QU’EST-CE QU’UN PROGRAMME DE CAUCHE « CREDIBLE »?
14 avril 2011 at 11:44 1 commentaire
Divers commentateurs ont accueilli les « 30 engagements pour le changement » publiés par le Parti socialiste en soulignant qu’ils traduisaient la volonté de ce parti de « soigner sa crédibilité ». Toute la question est de savoir ce qu’on entend par là. Le texte du PS fournit une réponse: « les Français le savent, des efforts seront demandés pour rétablir la situation. » Et de préciser, par exemple, que les dépenses publiques (budget national, sécurité sociale, collectivités territoriales) connaitraient une progression nettement… »inférieure à la croissance, CONFORMEMENT AUX SOUHAITS DU NOUVEAU PACTE EUROPEEN.«
La « crédibilité » d’un programme de gauche peut-elle être mesurée à son degré de soumission aux exigences européennes actuelles? Cela mérite une discussion sérieuse et publique. Pour ma part, cela me parait non seulement impensable d’un point de vue social, mais extrêmement dangereux sur le plan politique: accepter l’inacceptable, simplement parce que c’est « conforme aux souhaits » du pacte Merkel – Sarkozy reviendrait à ouvrir une voie royale au populisme antieuropéen de l’extrême droite. Autant il ne s’agit pas de raisonner comme si la France était une île déserte, autant, en l’occurrence, la gauche française a les moyens – donc le devoir – de s’appuyer sur le véritable phénomène de rejet que suscite l’avalanche de mesures européennes visant à faire payer aux populations le coût exorbitant de la crise du système et de la dette publique qui en résulte. Il est donc impératif que la gauche – toute la gauche! – s’élève, vent debout, contre le « pacte de compétitivité » rebaptisé « pacte pour l’euro ». Ce n’est pas moi qui l’affirme, c’est tout le mouvement syndical européen.
Rappelons, en effet, que ce fameux « pacte » vise à installer durablement un régime de régression sociale, d’allégeance aux marchés financiers et de centralisation des politiques économiques, budgétaires, et, pour une part, sociales, en violation des acquis les plus fondamentaux de la souveraineté populaire et de la démocratie parlementaire elle-même. C’est, en quelque sorte, une tentative de généraliser à tous les pays de l’Union européenne la logique d’ « ajustements structurels » chère au Fonds Monétaire International aujourd’hui imposée à la Grèce, à l’Irlande et au Portugal. Construire un front commun européen contre cette immersion dans l’hyper austérité et la mise sous tutelle des assemblées élues, c’est le défi à relever par la gauche européenne.
Voilà pourquoi un programme de gauche « crédible » doit, à mes yeux, accorder aujourd’hui une place de choix aux efforts pour réorienter en profondeur les orientations européennes. Trois « engagements pour le changement » en Europe devraient notamment faire l’objet d’une large convergence à gauche. D’abord, donner la priorité au développement social, ce qui passe par la mise en cause radicale du « pacte pour l’euro ». Ensuite, s’attaquer à la toute-puissance des marchés financiers, ce qui nécessite une transformation des missions de la Banque centrale européenne (qui a les moyens de financer les investissements publics axés sur le développement social en évitant de subir les exigences folles de rentabilité des « investisseurs »). Enfin, impliquer les peuples, les citoyens, les acteurs sociaux dans l’élaboration, l’évaluation et le contrôle des politiques européennes.
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1.
gillez | 23 avril 2011 à 2:47
c’est le B A BA d’une politique sociale : pour les gens, pas le profit