20 ANS APRÈS, L’AMER SOUVENIR DE LA GUERRE D’IRAK
16 mars 2023 at 2:40 1 commentaire
Quiconque s’interroge encore sur les raisons du profond scepticisme, sinon de la défiance, qui traverse nombre de sociétés à travers le monde à l’égard des Etats-Unis et de leurs alliés, gagnerait à se rappeler les traits essentiels de l’une des aventures les plus désastreuses dans lesquelles ceux-ci se soient lancés : la guerre d’Irak il y a tout juste 20 ans. Pour aller vite, on peut en retenir cinq caractéristiques majeures : les contrevérités ; l’illégalité ; les complicités ; l’irresponsabilité et finalement l’impunité .
Les contrevérités au sujet des buts de guerre de Washington restent dans toutes les mémoires. Des instituts indépendants ont recensé 935 mensonges de toute l’équipe dirigeante des Etats-Unis !
L’illégalité de cette guerre au regard de la Charte des Nations-unies fut officiellement confirmée par le Secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan. Aucun résolution ne fut soumise au Conseil de sécurité, la France ayant menacé d’user de son droit de veto.
Les complicités avec les agresseurs furent, néanmoins , nombreuses. Le 30 janvier 2003, les dirigeants de huit pays européens -Grande-Bretagne, Danemark, Pologne, Hongrie, République tchèque, Italie, Espagne et Portugal- appellent à l’unité derrière les Etats-Unis, au nom de nos « valeurs communes ». Le 5 février, c’est autour de l’Albanie, de la Bulgarie, de la Croatie, des 3 pays baltes, de la Macédoine, de la Roumanie, de la Slovaquie et de la Slovénie (dits « Groupe de Vilnius ») de faire allégeance aux Etats-Unis. Le 16 mars, un Sommet réunit aux Açores, autour de George. W. Bush, l’Anglais Tony Blair, l’Espagnol Aznar et le Portugais Barroso pour annoncer leur engagement dans la guerre contre l’Irak.
L’irresponsabilité de cette invasion se mesure d’abord au nombre de victimes qu’elle aura provoquées : 655 000 morts selon la revue médicale « The Lancet » (2006) et même plus d’un million selon l’Institut britannique « IIACSS » (2007), en sachant que le conflit fit encore de nombreuses victimes les années suivantes. On se rappelle les exactions tant de l’armée américaine (Abou Graïb …) que des 160 000 mercenaires de Blackwater. S’y ajoutent l’exil de 2,5 millions d’Irakiens (chiffre de 2006), l’enlèvement de 10 000 femmes victimes de la traite (selon le « Minoritory Rights Group ») et, pour toute la population, l’enfer généré par l’implantation progressive d’Al-Qaeda puis de Daech, les violences endémiques, les luttes d’influence, l’instabilité, la corruption , la pauvreté.
Enfin, l’impunité est, en l’occurrence, un mot faible. Non seulement, aucun des fauteurs de guerre ne fut inquiété, mais beaucoup d’entre eux furent récompensés : le très dévoué Premier ministre danois, Fogh Rasmussen, qui se qualifia lui-même de « faucon », devint Secrétaire général de l’OTAN; le Premier ministre portugais, Barroso, initiateur du Sommet des Açores, fut nommé Président de la Commission européenne; le fidèle entre les fidèles Tony Blair obtint le titre d’envoyé spécial au Moyen Orient où il fit de juteuses affaires. Quant à Joe Biden, alors Président de la Commission des Affaires étrangères du Sénat et « fervent partisan de l’invasion américaine de l’Irak » (Jean-Pierre Filiu), il poursuivit une brillante carrière…
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1.
michel muller | 16 mars 2023 à 5:42
Bonjour Francis,
Merci pour ce rappel… Se souvient-on des mercenaires US qui, comme aujourd’hui ceux de Poutine, avaient « légalement » toute latitude d’exaction, n’étant « pas soumis aux lois de la guerre »… A quand un tribunal pour ces gens-là ?
avec mon amitié,
michel m