L’ESPOIR,CE « MAL INCURABLE »…
6 janvier 2011 at 10:00 9 commentaires
On connait la citation du regretté Mahmoud Darwich,le plus grand poète palestinien,qui expliquait par ces mots l’irrépressible esprit de résistance de son peuple,malgré l’interminable calvaire de l’occupation,le torpillage systématique des négociations de paix et le sentiment d’être abandonné par la communauté internationale : « Nous souffrons d’un mal incurable qui s’appelle l’espoir. »C’est lui qui permet,au milieu de la nuit noire,d’apercevoir la petite lueur qui évite le découragement et aide à retrouver l’envie et la force de poursuivre le combat.
Une fois n’est pas coutume: voilà que la « petite lueur » nous vient d’un groupe d’importantes personnalités politiques européennes ayant toutes exercé des responsabilités de haut niveau en liaison avec la situation au Proche Orient.Qu’on en juge : cinq anciens commissaires européens dont un ex-Président de la Commission (Romano Prodi) et un ex-Vice-Président chargé des Relations extérieures -qui plus est,conservateur britannique- (Chris Patten);une quinzaine d’anciens ministres français,allemand,anglais,italien,espagnol,autrichienne,néerlandais,scandinaves…parmi lesquels six ex-ministres des Affaires étrangères (de gauche comme Hubert Védrine ou de droite comme Hervé De Charrette),trois ex-Vice Premiers Ministres et six ex-Premiers Ministres (eux aussi de sensibilités politiques diverses);et même trois anciens Chefs d’État,un ancien Directeur général de l’Organisation Mondiale du Commerce,ainsi que l’ex-Haut Représentant de l’UE pour la politique étrangère et de sécurité commune,Javier Solana en personne…ont publié au mois de décembre une adresse commune aux actuels dirigeants européens à propos de la question palestinienne.(1)
« L’année 2011 aura une importance déterminante pour l’avenir du Moyen Orient » soulignent-ils,notant qu’il serait grand temps de traduire en « mesures concrètes » les positions de principe qui sont officiellement celles de l’Union européenne.Suit alors toute une série d’observations et d’exigences qui correspondent souvent trait pour trait aux arguments que nous n’avons cessé,avec notre groupe de la Gauche Unitaire européenne,de mettre en avant: « L’Europe ne peut pas accepter » la politique d’Israël dans les territoires palestiniens occupés. »Il y va de sa crédibilité ».Or, »elle n’a pas sanctionné de quelconque manière l’expansion continue et systématique des colonies ».Au contraire, elle a « continué à développer ses relations bilatérales » alors même que ce « rehaussement » n’a pas lieu d’être « tant que la colonisation ne sera pas gelée. »C’est pourquoi « nous estimons nécessaire de mettre fin à l’importation des produits des colonies. »En outre, une « délégation de haut niveau de l’UE » devrait se rendre à Jérusalem-Est-dont la Lettre des anciens dirigeants met en relief l’importance stratégique.Plus généralement,est-il souligné,l’UE devrait ,en coopération avec les USA,la Russie, l’ONU, ainsi que la Ligue arabe,présenter « une proposition globale pour la résolution du conflit » et fixer une sorte d’ultimatum à Israël : « en l’absence de progrès d’ici avril 2011 »,le problème prendra de la part de l’UE, une tout autre dimension…
Voilà,en effet, l’attitude que l’on attend de l’Union européenne! Certes,certains de ces signataires n’ont pas eu le même courage quand ils étaient aux affaires…Il n’empêche: cette initiative ouvre une nouvelle perspective d’action qui légitime notre engagement de longue date.Raison de plus de nous en saisir résolument.
——-
(1)Lettre du Groupe des anciens dirigeants européens au Président du Conseul européen -décembre 2010.
Entry filed under: Chroniques de l' "Humanité-Dimanche, Francis Wurtz, Francis Wurtz Le Blog, Franciswurtz.net.
9 commentaires Add your own
Votre commentaire
Trackback this post | Subscribe to the comments via RSS Feed
1.
Albert | 11 janvier 2011 à 11:22
Dire adieu à l’espoir et à la philosophie idéaliste, examiner des faits concrets et se mettre à chercher pourquoi cette volonté de réformer la logique de la construction européenne n’aboutit jamais : L’Europe des grandes firmes
Les multinationales, qui agissent aussi bien individuellement qu’au sein de divers lobbies, sont devenues d’importants partenaires politiques dans le processus de prise de décision de l’Union européenne [UE]. Au cours des 15 dernières années, avec la réalisation du Marché unique, l’adoption de la monnaie unique et l’accroissement du pouvoir de ses institutions, l’unification européenne est passée à la vitesse supérieure. Ce processus s’est accéléré sous la pression des lobbies représentant les plus importantes entreprises européennes. Bruxelles regorge aujourd’hui de manœuvriers. Plus de 10 000 professionnels du lobbying hantent les couloirs de la Commission, du Conseil et du Parlement, la grande majorité d’entre eux issu d’agences de relations publiques, de lobbies de l’industrie ou de compagnies indépendantes. À l’image de Washington, berceau du lobbying industriel intensif, Bruxelles est devenue le foyer d’un nombre croissant de départements d’entreprise spécialisés dans les politiques gouvernementales, de lobbies, de bureaux d’études, de cabinets conseils politiques et d’agences de relations publiques .
L’éclosion de l’industrie du lobbying date de la fin des années 1980 et du début des années 1990, période durant laquelle la Commission européenne était essentiellement occupée à rédiger les quelque 300 directives qui allaient former le squelette du Marché unique. Les groupes industriels sautèrent sur cette occasion de modeler cet énorme travail d’harmonisation selon leurs intérêts particuliers, concentrant de plus en plus leurs efforts sur Bruxelles.
Actuellement, plus de 200 grandes firmes ont des départements de politiques européennes à Bruxelles. Parmi elles, beaucoup sont américaines ou japonaises . Pas moins de 500 lobbies allant de groupes importants et puissants tels la Table Ronde des industriels européens [ERT], la Fédération européenne de l’industrie chimique [CEFIC]aux groupements plus modestes et spécialisés tels que les Fabricants européens de bougies .
Les relations entre la Commission européenne et les grandes entreprises ont changé de façon spectaculaire au cours des 25 dernières années. En 1973, face à l’inquiétude généralisée devant le pouvoir industriel, Altiero Spinelli, alors membre de la Commission industrielle, avait proposé de « se pencher sur les problèmes économiques et sociaux générés par les activités des entreprises transnationales » . Cette approche critique envers les multinationales s’est cependant progressivement transformée en la parfaite symbiose qui règne aujourd’hui entre les principaux acteurs politiques et économiques de l’Union. La Commission commença à tisser avec l’industrie des alliances stratégiques au début des années 1980. Elle encourage, depuis, la participation des grandes entreprises et des associations industrielles paneuropéennes au dispositif politique de Bruxelles. Ces partenariats ajoutent du poids aux initiatives de l’UE et tendent à renforcer la position de la Commission vis-à-vis des gouvernements des États membres. De plus, de telles alliances politico-industrielles sont déjà bien établies au niveau national dans la plupart des pays. Le nombre et l’intensité des connexions avec le monde des affaires varient d’un service à l’autre de la Commission, mais le phénomène ne fait, selon toute évidence, qu’augmenter. Souvent, les grandes entreprises et leurs groupes de pression fournissent d’utiles renseignements à une administration déconnectée et manquant de personnel. En fait, on peut dire que les lobbies industriels agissent en lieu et place de la base citoyenne dont la Commission est dépourvue. Le système politique européen est un véritable paradis pour les activités de ces lobbies : on y prend derrière des portes closes des décisions lourdes de conséquences, en petits comités, invisibles et inaccessibles à ceux qui en subissent les effets. Malgré de légères améliorations apportées par les traités de Maastricht et d’Amsterdam, la Commission européenne et le Conseil des ministres restent un grand mystère pour les électeurs alors que leur contrôle par les parlements tant nationaux qu’européen reste, lui, insuffisant.
Début 1999, un comité parlementaire enquêtant sur les soupçons de fraude au sein de la Commission européenne en est arrivé à l’amère conclusion qu’il est difficile de trouver un fonctionnaire responsable au sein de cette institution. En fait, le Conseil, encore plus opaque que la Commission, a tendance à se draper dans le secret, allant même jusqu’à refuser de rendre public l’ordre du jour de ses réunions. Les importantes décisions sont livrées aux ministres, clés en mains, par d’occultes comités de diplomates nationaux opérant dans les méandres du labyrinthe bruxellois.
Bien qu’au cours de ces dernières années, les mouvements sociaux se soient invités à Bruxelles, l’état des forces reste radicalement déséquilibré. La complexité de l’administration européenne est telle qu’il est impossible d’en suivre les développements politiques sans de solides connaissances ou les compétences d’un expert. Tandis que les entreprises peuvent se permettre de payer des milliers d’agents pour représenter leurs intérêts à Bruxelles, les coalitions européennes d’organisations citoyennes et les syndicats sont relativement pauvres et manquent tant de personnel que de moyens.
Franchir l’énorme fossé qui les sépare des décideurs n’est pas moins ardu. La centralisation du pouvoir à Bruxelles, qui s’est développée aux dépends des démocraties nationales, a donné aux grands groupes industriels un énorme avantage dans l’arène politique européenne. Il est clair que des organisations telles que la Table Ronde des industriels européens bénéficient d’une situation extrêmement privilégiée puisque les prestigieux dirigeants de leurs puissantes multinationales accèdent en toute facilité aux Commissaires européens et aux hauts fonctionnaires gouvernementaux. Sans opinion ni débat publics au niveau européen, il devient facile aux groupements industriels brumeux de s’immiscer entre citoyens et institutions pour promouvoir des décisions indiscutablement totalement antidémocratiques.
2.
Simon Jacqueline | 11 janvier 2011 à 10:01
Les sacro-saintes nations, toujours présentées comme la seule alternative à l’Europe supra-nationale, seraient-elles protégées du lobbying ?
Le doute est la seule certitude.
3.
Albert | 22 janvier 2011 à 9:54
Jacqueline, rien ne vous empêche d’être en faveur de la « construction » européenne, mais après n’allez pas vous plaindre que les droits démocratiques, la justice sociale ne soit pas respectée et que l’OTAN fasse la loi.
4.
Simon Jacqueline | 22 janvier 2011 à 10:43
Se plaindre ? Quelle perte de temps ! C’est une démarche improductive. Dans la mesure de mes petits moyens, je défends une Europe qui est possible, un espace de paix et de démocratie qui peut être autre chose qu’un hypermarché sans, pour autant, se rétrécir aux frontières des nations étriquées, responsables de millions de morts à l’instar des religions.
5.
Albert | 23 janvier 2011 à 6:02
La « construction » européenne, j’étais pour à 100 % il y a une trentaine d’années, maintenant que j’ai vécu avec, je préfère la liberté, l’auto-organisation, l’autonomie, la séparation des pouvoirs et l’expression du peuple. Le « centralisme démocratique », l’autre nom de l’impérialisme, qu’il soit à Moscou, Bruxelles ou Washington, merci on a déjà donné.
Tirer les leçons de l’échec de la « construction » européenne pour aller de l’avant vers une coopération strictement conforme à la volonté populaire des pays concernés, voilà l’avenir.
6.
Albert | 23 janvier 2011 à 7:56
Savez-vous Jacqueline que le gouvernement du Canada et la Commission de l’UE négocient dans la plus complète opacité un accord appelé l’accord économique et commercial global (AECG) ?
Savez-vous que seuls les lobbies d’affaires sont consultés alors que les enjeux concernent la vie de tous les jours des citoyens ?
Malgré l’opacité des négociations, une fuite révélant le projet de l’accord et certains documents officiels ont permis de saisir les principales cibles de l’AECG.
Cet accord si il est signé posera une menace pour ce qui reste de nos services publics, d’autoriser massivement les OGM et d’entraver toute régulation sociale et environnementale. Il constitue en outre le premier pas vers la formation d’une vaste zone de libre-échange regroupant les pays de l’ALENA et ceux de l’UE, qui se fera au sacrifice des protections sociales, des réglementations environnementales et de ce qui reste des services publics.
Après, si vous trouvez toujours la « construction » européenne à votre goût, je ne peux rien pour vous, je ne m’occupe pas des cas désespérés, j’ai trop à faire.
7.
Simon Jacqueline | 23 janvier 2011 à 9:01
En effet, c’est désespérant … ce manque d’imagination. L’UE présente aujourd’hui tous les défauts que vous décrivez mais en quoi serait-elle obligée de rester ainsi. Un BON révolutionnaire doit mettre un point d’honneur à la faire changer, pas à détruire un principe qui est une avancée.
8.
Albert | 29 janvier 2011 à 6:19
Jacqueline, la « construction » européenne est un mal incurable.
Le Financial Times relate que la Commission entend renforcer la croissance grâce à une version renforcée de la directive services. Il est bien connu que la crise actuelle vient des affreux monopoles publics…
*
Euractiv, de son côté, rapporte qu’un comité secret travaille à une réforme de l’euro. La version française de l’article est abrégée. La version anglaise précise que le comité secret travaille en fonction de l’agenda allemand, avec comme mission de faire payer aux états membres de l’euro toute garantie que l’Allemagne pourrait être amenée à payer. Le paiement sera à faire en efforts de rigueur accrus.
Jean Quatremer
explique ainsi que, du fait des exigences allemandes, la retraite à 67 ans devra devenir rapidement la règle en Europe. La conclusion de son billet : « Bref, à terme, la zone euro ressemblera à une grande Allemagne. » En commentaire, il ajoute, et c’est tout à son honneur (où alors il ne se rend pas compte de la portée de ce qu’il écrit, ce qui n’est pas impossible) : « Il y a des raisons évidentes au recul de l’âge de la retraite. Mais l’Allemagne exige que tous les pays le fassent pour que les marchés sachent que les finances publiques resteront soutenables sur le moyen terme. »
*
Le Financial Times, encore, explique que le potentiel prochain ministre des finances irlandais a comme programme d’exiger une baisse du taux d’intérêt – punitif – qui lui a été infligé dans le cadre de son plan de redressement. Un sous-fifre de la Banque Centrale Européenne a aussitôt répliqué qu’il n’en était, d’avance, pas question ( ECB official rejects Irish loan cut hopes ). On voit bien, dans le système européen, où sont les vrais pouvoirs.
*
Personne alors ne sera étonné d’apprendre qu’à Davos, le PDG de Morgan Stanley, Jamie Dimon, a affirmé que l’Union européenne « est une des meilleures réalisations humaines de tous les temps. »
Pour que chacun comprenne en quoi c’est formidable, il a ajouté : « Le problème fondamental sous-jacent est qu’il y a un pays où les gens partent à la retraite à 55 ans en touchant leurs droits à 100%, où il y des programmes sociaux généreux et une semaine de 33 heures, et une autre nation où l’on travaille 40 heures par semaine et où l’on part à la retraite à 65 ans […] L’un n’est pas prêt à payer pour l’autre. C’est juste une question de temps avant que l’on commence à dire: je ne vais pas payer pour un tel mode de vie. » Visiblement, des sources bien informées ont expliqué à M. Dimon que les acquis sociaux dans l’Union n’en ont plus pour longtemps, et ça lui a beaucoup plu.
*
Quelle est la vision d’ensemble qui se dégage de cela ? L’Union amuse la galerie en expliquant que la crise vient de rigidités des régelmentations publiques. Pendant ce temps ce sont des technocrates qui planifient la suppression des acquis sociaux pour rassurer les marchés financiers. Et les marchés financiers ont reçu le message 5/5. C’est ainsi que, en Irlande ou ailleurs, quelle que soit la couleur politique des gouvernements, c’est le plan européen qui s’imposera.
*
Il est important de comprendre à quel point la mécanique européenne est implacable.
9.
Albert | 29 janvier 2011 à 6:33
Errata :
L’article de Jean Quatremer est ici :
Bientôt la retraite à 67 ans pour tous !