Archive for mars, 2020

PARLONS DE COMBAT MONDIAL, PAS DE « GUERRE » !

Dans toute l’Europe, des dizaines de millions de personnes vivent confinées, les relations sociales sont drastiquement réduites. Des mesures contraignantes, sans précédent sur notre continent, sont prises un peu partout. La situation appelle de la part de chacune et de chacun esprit de responsabilité et de solidarité. Mais, ne parlons pas de « guerre » ! Car, dans le meilleur des cas, il s’agit d’un abus de langage, peu respectueux des peuples soumis à une guerre réelle. Et dans le pire, d’une tentative de susciter des réflexes de discipline aveugle, de culte du chef et de repli sur soi.

Nul ne pouvait être surpris d’entendre Marine Le Pen marteler avant tout le monde : « Nous sommes en guerre ! » Mais, si l’on imagine aisément la délectation que peut procurer une ambiance guerrière à des politiciens d’extrême-droite, on est en droit d’attendre plus de circonspection de la part d’un Chef d’Etat. Aussi ne cacherais-je pas le malaise ressenti en entendant Emmanuel Macron reprendre à son compte, avec une lourde insistance, la formule en question.

Interrogé sur l’opposition entre la posture délibérément martiale du Président français et celle de la Chancelière allemande, évoquant, quant à elle, « le plus grand défi » que son pays ait à relever depuis la seconde guerre mondiale, un expert reconnu des affaires militaires de ce côté-ci du Rhin a apporté sur la question un éclairage qui doit nous faire réfléchir. Selon lui, « la France est une nation guerrière (…) L’Allemagne a rejeté la guerre depuis 1945. Son image reste très négative dans la psyché des Allemands, alors qu’elle peut être productive dans celle des Français » ! (1)

Gardons-nous de nourrir, fût-ce à notre corps défendant, une « image productive » de la guerre dans notre société en crise ! La guerre doit être un repoussoir ! Pensons-y quand des ministres ou des commentateurs s’enorgueillissent du record historique enregistré par notre pays en matière de ventes d’armes ! Réévaluons à cette aune la spécialité revendiquée par la France en matière d’intervention militaire, en particulier en Afrique ! Quand la sixième puissance économique du monde s’avère incapable de fournir des masques de protection aux personnels soignants en prise directe avec le coronavirus, il est temps de redéfinir les priorités : pour la France-même, pour notre rôle en Europe et pour notre coopération internationale, en particulier vers les pays du Sud !

Non, décidément, nous ne sommes pas « en guerre », mais nous sommes engagés dans un combat mondial, qui ne s’arrêtera pas avec la fin de cette pandémie.

NB : AU-DELÀ DE LA FRANCE, L’UE CONNAÎT, AVEC CETTE CRISE SANITAIRE INÉDITE , UNE ÉPREUVE DE VÉRITÉ DÉCISIVE  : L’ITALIE AUJOURD’HUI, D’AUTRES PAYS DEMAIN LA JUGERONT DURABLEMENT SUR LA SOLIDARITÉ EFFECTIVE QU’ELLE SERA CAPABLE DE LEUR APPORTER DANS LES JOURS SOMBRES QU’ILS TRAVERSENT !

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(1) Général Vincent Desportes, ancien directeur de l’Ecole de guerre (Figaro, 20/3/2020)

26 mars 2020 at 3:03 Laisser un commentaire

LA PERNICIEUSE « SOLIDARITÉ » DE L’UE AVEC LA GRÈCE

« Je remercie la Grèce d’être en ce moment notre bouclier européen » a lancé, le 3 mars dernier la nouvelle Présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen. En effet, précisa-t-elle, « Notre première priorité est de nous assurer que l’ordre est maintenu à la frontière extérieure (de l’UE) ». Aussi s’est-elle déclarée « pleinement engagée à mobiliser tout le soutien opérationnel nécessaire aux autorités grecques » pour renforcer le « bouclier » et garantir « l’ordre ». Des promesses en l’air, comme cela est trop souvent le cas ? Pas cette fois.  Bruxelles va bel et bien débloquer 700 millions d’euros d’assistance financière à la Grèce -dont 350  immédiatement- et envoyer sur le terrain 100 garde-frontières européens supplémentaires (qui s’ajouteront aux 530 déjà en fonction). Cette généreuse « solidarité » à la Grèce ne s’arrête d’ailleurs pas là : s’y ajoute en particulier l’envoi de sept bateaux, dont un patrouilleur de haute mer, un avion, deux hélicoptères et trois véhicules à vision thermique !

L’UE reconnaît manifestement un grand mérite au nouveau gouvernement grec : c’est sa capacité à refouler en bloc et sans ménagement -sur terre et en mer- les milliers de réfugiés syriens, irakiens ou afghans, victimes de la guerre puis du cynisme sans limite du leader turc !  Et tant pis si les autorités d’Athènes poussent leur zèle jusqu’à à suspendre (en toute illégalité) l’examen de toute demande d’asile ! Pour une fois, tous les 27 Etats membres sont sur la même ligne : « ceux qui cherchent à tester l’unité de l’Europe seront déçus » a fièrement lancé la Présidente de la Commission, symboliquement entourée pour l’occasion par le Président du Conseil européen, représentant les Chefs d’Etat et de gouvernement, Charles Michel, ainsi que le Président du Parlement européen, David Sassoli. Mieux : le « groupe de Visegrad » (Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie) , jusqu’ici champion de la contestation de la politique migratoire de l’UE, s’est dit, cette fois, »prêt à envoyer de l’aide » à la Grèce…pour consolider la frontière et repousser les intrus.

C’est d’une solidarité vraie que le peuple grec -et les migrants qui vivent un enfer à Lesbos et ailleurs- ont un besoin pressant ! Pourquoi ne pas abolir enfin le règlement pervers dit « de Dublin » qui est un piège kafkaïen pour les migrants et créé des situations inextricables pour un pays comme la Grèce ? Pourquoi ne pas retravailler l’idée d’un plan de relocalisation des réfugiés arrivés en Europe par la Grèce vers d’autres pays de l’UE, en tenant compte des choix et des situations particulières des personnes concernées ? Pourquoi ne pas placer les États récalcitrants devant leurs responsabilités en conditionnant le bénéfice des « Fonds de cohésion » à la participation à cette relocalisation des migrants ?

Au lieu de cela, l’UE, prisonnière de son accord indigne avec le maître-chanteur d’Ankara, pousse la fuite en avant immorale jusqu’à reprendre à son compte le principe et la méthode de ceux qu’elle accusait naguère de fouler aux pieds les « valeurs européennes » ! Malheur à ceux qui s’imaginent contrer les poussées de l’extrême-droite en s’alignant sur ses dogmes ! Le choix est aujourd’hui entre le sursaut et la barbarie.

13 mars 2020 at 10:17 Laisser un commentaire

L’UE FACE AU CORONAVIRUS : PAS INACTIVE, MAIS LABORIEUSE

Le « Covid-19 » touche désormais des dizaines de pays et suscite un peu partout une vague d’inquiétudes. Le moment est donc moins que jamais à l’instrumentalisation politicienne de cette épidémie. Ce scrupule n’étouffe manifestement pas Marine Le Pen. Elle saisit au contraire à pleines mains cette formidable aubaine pour broder sur l’un de ses thèmes de prédilection : les frontières, c’est la sécurité. Le « sansfrontièrisme » de l’Union européenne, voilà le problème. Ainsi, concernant le coronavirus, l’UE n’a, dit-elle, « pas dit un mot dans cette affaire », si ce n’est pour condamner ceux qui veulent « maîtriser des frontières, y compris de manière temporaire » (France Inter, 26/2/2020). Laisser passer ce genre d’allusion perfide sans en révéler la part de mensonge serait irresponsable.

Oui, il faut, hélas, critiquer l’action des institutions européennes dans cette crise sanitaire.  Mais, les critiques légitimes sont d’une tout autre nature que celles que distillent ces propos empoisonnés !  Se saisir du caractère transfrontalier de cette infection pour tenter d’attiser la méfiance vis-à-vis de « l’étranger » et de flatter le repli nationaliste est un procédé indigne, véritable marqueur de la démagogie d’extrême-droite.

Le reproche à faire à l’Union européenne n’est pas son silence supposé face à la propagation du coronavirus. La Commission a, par exemple, débloqué des fonds destinés, via l’Organisation mondiale de la santé, « aux pays où les systèmes de santé sont faibles » -ce qui est positif. Elle a également contribué au financement de la recherche d’un vaccin contre ce virus. En outre, si des Etats estiment que, du fait de circonstances exceptionnelles, leur sécurité nécessite le rétablissement provisoire des contrôles aux frontières, c’est parfaitement possible de le faire dans le plein respect des règles de l’espace Schengen. Cela étant, aucun pays de l’UE n’a, à ce jour, jugé utile d’y recourir ! Marine Le Pen a tout faux.

En fait, ce qu’on est en droit d’attendre des dirigeants européens est aux antipodes des obsessions de la cheffe du RN. C’est leur incompréhensible difficulté à coordonner l’action des 27 Etats membres (et même au-delà de l’UE), notamment en matière de prévention, de confinement, de contrôles médicaux ou d’organisation des soins à venir, en cas d’extension -probable- de l’épidémie. Il a fallu attendre le 13 février pour que les 27 ministres de la santé se concertent sur les mesures à prendre pour prévenir des possibles « menaces globales de santé publiques » ! Et qu’en est-il sorti ? De vagues promesses d’échange d’informations…Pourtant, l’UE est dotée depuis 2001 d’un « Mécanisme de protection civile » dont, précisément, selon les textes officiels, « le principal objectif est d’améliorer l’efficacité des systèmes de prévention, de préparation et de réaction face aux catastrophes naturelles et d’origine humaine de tout genre dans l’Union et en dehors de l’Union » ! (1). Il y a des domaines où nous serions nombreux à souhaiter… »plus d’Europe ».

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(1) Voir Décision No 1313/2013/UE (Synthèse du document)

5 mars 2020 at 7:46 Laisser un commentaire


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