Archive for avril, 2014

TROIS IDEES FAUSSES QUI FAVORISENT L’ABSTENTION

wurtz-l-humanite-dimancheOn nous annonce une abstention record aux élections européennes du25 mai prochain. Et ce seraient, comme toujours, les citoyens les plus en difficulté qui seraient les plus enclins à se désintéresser de ce scrutin -plus particulièrement parmi celles et ceux qui ont été déçus par la « gauche »au pouvoir. Or, autant leur exaspération est légitime -envers cette Europe comme à l’égard du gouvernement !- autant se priver d’un vote vraiment de gauche aux élections du 25 mai serait une erreur fatale. Trois idées fausses méritent d’être clarifiées à ce propos.

La première concerne le Parlement européen : « il n’a aucun pouvoir! » entend-t-on fréquemment. Répétons donc une fois de plus ce fait majeur: les fameuses « directives de Bruxelles », telles celles qui libéralisent les services publics ou organisent la mise en concurrence des travailleurs en Europe n’existent que parce qu’une majorité de parlementaires européens les ont adoptées ! Ainsi, la  directive sur les « travailleurs détachés » aurait pu être sensiblement modifiée si les amendements de notre groupe de la « Gauche unitaire européenne » (conformes aux demandes des syndicats ) avaient été plus largement soutenus. On aurait été en position de force vis-à-vis des gouvernements les plus libéraux. Il y a plus: les députés européens auront à approuver ou à rejeter la future Commission européenne; il pourront à tout moment la renverser; ils auront également à approuver ou à rejeter le futur (éventuel) traité sur le « Grand marché transatlantique »- ce projet diabolique des ultra-libéraux. Etc…Aussi, l’abstention est-elle contre-productive: elle renforce les partisans de l’Europe libérale au lieu de conforter l’opposition de gauche à cette Europe-là !

Par ailleurs, à entendre les grands média -qui font une cour obscène au Front national- , il faudrait s’attendre à ce que le prochain Parlement européen soit une chambre brune envahie par les amis des Le Pen de toute l’Europe. La voix de la gauche critique serait noyée sous le flot populiste! A quoi bon aller voter, s’il en était ainsi! Le problème,c’est que la réalité est tout autre! Selon les toutes dernières projections en sièges, à partir des enquêtes d’opinion en Europe, notre groupe de la « Gauche unitaire » augmenterait le nombre de ses membres de quelque…50% -du jamais vu!- et frôlerait la troisième place, très loin devant toute la coalition des extrêmes droites, qui n’est même pas assurée, à ce stade, de pouvoir constituer un groupe! Raison de plus de contribuer à ce rapport de force par votre bulletin de vote!

Enfin, l’idée -compréhensible- circule que « cette Europe ne tiendra de toutes les façons aucun compte du choix des citoyens,comme ce fut le cas après la victoire du NON en France au traité constitutionnel en 2005″. La grande nouveauté par rapport à cette période-là, c’est que la crise de légitimité de l’Europe actuelle n’est plus limitée à un ou deux pays: elle est générale . Un sondage Gallup organisé en septembre dernier dans les 28 pays membres est éloquent à cet égard. A la question: »Les politiques d’austérité sont-elles efficaces? » 5% répondent OUI et 51% NON ! Et  à celle demandant si « une autre politique est possible? », 60% répondent par l’affirmative , contre 25% qui ne le pensent pas! La vérité, c’est qu’aujourd’hui les dirigeants européens en place et les dirigeants nationaux qui co-réalisent cette politique désastreuse sont massivement désavoués. Ils pérorent mais, en réalité, ils sont très affaiblis . C’est donc le moment ou jamais pour affirmer l’exigence de ruptures nettes avec ce modèle qui a fait faillite et pour s’attaquer à la refondation de la construction européenne: coopérative, solidaire et démocratique. C’est le sens de la campagne de nos amis de la gauche européenne autour d’Alexis Tsipras, le courageux leader de Syrisa, en Grèce. Et c’est, en France, celui du vote pour les listes du Front de gauche.

30 avril 2014 at 7:31 2 commentaires

POUR UNE CONFERENCE D’HELSINKI 2

wurtz-l-humanite-dimancheL’accord inattendu, sinon inespéré, intervenu à Genève le 17 avril dernier entre les Etats-Unis, l’Union européenne, le gouvernement intérimaire ukrainien et la Russie est déjà passé par pertes et profits par nombre d’observateurs, voire de dirigeants politiques..  A croire qu’ils font passer leurs sympathies partisanes avant l’espoir d’une solution à l’une des plus graves crises de l’après-guerre froide sur le sol européen, depuis la guerre de Yougoslavie.

Il est beaucoup trop tôt pour apprécier la portée réelle et durable de la « Déclaration commune » de Genève. La gestion déplorable de la crise ukrainienne depuis les événements de Maïdan a , de part et d’autre, si violemment exacerbé les différences et les différends entre les populations de la partie occidentale et celles des régions orientales du pays -chauffant à blanc les esprits, attisant les extrémismes, cultivant les paranoïas- qu’il est illusoire d’espérer voir retomber la fièvre dans l’immédiat. L’absence à la table des négociations de tout représentant des opposants aux autorités provisoires de Kiev n’était, en outre, pas de nature à faciliter la délicate mise en application à l’Est, des mesures prévues, comme « le désarmement de tous les groupes armés illégaux » et « l’évacuation des rues et places publiques illégalement occupée en Ukraine », surtout si, dans le même temps, le pouvoir en place à Kiev ne s’avère pas en mesure de faire entendre raison aux groupes paramilitaires également visés par les engagements de l’accord de Genève.

Malgré toutes ces limites et ces incertitudes, l’on ne peut que se réjouir que l’accord du 17 avril ait vu le jour. D’abord parce qu’il permet de briser le dangereux engrenage qui a conduit l’Ukraine au bord de la guerre civile, en convenant d’ « étapes initiales concrètes pour désamorcer les tensions ». Ensuite, parce qu’il quitte le registre de la confrontation pour celui de la coopération entre l’ « Occident » et la Russie en annonçant une mission de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) comprenant des observateurs de l’Union européenne, des Etats-Unis et de la Russie, en vue d’ « aider les autorités ukrainiennes et les collectivités locales dans la mise en oeuvre des mesures de désescalade ». Irresponsables seraient , dès lors,ceux qui, cédant aux pressions des ultras de leur camp, se laisseraient entrainer dans des postures ou des actes conduisant à décrédibiliser l’accord qu’ils ont signé au lieu de produire les efforts nécessaires à sa concrétisation sur le terrain! Cela vaut pour Washington ou Bruxelles et leur rhétorique sur les « sanctions »; pour Moscou et sa menace voilée d’un recours à la force armée; comme pour Kiev et sa lecture unilatérale des obligations découlant des engagements communs.

Et maintenant? L’Union européenne saura-t-elle dépasser son statut de « Junior partner » du grand frère américain en prenant ses responsabilités dans l’organisation de la coopération et de la sécurité du continent? Rappelons qu’en 2008, elle est restée muette et inerte face à la proposition formelle du Président russe d’alors, M.Medvedev, de négocier un « Traité paneuropéen de sécurité » incluant tous les contentieux existant entre les différentes parties en présence! Six années perdues plus tard, alors qu’approche, en 2015, le 40ème anniversaire de « l’Acte final d’Helsinki », la sagesse commanderait de réfléchir sérieusement à ce que pourrait apporter dans le contexte d’aujourd’hui une sorte d' »Helsinki 2″. Les dirigeants européens actuels ayant malheureusement la fâcheuse tendance à calquer leur « vision »des relations avec l’ « autre » puissance du continent sur celle de la Maison Blanche et de ses thuriféraires baltes ou polonais, il serait bon que le débat citoyen s’empare de cet enjeu dont dépendent en partie la sécurité et la paix en Europe dans un futur proche. La campagne pour les élections du 25 mai en offre l’occasion.

24 avril 2014 at 7:27 2 commentaires

CES ATOUTS GACHES PAR L’EUROPE LIBERALE (x)

wurtz-l-humanite-dimanche« Modèle social européen »; bourses Erasmus; règlement REACH (pour une meilleure maîtrise des risques chimiques); plan d’action européen contre le réchauffement climatique; Airbus…Ce type de références est souvent évoqué pour tenter de redorer le blason d’une « Europe » en bute à une crise de légitimité sans précédent. C’est en quelque sorte l’hommage du vice à la vertu! Il s’agit, en effet, d’atouts largement gâchés du fait des choix libéraux et des structures mises en place pour les servir dans l’actuelle UE. Seule une construction européenne refondée, autrement dit coopérative et solidaire, pourrait leur permettre de s’épanouir.

Ainsi,c’est un fait qu’en matière de protection sociale, de services publics et de droits sociaux , l’Europe a traditionnellement une longueur d’avance sur d’autres régions du monde. Mais cet atout est vu comme un boulet par les chantres de la « compétitivité ». Angela Merkel n’a de cesse de fustiger des acquis qui font que, selon elle, l’Europe « compte 7% de la population, 27% des richesses et…50% des dépenses sociales du monde »! L’urgence, dans cette logique,est d’en finir au plus vite avec cette anomalie. D’ailleurs, le président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi,l’a déjà annoncé aux « investisseurs »: « Le modèle social européen est mort ».(1) Dans les pays « sous assistance financière », il a été enterré par la « troïka »!

Les laudateurs de l’actuelle UE arborent également « Erasmus » comme une fleur à la boutonnière. Et pour cause: les étudiants qui en bénéficient plébiscitent cette chance qui leur est offerte de s’ouvrir à d’autres cultures, d’acquérir des compétences nouvelles et de faciliter la recherche d’un emploi! Le problème est que seule une infime minorité de jeunes a accès à cette mobilité positive, tandis qu’un jeune européen sur quatre est au chômage et bien d’autres galèrent dans la précarité.

Même phénomène en matière sanitaire et environnementale: le règlement REACH constitue effectivement la législation la plus exigeante du monde du point de vue de la responsabilisation des industriels dans la maîtrise des risques chimiques. Mais il faut savoir que cet atout fut conquis de haute lutte contre le Commissaire à l’industrie qui appela à ne plus jamais adopter pareil texte « néfaste pour la compétitivité »! (2)

Autre cas à noter: celui du programme européen « Energie-climat ». Des engagements , certes critiquables, mais s’inscrivant néanmoins dans la perspective d’une transition vers une économie « bas-carbone » ont été pris par le Conseil européen en 2009. On applaudit…mais,cinq ans après, l’élan s’arrête déjà: au nom -toujours- de la « compétitivité », aucun nouvel accord n’a pu être trouvé à ce jour entre les « 28 » en vue de la Conférence internationale de Paris sur le climat en 2015 !

Quant à la référence suprême, Airbus, s’il s’agit d’une incontestable prouesse technologique et commerciale, force est de constater que la « coopération exemplaire » d’hier,guidée par une forte volonté politique, a laissé place à une gestion capitaliste classique, avec ses licenciements, ses délocalisations, sa loi des actionnaires.

Que dire, enfin, de la Banque centrale européenne, dont le pouvoir quasi-illimité de créer de la monnaie est aujourd’hui entièrement mis au service des banques et des marchés financiers? Imaginons les horizons nouveaux qui s’ouvriraient à l’Europe si cette faculté bénéficiait aux investissements publics pour la promotion des capacités humaines et la transition écologique!

Tous ces atouts aujourd’hui gâchés ou dévoyés constituent autant d’appels à ouvrir résolument le grand chantier de la réorientation de cette « Europe » en perdition, en vue de sa refondation.

——-
(X) Texte de l’éditorial du prochain No de la revue « Progressistes ».
(1)Wall Street Journal (24/2/2012)
(2) M. Verheughen en décembre 2006

17 avril 2014 at 11:03 Laisser un commentaire

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