Archive for avril, 2020

LA DIVISION NORD-SUD : UN POISON MORTEL POUR L’UE !

« Dans cette crise, nous Européens sommes tous embarqués dans la même galère. Si le Nord n’aide pas le Sud, il ne se perd pas seulement lui-même, il perd aussi l’Europe. » Ce sont -et il faut s’en réjouir !- des personnalités allemandes de premier plan qui ont lancé, le 3 avril dernier, par ces mots, un appel à se ressaisir à l’adresse des dirigeants de leur propre pays comme des alliés les plus « orthodoxes » de Berlin, notamment néerlandais, scandinaves ou autrichiens. (1)

Cette initiative a fait suite à l’un des Conseils européens les plus calamiteux de l’histoire de la construction européenne : celui du 26 mars 2020 portant notamment sur le principe de « dettes mutualisées » et d’aide solidaire en général . Ce jour-là, en réponse à l’appel des pays d’Europe du Sud et particulièrement de l’Italie -très durement frappée, on s’en souvient, par la pandémie-, les Pays-Bas avaient demandé que soient appliquée à ces Etats une forme de mise sous tutelle pour leur imposer des « réformes » permettant d’assainir leurs finances publiques ! Une sorte de « remake » de la purge qui, il y a peu, écrasa la Grèce ! « Attitude répugnante ! »; « Mesquinerie récurrente ! »; « Inconscience absolue ! » rétorquèrent légitimement les responsables italiens, espagnols, portugais ou grecs !

Moins agressifs que leurs partenaires néerlandais dans la forme, mais tout aussi anti-solidaires sur le fond, les dirigeants allemands, bien que premiers bénéficiaires du marché unique et de l’euro, voient rouge dès qu’il est question d’ « emprunt commun » à toute la zone euro, susceptible, à leurs yeux, d’encourager l’irresponsabilité dépensière des « cigales » du Sud et de détériorer la position privilégiée des finances allemandes auprès des « investisseurs » sur le marché financier. Plus généralement, aime à répéter la Chancelière, pas question d’une « Union de transferts » (d’argent des pays riches vers les pays en difficulté) ! Problème : cette intransigeance devient intenable aujourd’hui ! Comme le souligne Habermas : ou le « Nord » aide le « Sud » ( de l’UE et notamment de la zone euro ), ou c’est tout l’édifice qui s’écroule !

Conscients de cette alternative existentielle, les Chefs d’Etats et de gouvernement européen, depuis le psychodrame dévastateur du 26 mars , font tout pour éviter le « clash », quitte à renvoyer la patate chaude à la Commission, chargée de trouver un compromis, ou à retarder les choix les plus difficiles…Jusqu’à Christine Lagarde, la nouvelle présidente de la Banque centrale européenne (BCE), qui appelle à l’unité sinon à l’entraide : « Si tous les pays ne se relèvent pas, les autres en pâtiront (…) Les gouvernements européens doivent être côte à côte pour déployer ensemble des politiques face à un choc commun »…Angela Merkel elle-même plaide à présent pour un « Fonds de relance » (évalué à 1000 milliards d’euros sur trois ans par la Commission) s’ajoutant aux « mesures d’urgence » de 540 milliards , aux plus de 1000 milliards à créer de toute pièce par la BCE pour racheter de la dette aux États membres et aux bien plus de 1000 milliards d’euros du budget de l’UE proprement dit pour les sept prochaines années ! Quelle part de cette montagne de crédits ira-t-elle à de la solidarité vraie ? Nous gagnerions à nous y intéresser de près…
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(1) En particulier, le grand philosophe Jürgen Habermas, le cinéaste Volker Schlöndorf ou le Président de l’Institut allemand pour la recherche économique, Marcel Fratscher

30 avril 2020 at 5:53 Laisser un commentaire

NE LÂCHONS PLUS MACRON SUR LA DETTE AFRICAINE !


« Nous devons aussi savoir aider nos voisins d’Afrique sur le plan économique en annulant massivement leurs dettes » : cette « petite phrase » du Président de la République lors de son allocution télévisée du 13 avril dernier, près de 37 millions de personnes en France -et bien d’autres par ailleurs, notamment en Afrique…- l’ont entendue ! N’acceptons pas qu’on puisse faire d’un enjeu de cette importance un hyper-coup de com’ sans lendemain ! Certes, les 20 pays les plus riches du monde (G20) ont décidé, dans la foulée, de…suspendre pour un an le paiement des intérêts de cette dette. Mais cette mesure -une bouffée d’oxygène indispensable- est notablement insuffisante. Et surtout, bien que le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, ait présenté un peu vite l’acte du G20 comme « un succès important pour la France  et pour ses partenaires », il ne faudrait pas que le Chef de l’Etat s’estime quitte de son engagement ! Retour sur un enjeu vieux de plus de trente ans qui , dans le contexte de la crise actuelle, devient explosif.

Les prévisions très alarmantes concernant l’Afrique se multiplient depuis quelques temps sur tous les plans : sanitaire, économique, alimentaire, écologique…Les économistes s’attendent à la première récession sur ce continent depuis un quart de siècle du fait de l’effondrement de la croissance mondiale, de la chute des cours des matières premières et du tarissement des transferts d’argent des travailleurs émigrés . Dans ce contexte, le paiement du service de la dette des pays pauvres, qui ne cesse de s’alourdir, apparaissait à tous les observateurs avertis tout simplement impossible. Songeons qu’avant l’épidémie, 49 pays du Sud à faibles revenus -particulièrement en Afrique-  consacraient déjà plus d’argent au paiement de la dette qu’à la santé ! Dans certains pays, comme le Ghana, la charge de la dette était, selon OXFAM,…11 fois supérieure aux dépenses de santé ! Ignominieux hier, absolument intenable aujourd’hui ! Aussi, de nombreuses voix se sont-elles levées à travers le monde pour appeler à des actions significatives sur la dette du continent : depuis  l’Union africaine et le Secrétaire général des Nations-Unis, Antonio Gutterrez, le mois dernier, en passant par le Pape François dans son message de Pâques, jusqu’au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale, plus récemment. Ainsi, donc, que le Président français. Le grand mérite de l’annonce de ce dernier est finalement d’avoir catapulté une exigence de premier plan dans le débat public : ne le lâchons plus sur le sujet ! Annuler la dette -mieux : éradiquer le mécanisme diabolique de la dette à perpétuité pour les plus démunis- voilà l’objectif à atteindre ! C’est l’intérêt de millions d’Africains, mais c’est aussi le nôtre : la crise actuelle rappelle à qui l’ignorait encore qu’il n’y a qu’un monde et qu’une humanité.

23 avril 2020 at 9:00 Laisser un commentaire

RETOUR SUR LA DANGEREUSE OFFENSIVE TRUMP CONTRE L’OMS

L’offensive lancée par le Président des Etats-Unis contre l’Organisation mondiale de la santé (OMS), en pleine pandémie du covid-19, constitue un acte trop grave pour être traité en simple fait divers. Pour mesurer la portée potentielle de la menace proférée par Donald Trump -suspendre la contribution américaine à cette agence de l’ONU- , rappelons ce que représente concrètement celle-ci.

Créée en 1948, l’OMS a une mission aussi simple à énoncer que complexe à réaliser : aider les pays -particulièrement les plus en difficulté- à assurer à leurs habitants le meilleur niveau de santé possible ! Dans le monde tel qu’il est, cela signifie d’abord assurer à plusieurs milliards de personnes un accès amélioré aux médicaments et aux vaccins contre les grandes maladies infectieuses , un suivi de leur approvisionnement en eau et de l’assainissement ou encore le droit aux progrès humains que permettent les nouvelles connaissances médicales…Pour toute l’humanité, l’OMS est l’instrument indispensable pour classifier les maladies et valider les médicaments; centraliser et partager les données sanitaires de 194 pays; éradiquer des maladies dévastatrices comme la variole, le paludisme ou la poliomyélite; favoriser la recherche sur le cancer; organiser la lutte contre le sida, ou encore pour mener des campagnes de sensibilisation sur les bienfaits de la consommation des fruits et légumes ou les risques liés à l’usage du tabac…C’est encore l’OMS qui a pour tâche -à partir des informations émanant des Etats membres- de détecter une menace de pandémie puis d’établir les niveaux d’alerte au fil de l’évolution de celle-ci. Enfin, l’agence onusienne se préoccupe de l’environnement en milieu urbain, en particulier en fixant des normes pour la qualité de l’air. Et tout cela, dans le contexte d’une pénurie chronique de moyens budgétaires, de pressions féroces des lobbys de l’industrie pharmaceutique et de la volonté de Washington de la marginaliser.

Naturellement, comme toutes les agences internationales, l’OMS est l’objet de critiques et se doit d’y répondre. Mais les raisons de l’attaque de Donald Trump sont, en l’occurrence, trop transparentes pour laisser la place au doute : le Président-candidat doit se justifier de sa gestion calamiteuse de la crise sanitaire auprès de son électorat ; il en profite pour alimenter sa bataille de « leadership » contre Pékin (qu’il accuse l’OMS de favoriser); enfin et surtout, il exacerbe jusqu’à la caricature l’opposition traditionnelle de la puissance américaine à toute instance multilatérale susceptible de contrarier ce qu’elle estime être ses intérêts. En 1986, Ronald Reagan, avait déjà coupé les vivres à l’OMS -et fait chuter son Directeur général- pour les punir d’avoir tenté de court-circuiter l’industrie pharmaceutique américaine pour aider les pays pauvres à soigner leurs malades à moindre frais. Trump poursuit, accentue et généralise (à l’UNESCO, aux accords sur le climat ou le nucléaire iranien, à l’Office de protection des réfugiés palestiniens…) cette dérive dominatrice .« America first ! », espère-t-il,  ça paye !

Mais c’est au monde entier que ce nationalisme agressif risque de coûter cher ! Aussi aimerait-on entendre de la part, tant de l’Union européenne, en général, que de la France en particulier, une réprobation énergique et l’engagement d’assurer à l’OMS les moyens de remplir ses missions en toute indépendance.

16 avril 2020 at 4:42 Laisser un commentaire

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