Archive for avril, 2011

Sortir de l’Euro ? Ma réponse à un lecteur

La publication du programme économique de la candidate du FN a relancé le débat sur la « sortie de l’Euro », voire « de l’Europe ». Un lecteur m’interpelle : « Changer l’Europe, c’est flou et lointain ; sortir de l’Euro, c’est clair et immédiat. Allons-nous laisser Marine Le Pen grimper dans les sondages ? Un pays comme la France n’est pas voué à dépendre du bon vouloir de Bruxelles. » Je suis d’accord sur un point : « changer l’Europe » ne doit en aucun cas rester un slogan « flou et lointain », mais devenir un objectif de luttes très concrètes, dès aujourd’hui ! Car s’ils laissaient s’accentuer la dérive populiste qui menace, les artisans du « non de gauche » à l’ex-traité constitutionnel européen se laisseraient voler un acquis essentiel de leur succès éclatant de 2005 : l’expression conjointe d’une opposition radicale à l’« Europe libérale » et d’un engagement résolu pour une « Europe sociale » –clouant au sol et les inconditionnels de l’UE et les anti-européens d’extrême droite. A l’opposé de tout repli nationaliste, illusoire et dangereux, les progressistes se doivent d’opter pour un combat solidaire, en convergence avec les millions d’Européennes et d’Européens confrontés aux mêmes problèmes et intéressés aux mêmes transformations. 

Mais je veux répondre aux deux remarques de mon interlocuteur. D’abord, il n’y a pas de lien mécanique entre la montée de l’extrême-droite et sa position sur l’Euro. Ainsi, la poussée récente des partis nationalistes en Europe touche des pays comme la France, les Pays-Bas, la Belgique, l’Italie, l’Autriche ou la Finlande – membres de la zone Euro. Mais ce phénomène se manifeste tout autant en Grande-Bretagne, au Danemark, en Suède, en Lettonie, en Hongrie, en Bulgarie – extérieurs à la zone Euro, ou en Norvège et en Suisse non membres de l’UE du tout. Quitter l’Euro ou l’UE ne « règlerait » donc pas les problèmes – réels et profonds !– qui poussent une grande partie de cet électorat dans la désespérance et le désarroi politique. Quels changements promouvoir dans et hors l’UE : voilà la question. 

Dans le cas de la France, est tout aussi inexacte l’idée selon laquelle « Bruxelles » nous dicterait la conduite à tenir, et que, dès lors, se libérer de cette tutelle nous ouvrirait en soi une perspective de changement dans notre pays. On ne le sait pas assez : la « classe dirigeante » française occupe des postes-clé dans l’actuelle construction européenne. C’est, symptomatiquement, à un ancien Président français, Valéry Giscard d’Estaing, que les dirigeants européens ont fait appel pour rédiger le projet de Constitution qui a conduit au traité de Lisbonne. L’actuel président du plus puissant groupe du Parlement européen, le PPE (droite) est un Français (Joseph Daul). Le Commissaire européen chargé du porte-feuille-vedette, le marché intérieur et les services, notamment financiers (Michel Barnier), est Français. Le Secrétaire général du Conseil, qui pilote les travaux des représentants des 27 gouvernements (Pierre de Boissieu) également, tout comme le Secrétaire général du Service d’Action Extérieur Européen, le « Quai d’Orsay » européen (Pierre Vimont). Sans oublier l’ineffable Jean-Claude Trichet, le très puissant Président de la Banque centrale européenne ! Et bien sûr Nicolas Sarkozy lui-même auprès de ses alliés privilégiés : Angela Merkel pour l’hyperaustérité et David Cameron pour la guerre humanitaire… Quelle meilleure illustration du lien indissociable des dimensions nationale et européenne (et internationale) de la lutte pour un vrai changement ? La question n’est donc pas de « sortir de l’Europe », mais bien de changer de structures et d’orientations tant à Bruxelles (et Frankfort) qu’à Paris.

29 avril 2011 at 1:08 1 commentaire

LE PGE, COMME SI VOUS Y ETIEZ !

Le week-end dernier s’est tenue à Budapest une importante réunion du « Bureau exécutif » du Parti de la Gauche Européenne (PGE). Depuis son congrès de décembre 2010,qui avait porté à sa présidence le secrétaire national du Parti communiste français, Pierre Laurent, c’était la deuxième fois que se rencontraient ainsi les représentantes et représentants de la trentaine de partis progressistes, communistes ou « rouge-vert » qui composent, comme membres ou observateurs, cette organisation confédérale. Comment se déroule cette coopération originale? De quoi est-il question durant ces journées de travail? Quelles suites sont-elles décidées ?Visite au cœur du PGE…

D’abord, tout le monde se retrouve le premier jour à 14 heures dans une 
salle, équipée pour l’occasion de cabines d’interprétation. L’ambiance 
est cordiale. On est heureux de se retrouver et de travailler 
ensemble. Cette fois, c’est au tour de nos amis hongrois -dont le pays 
préside l’Union européenne durant le premier semestre 2011- de jouer 
le rôle d’ « amphytrion ».Ils animent une formation politique modeste 
mais courageuse, dans un contexte marqué par un profond désarroi de la 
population (déçue par le bilan calamiteux de l’ex-gouvernement PS) et 
la victoire d’une droite extrémiste, qui vient de changer la 
Constitution du pays pour la placer dorénavant sous le signe de Dieu 
et de la « Sainte Couronne » et y supprimer toute référence…à la 
République! D’emblée est convenu un double acte de solidarité du PGE 
à l’égard de son partenaire hongrois -une conférence de presse 
commune ainsi que la participation à une cérémonie en hommage aux 
victimes du régime fasciste qui a dirigé le pays jusqu’en 1944- tant 
l’actualité confirme que « le ventre est encore fécond d’où est 
sortie la bête immonde »…

Puis Pierre Laurent ouvre les travaux par un rapport circonstancié sur 
la situation en Europe et dans le monde: le « Pacte pour l’Euro »; le 
défi énergétique que nous lance la catastrophe de Fukushima; les 
bouleversements en cours dans le monde arabe; les impasses des 
interventions militaires en Libye et en Côte d’Ivoire. Et les tâches 
du PGE dans ce contexte. En particulier celle de contribuer à une 
véritable « contre-offensive » pour faire échec au « pacte » Merkel-
Sarkozy et de faire grandir une triple exigence: une réorientation 
complète des politiques européennes – à savoir, priorité au 
développement social-; des mesures mettant en cause la toute-puissance 
des marchés financiers; enfin la démocratie, l’implication des 
peuples, des citoyens ,des acteurs sociaux dans 
l’élaboration, l’évaluation et le contrôle des politiques 
européennes. La discussion s’engage à partir des expériences de 
chacun -à commencer par celle du peuple grec dont le Président du 
parti Synaspismos, Alexis Tsipras, vice-président du PGE traite avec 
gravité. Une déclaration substantielle est unanimement adoptée le 
lendemain pour faire connaitre les analyses et propositions communes 
du PGE sur ces enjeux.

Cette jeune organisation (créée en 2004) commence enfin à se rendre 
visible: depuis le début de l’année, es réunions publiques se 
succèdent: Porto, Athènes, Milan, Paris (le 3 mai prochain),puis 
Sophia, Madrid, Prague, Berlin…Le PGE a été présent au Forum social 
mondial de Dakar. Des rendez-vous sont pris avec les syndicats 
européens. Une nouvelle « Université d’été » se tiendra en Italie en 
juillet. Une dynamique s’engage. Deux jours durant, les accents 
d’Alexis, Elsa, Yannis, Marisa, Claudia, Jean- François , Waltraut, Christine , Attila, Maïté,
Margarita,Rénato,Helmut,Natassa,Céline,Diether,Grigore,Jiri,Tony…se 
sont mêlés en faisant vivre une idée de l’Europe comme on l’aime. 
Bonne continuation au PGE!

22 avril 2011 at 7:30 Laisser un commentaire

QU’EST-CE QU’UN PROGRAMME DE CAUCHE « CREDIBLE »?

Divers commentateurs ont accueilli les « 30 engagements pour le changement » publiés par le Parti socialiste en soulignant qu’ils traduisaient la volonté de ce parti de « soigner sa crédibilité ».  Toute la question est de savoir ce qu’on entend par là.  Le texte du PS fournit une réponse: « les Français le savent, des efforts seront demandés pour rétablir la situation. »  Et de préciser, par exemple, que les dépenses publiques (budget national, sécurité sociale, collectivités territoriales) connaitraient une progression nettement… »inférieure à la croissance, CONFORMEMENT AUX SOUHAITS DU NOUVEAU PACTE EUROPEEN.« 

          La « crédibilité » d’un programme de gauche peut-elle être mesurée à son degré de soumission aux exigences européennes actuelles?  Cela mérite une discussion sérieuse et publique.  Pour ma part, cela me parait non seulement impensable d’un point de vue social, mais extrêmement dangereux sur le plan politique: accepter l’inacceptable, simplement parce que c’est « conforme aux souhaits » du pacte Merkel – Sarkozy reviendrait à ouvrir une voie royale au populisme antieuropéen de l’extrême droite.  Autant il ne s’agit pas de raisonner comme si la France était une île déserte, autant, en l’occurrence, la gauche française a les moyens – donc le devoir – de s’appuyer sur le véritable phénomène de rejet que suscite l’avalanche de mesures européennes visant à faire payer aux populations le coût exorbitant de la crise du système et de la dette publique qui en résulte.  Il est donc impératif que la gauche – toute la gauche! – s’élève, vent debout, contre le « pacte de compétitivité » rebaptisé « pacte pour l’euro ».  Ce n’est pas moi qui l’affirme, c’est tout le mouvement syndical européen.

          Rappelons, en effet, que ce fameux « pacte » vise à installer durablement un régime de régression sociale, d’allégeance aux marchés financiers et de centralisation des politiques économiques, budgétaires, et, pour une part, sociales, en violation des acquis les plus fondamentaux de la souveraineté populaire et de la démocratie parlementaire elle-même. C’est, en quelque sorte, une tentative de généraliser à tous les pays de l’Union européenne la logique d’ « ajustements structurels » chère au Fonds Monétaire International aujourd’hui imposée à la Grèce, à l’Irlande et au Portugal. Construire un front commun européen contre cette immersion dans l’hyper austérité et la mise sous tutelle des assemblées élues, c’est le défi à relever par la gauche européenne.

          Voilà pourquoi un programme de gauche « crédible » doit, à mes yeux, accorder aujourd’hui une place de choix aux efforts pour réorienter en profondeur les orientations européennes.  Trois « engagements pour le changement » en Europe devraient notamment faire l’objet d’une large convergence à gauche.  D’abord, donner la priorité au développement social, ce qui passe par la mise en cause radicale du « pacte pour l’euro ».  Ensuite, s’attaquer à la toute-puissance des marchés financiers, ce qui nécessite une transformation des missions de la Banque centrale européenne (qui a les moyens de financer les investissements publics axés sur le développement social en évitant de subir les exigences folles de rentabilité des « investisseurs »).  Enfin, impliquer les peuples, les citoyens, les acteurs sociaux dans l’élaboration, l’évaluation et le contrôle des politiques européennes.

14 avril 2011 at 11:44 1 commentaire

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