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THATCHER, BLAIR, JOHNSON…DE L’AIR !

Tandis que commence la périlleuse aventure de Boris Johnson au « 10, Downing Street« , comment ne pas penser à la succession de désastres politiques que subissent les forces démocratiques de ce grand pays, notamment depuis 1979, date de l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher ! Il n’est pas inutile de revenir sur les principaux épisodes de cette terrible expérience, d’autant que nombre des stratégies mises en œuvre par les dirigeants successifs du Royaume-Uni ont fait école, par la suite, dans d’autres pays de l’Union européenne, France comprise.

Durant ses trois mandats, la « Dame de fer », chantre du néolibéralisme, mena, on s’en souvient, une véritable guerre contre les syndicats, développant dans le pays une véritable pédagogie du renoncement aux luttes sociales en refusant toute concession aux grèves les plus puissantes, telle celle, particulièrement emblématique par sa force et sa durée (11 mois !), des mineurs, en 1985. Elle appliqua la même intransigeance calculée au conflit nord-irlandais, laissant mourrir un à un les grévistes de la faim républicains qui revendiquaient  depuis leur sinistre  prison le statut de prisonnier politique. Et c’est toujours sur la base de ce principe-clé (ne rien céder) qu’elle arracha à ses pusillanimes « partenaires » européens le fameux « rabais » sur la contribution de la Grande-Bretagne au budget de l’UE, et ce sans limite dans le temps : soit environ 111 milliards d’euros en 30 ans ! Il faut croire que son modèle de gouvernance inspire aujourd’hui encore les dirigeants occidentaux les plus cyniques puisque son slogan : « Britain is great again » a, depuis, traversé l’Atlantique…

Vint ensuite la période Blair. Sans être assimilable à la précédente, elle a entériné nombre de ses régressions. Avant même son élection à la tête du pays, en 1997, c’est l’ arrivée du champion de la « troisième voie » à la tête du parti travailliste, en 1994, qui se traduisit par une défaite majeure pour le mouvement progressiste britannique. Devinant d’emblée la volonté et la capacité du nouveau Chef du « Labour » de casser tous les repères de gauche hérités de l’ « avant-Thatcher », la dirigeante conservatrice de choc salua en lui « le leader le plus formidable que nous ayons eu depuis cinquante ans » ! De fait, profitant de la marginalisation de l’aile gauche de son parti sous le règne -tout aussi néolibéral sur le fond, mais dans un style plus classiquement social-démocrate dans la forme- de son prédécesseur , Neil Kinnock (qui deviendra commissaire européen…), Tony Blair entreprit immédiatement la transformation tant du projet travailliste que des règles du parti. On parla d’une « tatchérisation du Labour », non sans des accommodements intelligemment distillés pour marquer la différence, tels des investissements dans les services publics ou diverses mesures sociétales. À l’issue de cette phase de « normalisation » de la gauche , la voie fut à nouveau ouverte aux conservateurs. Le piètre Cameron, pour des raisons étroitement politiciennnes, promit le référendum sur la sortie de l’UE, jouant à la roulette russe l’avenir du pays. Il sera suivi par une Theresa May impuissante face à une Chambre des Communes en plein désarroi. On connaît la suite -qu’on espère la plus provisoire possible. Thatcher, Blair, Johnson…De l’air !

1 août 2019 at 8:59 Laisser un commentaire

PETIT AVANT-GOÛT DES NÉGOCIATIONS SUR LE « BREXIT »

« Nous sommes une grande nation, globale (…) Une des plus grandes et des plus fortes économies mondiales. Avec des services de renseignements les plus sophistiqués, les forces armées les plus courageuses, un pouvoir de convaincre et un pouvoir de contraindre des plus efficaces, et des amitiés, des partenariats et des alliances sur tous les continents… » C’est par ces mots dénués de fausse modestie que la Première Ministre britannique, Madame Theresa May, avait lancé, en janvier dernier, devant le Parlement de Londres, le processus de sortie de l’Union européenne. Comme prévu, ce 30 mars, elle a décidé d’activer le fameux article 50 du traité de Lisbonne permettant l’ouverture des négociations avec l’Union européenne. En vue de celles-ci, le gouvernement du Royaume-Uni a publié un « Livre Blanc » détaillant sur près de 80 pages les grandes lignes du « bon accord » auquel il entend parvenir avec ses partenaires de l’UE (1). Un rapide coup d’œil sur quelques passages de ce texte donne une idée du bras de fer qui se prépare entre Londres et « Bruxelles »pour les deux prochaines années.

D’emblée, dans sa préface, le Secrétaire d’Etat « à la sortie de l’Union européenne », David Davis, donne le ton : « Le Royaume-Uni aborde ces négociations en position de force ». Le « Livre Blanc » lui-même affiche la même assurance : « Aucun accord vaut mieux qu’un mauvais accord pour le Royaume-Uni ». Loin d’émettre le moindre doute sur les perspectives du « Brexit » -que le texte appelle à plusieurs reprises « la Grande abrogation » ( avec un grand G ! )-, les autorités britanniques sont décidées à présenter le visage d’un pays sûr de lui : à leurs yeux, celui-ci est, à bien des égards, « leader mondial », y compris… »en matière de droits des travailleurs » ! De façon plus crédible, elles rappellent à l’attention de ceux de ses « partenaires » qui l’auraient oublié que « le secteur des services financiers du Royaume-Uni est une plaque tournante pour l’argent, le commerce et les investissements du monde entier », que « plus de 75% des activités du marché des capitaux de l’UE à 27 sont réalisés au Royaume-Uni ». Et elles les préviennent aimablement qu’en matière de business, les compromis ne seront pas faciles à négocier : « quittant l’UE, le gouvernement s’est engagé à faire du Royaume-Uni le meilleur endroit au monde pour faire des affaires ». Il est donc décidé à saisir « activement des opportunités de réduire les coûts d’une règlementation inutile ». A bon entendeur…

Pour autant, en « champions du libre-échange, stimulant la libéralisation », les dirigeants anglais s’affirment des partisans résolus d’un accord « ambitieux et complet » avec l’UE permettant « aux entreprises britanniques de commercer avec le maximum de liberté sur les marchés européens », en bénéficiant d’un « système d’arbitrage en cas de litige (…) essentiel pour rassurer les entreprises », et tout cela sans être « tenus d’apporter d’importantes contributions au budget de l’UE ». Ben voyons ! Quant aux ressortissants de l’UE, la Grande-Bretagne est prête à « encourager les plus brillants et les meilleurs à venir ». Cerise sur le gâteau : Londres est disposée à apporter « de la valeur ajoutée à la politique étrangère et de sécurité de l’UE » grâce à son « rôle de premier plan dans le renforcement de la présence avancée de l’OTAN », comme en Estonie et en Pologne. No thank you Madam May !

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(1) Toutes les citations de cet article sont tirées du « Livre blanc » publié par le gouvernement britannique sur « la sortie du Royaume-Uni et le nouveau partenariat avec l’Union européenne ». (www.gov.uk/government/publications)

30 mars 2017 at 8:17 Laisser un commentaire

LES TROIS PREMIÈRES LEÇONS DU « BREXIT »

wurtz-l-humanite-dimancheIl aura fallu huit longs mois de tergiversations aux autorités britanniques, après le vote pour la sortie de l’Union européenne, pour être enfin en mesure de publier un « Livre Blanc » fixant l’esprit dans lequel le gouvernement de Theresa May entend engager la négociation avec ses 27 « partenaires ». Rappelons que ces tractations doivent débuter le mois prochain et aboutir à un accord en l’espace de deux ans dans le meilleur des cas. Bien des experts anglais estiment d’ailleurs ce délai beaucoup trop court pour démêler dans de bonnes conditions ( et pour qui ? ) l’écheveau des relations établies au fil des 44 années d’appartenance du Royaume-Uni à l’UE. Quant à l’avenir qui est censé résulter de ce divorce, personne, outre-Manche, n’en a la moindre idée. Encore faut-il avoir à l’esprit le fait qu’il s’agit, en l’occurrence, de l’Etat membre le moins intégré à l’ensemble européen : il n’a pas adopté l’euro; n’est pas associé à l’ « Espace Schengen » (suppression des contrôles aux frontières); n’est pas lié par certaines coopérations judiciaires ou policières; ne reconnaît pas la « Charte des droits fondamentaux »; n’est pas concerné par certaines législations sociales de l’UE et ne paye qu’une partie de sa contribution au budget européen ! L’on imagine ce qu’il en serait pour un pays fondateur de l’UE et membre de la zone euro. L’interdépendance est une réalité. C’est là une première leçon qui se dégage d’ores et déjà du « BREXIT »: quitter l’Union européenne est un droit pour tout pays membre, mais il faut savoir -et faire savoir- que c’est une décision très complexe et aux conséquences imprévisibles.

Mais ce sont surtout les moyens envisagés par les « Brexiteurs » pour « regagner (la) compétitivité » du pays après cette séparation qui doivent attirer notre attention. Pour le ministre des finances de Londres, la cause est entendue : il faudra baisser les impôts sur les sociétés à un niveau digne d’un paradis fiscal ! Voilà le type de chantage brandi par les négociateurs britanniques pour tenter d’arracher à l’UE « un accord de libre-échange ambitieux et global » et notamment le maintien du « passeport européen » pour les financiers de la City. La Première Ministre, quant à elle, est allé chercher le salut du Royaume-Uni, « grand pays mondial » bientôt coupé de ses plus proches partenaires, auprès de Donald Trump ! « L’ironie est que les personnes qui ont le plus souffert ces vingt-cinq dernières années en seront les premières victimes » prévient le lucide Nobel américain, Joseph Stiglitz. C’est là un deuxième enseignement du « BREXIT » : le peuple britannique n’a décidément rien de bon à attendre de « l’alternative » à l’UE qui s’annonce ! Une vérité propre à éclairer des travailleurs sensibles à la démagogie de la patronne du FN, qui partage avec son modèle Trump son admiration pour le « BREXIT »…

Un troisième signal d’alarme devrait, quant à lui, alerter quiconque, à gauche, estime exagérées les mises en garde contre le risque immense d’explosion nationaliste que comporterait, dans le contexte actuel, un éventuel éclatement de l’Union européenne : depuis le vote pour le « BREXIT », les actes racistes et les agressions xénophobes se succèdent à un rythme effrayant en Angleterre (+ 42% de plaintes dès la semaine du vote par rapport à l’année précédente !) Ce vote a littéralement libéré la haine de « l’étranger » et les bas instincts. « Cela a donné aux Britanniques une sorte de feu vert pour être racistes » avait déclaré il y a quelques mois l’un des organisateurs d’une marche de protestation (1). Décidément, pour la gauche, il n’y a pas d’échappatoire au combat pour la transformation démocratique de l’UE : la sortie de l’Union européenne n’est pas une option.

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(1) Le Monde 15/9/2016

9 février 2017 at 4:20 1 commentaire

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