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LE PROJET HAMON SUR L’EURO : SES MÉRITES ET SES LIMITES.
Benoît Hamon « propose aux Etats membres de la zone euro un traité » prévoyant la mise en place d’une « Assemblée de la zone euro qui serait l’émanation des Parlements nationaux ». En entendant cela, on est perplexe. C’est tout ? Rien, en particulier, sur les ruptures nécessaires avec la logique de traités actuels ? Et qu’en est-il du combat à mener pour changer les rapports de force en France et en Europe ? Mais plutôt que de nous lancer d’emblée dans la polémique, n’est-il pas plus conforme aux exigences de la période de rechercher toute convergence possible, même partielle, à gauche, et d’évaluer dans cet esprit les mérites et les limites du projet du vainqueur de la primaire socialiste ?
Les mérites de ce projet ? Ils résident, je pense, dans les principaux objectifs qui lui sont assignés. Hamon dit, d’une part, vouloir en finir avec l’austérité, cette « marque de fabrique de (l’actuelle) Union européenne » et, d’autre part, voir dans la démocratisation des institutions européennes « la clé » des changements nécessaires. C’est juste. Oui : l’obsession de « la confiance des marchés » et « la confiscation des décisions fondamentales par (…) l’Eurogroupe, la Banque centrale européenne et la Commission » sont au cœur de la crise de l’UE ! Oui : la solution n’est pas plus dans « la désagrégation de l’Europe » que dans le statu quo. Et encore oui : l’une des leçons du drame de la Grèce, c’est qu’il faut rassembler tous les progressistes européens. Du moins ceux qui, à la différence de Macron, méritent ce qualificatif. Voilà un bon point de départ pour un débat de fond à gauche.
Les limites du projet Hamon, ensuite : si les convergences sont fortes sur les objectifs à atteindre, les moyens à mettre en œuvre pour y parvenir méritent, à l’évidence, discussion. Benoît Hamon mise, à cet égard, sur une mesure purement institutionnelle : il reviendra, selon lui, à cette fameuse « Assemblée de la zone euro », très majoritairement composée de députés délégués par leur parlement national, de décider du budget de la zone; d’organiser l’harmonisation fiscale et sociale; de fixer le seuil de déficits publics etc… C’est grâce au transfert à ces élus de pouvoirs actuellement détenus par des instances émanant directement ou indirectement des Etats qu’Hamon espère « mettre l’austérité en minorité ». Cette idée soulève de nombreuses questions . D’abord -comme en témoigne la réaction (négative) immédiate de François Hollande- l’idée que les Chefs d’Etat et de gouvernements concernés accepteraient (à l’unanimité !) la « proposition » de ce basculement des pouvoirs est pour le moins…audacieuse. Ensuite, il faut rappeler que ces parlements nationaux dont émaneraient les futurs législateurs de la zone euro ont tous avalisé les traités qui fondent les actuelles politiques de l’UE. Enfin, il est plus qu’hypothétique que la majorité des citoyens soit acquise à ce type de saut fédéral.
Certes, le fait que ce soit des élus (qui plus est des députés nationaux) qui décident des grands axes de la politique européenne plutôt que des instances inaccessibles aux citoyens constituerait , en soi, un progrès démocratique. Pour autant, l’implication consciente des citoyens de chaque pays dans les grands choix européens -autrement dit d’intenses luttes sociales et politiques- ainsi que le respect du droit imprescriptible de chaque peuple à décider de son avenir sont, à mes yeux, des conditions incontournables d’une transformation réussie et acceptée de la construction européenne. Tout cela mérite, plutôt que des invectives, une confrontation d’idées -constructive mais franche- entre les différentes familles de pensée, à gauche, appelées à se rassembler impérativement dans les prochaines semaines. Et, plus généralement, un grand débat citoyen dans le pays.
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NB : les citations de Benoît Hamon sont extraites d’un entretien au « Monde » du 10/3/2017
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