cérémonie » aux allures de meeting d’extrême-droite, à Paris, par son abjecte sortie raciste sur le thème : « Il n’y a pas de Palestiniens. Ils n’ont ni histoire, ni culture ». Pour avoir prouvé le contraire, près d’une centaine d’entre eux sont morts depuis le début de l’année…

L’impunité alimente l’escalade : Netanyahou -ce personnage massivement contesté dans la rue par la population israélienne, fut salué dès son investiture comme son « ami depuis des décennies » par Joe Biden , avant d’être reçu en grande pompe par Emmanuel Macron, une semaine après le funeste assaut de l’armée israélienne sur le camp de réfugiés palestiniens de Jénine, en Cisjordanie, qui avait fait onze victimes. 

Même le putsch judiciaire que tente Netanyahou en soumettant la Cour suprême -seul contrepoids institutionnel du pays- à sa majorité parlementaire ne suffit pas aux dirigeants occidentaux pour se décider enfin à réagir au danger : celui d’une immunité totale pour Netanyahou  et d’une voie libre aux pires ambitions de sa coalition raciste et ultra-nationaliste en matière d’occupation, de colonisation et d’annexion. La France est, paraît-il, « extrêmement préoccupée » par la situation en Israël, exactement -au mot près- comme les Etats-Unis…Aveugles ou complices, jusqu’où ?

31 mars 2023 at 6:19 Laisser un commentaire

DU MOYEN-ORIENT À L’UKRAINE : LA DIPLOMATIE AU SERVICE DE LA PAIX

Le 10 mars denier, deux puissances ennemies, l’Arabie saoudite et l’Iran, ont rétabli leurs relations diplomatiques, rompues depuis sept ans. Que nous dit cet accord -conclu sous les auspices de la Chine- de la complexité de l’ordre mondial actuel ? D’abord, qu’il peut y avoir, malgré le contexte général d’affrontements impitoyables, un espoir de paix là où on ne l’attendait pas. Y compris entre deux pays dont la rivalité stratégique et la concurrence religieuse alimentaient jusqu’ici maints conflits sanglants , au premier rang desquels l’effroyable guerre du Yémen. Ensuite, que des efforts diplomatiques opiniâtres peuvent arriver à bout d’obstacles présumés insurmontables : l’accord du 10 mars dernier est, en effet, l’aboutissement de plus de deux ans de négociations difficiles entre les deux adversaires. Enfin, que la Chine -médiatrice et garante de cet accord- confirme l’étendue de son influence jusque dans une région où Washington exerçait naguère un leadership sans rival et où les Etats-Unis conservent toujours un poids certain, mais rencontrent des résistances de la part de leurs alliés historiques.

Le fait que cet accord historique a été annoncé, à la surprise générale, depuis Pékin, n’est, du reste, pas pour rien dans la discrétion des réactions américaines à cette nouvelle spectaculaire, d’autant qu’un conseiller du Président Biden venait tout juste de s’entendre avec Benjamin Netanyahu pour encourager l’Arabie saoudite -au nom d’un front commun contre l’Iran- à normaliser ses relations avec… Israël, avec l’objectif de sortir l’Etat hébreu de son isolement dans le monde arabe. Ce dégel-là (au détriment des Palestiniens) semble désormais compromis. 

L’Union européenne a, quant à elle, salué -certes fort sobrement- les efforts diplomatiques chinois qui ont conduit à cette « étape importante », soulignant que la promotion de la paix et de la stabilité ainsi qu’un apaisement des tensions au Moyen-Orient étaient des priorités pour l’UE. Sur ce point, parallèlement à la solidarité avec le soulèvement des Iraniennes et des Iraniens pour un changement de régime, on ne peut qu’être d’accord. 

Certes, il faut rester prudent : on n’est jamais à l’abri d’une mauvaise surprise dans la mise en œuvre effective d’un accord entre des protagonistes aussi peu portés sur la collaboration au service de la paix. Le rôle du garant chinois dans la réussite de cette nouvelle dynamique sera, dès lors, important. Ce « challenge » que s’impose ainsi Pékin est en lui-même un fait politique majeur. Il intervient -fait significatif- au même moment où le Président Xi Jinping prend des initiatives en faveur d’un règlement politique de la guerre en Ukraine et propose, après son voyage à Moscou, d’organiser un échange direct avec son homologue ukrainien, Volodymyr Zelensky,  « en vue de mettre fin à la guerre », précise le Wall Street Journal.

 La diplomatie au service de la paix : voilà qui nous change du discours ambiant sur fond de fracas des armes et d’insupportables pertes humaines .

23 mars 2023 at 7:20 Laisser un commentaire

20 ANS APRÈS, L’AMER SOUVENIR DE LA GUERRE D’IRAK 

Quiconque s’interroge encore sur les raisons du profond scepticisme, sinon de la défiance, qui traverse nombre de sociétés à travers le monde à l’égard des Etats-Unis et de leurs alliés, gagnerait à se rappeler les traits essentiels de l’une des aventures les plus désastreuses dans lesquelles ceux-ci se soient lancés : la guerre d’Irak il y a tout juste 20 ans. Pour aller vite, on peut en retenir cinq caractéristiques majeures : les contrevérités ; l’illégalité ; les complicités ; l’irresponsabilité et finalement l’impunité . 

Les contrevérités au sujet des buts de guerre de Washington restent dans toutes les mémoires. Des instituts indépendants ont recensé 935 mensonges de toute l’équipe dirigeante des Etats-Unis !

L’illégalité de cette guerre au regard de la Charte des Nations-unies fut officiellement confirmée par le Secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan. Aucun résolution ne fut soumise au Conseil de sécurité, la France ayant menacé d’user de son droit de veto. 

Les complicités avec les agresseurs furent, néanmoins , nombreuses. Le 30 janvier 2003, les dirigeants de huit pays européens  -Grande-Bretagne, Danemark, Pologne, Hongrie, République tchèque, Italie, Espagne et Portugal- appellent à l’unité derrière les Etats-Unis, au nom de nos « valeurs communes ». Le 5 février, c’est autour de l’Albanie, de la Bulgarie, de la Croatie, des 3 pays baltes, de la Macédoine, de la Roumanie, de la Slovaquie et de la Slovénie (dits « Groupe de Vilnius ») de faire allégeance aux Etats-Unis. Le 16 mars, un Sommet réunit aux Açores, autour de George. W. Bush, l’Anglais Tony Blair, l’Espagnol Aznar et le Portugais Barroso pour annoncer leur engagement dans la guerre contre l’Irak.

L’irresponsabilité de cette invasion se mesure d’abord au nombre de victimes qu’elle aura provoquées : 655 000 morts selon la revue médicale « The Lancet » (2006) et même plus d’un million selon l’Institut britannique « IIACSS » (2007), en sachant que le conflit fit encore de nombreuses victimes les années suivantes. On se rappelle les exactions tant de l’armée américaine (Abou Graïb …) que des 160 000 mercenaires de Blackwater. S’y ajoutent l’exil de 2,5 millions d’Irakiens (chiffre de 2006), l’enlèvement de 10 000 femmes victimes de la traite (selon le « Minoritory Rights Group ») et, pour toute la population, l’enfer généré par l’implantation progressive d’Al-Qaeda puis de Daech, les violences endémiques, les luttes d’influence, l’instabilité, la corruption , la pauvreté.

Enfin, l’impunité est, en l’occurrence, un mot faible. Non seulement, aucun des fauteurs de guerre ne fut inquiété, mais beaucoup d’entre eux furent récompensés : le très dévoué Premier ministre danois, Fogh Rasmussen, qui se qualifia lui-même de « faucon », devint Secrétaire général de l’OTAN; le Premier ministre portugais, Barroso, initiateur du Sommet des Açores, fut nommé Président de la Commission européenne; le fidèle entre les fidèles Tony Blair obtint le titre d’envoyé spécial au Moyen Orient où il fit de juteuses affaires. Quant à Joe Biden, alors Président de la Commission des Affaires étrangères du Sénat et « fervent partisan de l’invasion américaine de l’Irak » (Jean-Pierre Filiu), il poursuivit une brillante carrière…

16 mars 2023 at 2:40 1 commentaire

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