FACE À TRUMP : 5 ENJEUX MAJEURS À SUIVRE !
22 novembre 2024 at 10:13 Laisser un commentaire
Donald Trump n’a pas, à proprement parler, de politique internationale établie. Selon Bertrand Badie, spécialiste reconnu des relations internationales, le nouveau Président élu est le produit d’une crise profonde qui secoue les Etats-Unis depuis le début des années 2000, lorsque l’Amérique des « classes moyennes » a découvert que la mondialisation, pourtant initiée par l’ex-« hyper-puissance », ne lui profitait pas. Trump a réussi à capter les effets de cette désillusion, en exprimant de façon exacerbée une « crispation identitaire » et une « rancoeur à l’égard de l’intrusion de nouveaux acteurs dans le système international » (1). C’est ce nationalisme et cette soif de revanche dominatrice que traduit son slogan : « Make America great again ! » Plusieurs enjeux majeurs sont, à cet égard, à suivre avec attention. Arrêtons-nous sur cinq d’entre eux.
Le Proche-Orient tout d’abord. Les guerres de Netanyahu, aussi sauvages et meurtrières soient-elles, n’arriveront pas à enterrer la cause palestinienne. L’impasse est totale, mais il manque un levier pour en sortir. Seule la pression internationale pourra changer la donne et faire hésiter Trump à nourrir l’escalade.
Le cas de l’Iran, ensuite. Téhéran a réagi avec modération à l’élection du Président américain, qui, en retour, a assuré qu’il « ne cherchait pas à nuire à l’Iran ». Q’en penser ? Israël cultive le rêve fou de bombarder les installations nucléaires de ce pays, mais a besoin, pour ce faire, de l’aide américaine. La principale question est de savoir si un nouvel accord sur le nucléaire iranien, mutuellement acceptable, pourra être envisagé.
Autre enjeu crucial : la Chine. Le ministre des Affaires étrangères de Trump, Marc Rubio, est un « faucon » qui a comparé les dirigeants chinois aux nazis et promis d’armer Taïwan. Trump saura-t-il mesurer les conséquences de ses actes ? Se contentera-t-il de mener une guerre économique à Pékin et avec quels effets en retour ? L’Europe lui emboîtera-t-elle le pas ou négociera-t-elle avec la Chine ?
Une autre question-clé est naturellement celle du « règlement en 24 heures » de la guerre russo-ukrainienne. Trump tentera-t-il d’imposer unilatéralement à l’Ukraine le renoncement au Dombass ? Dans ce cas, la soif de revanche ukrainienne risque de rendre la paix précaire. Promettra-t-il, en guise de compensation, d’ouvrir la porte de l’OTAN à Kiev ? C’est alors de Moscou que viendrait le boomerang. L’idée d’un règlement global de la sécurité européenne, avec le parrainage conjoint des pays occidentaux et du Sud global, sous l’égide de l’ONU, arrivera-t-elle à émerger ?
Précisément, l’attitude de Trump vis-à-vis de l’ONU et du multilatéralisme en général constitue un enjeu décisif. Concernant le climat, tout d’abord: tristement significatif est le profil du nouveau Secrétaire à l’énergie de Trump, Chris Wright, qui assurait il y a un an : « Il n’y a pas de crise climatique ». Le monde laissera-t-il sans réagir Washington décider à nouveau de s’exonérer de toute responsabilité en matière de lutte contre le réchauffement ? S’agissant des Nations unies, plus globalement, si Trump ose réitérer sa rhétorique de 2020 à la tribune de l’ONU : « La prospérité américaine est le fondement de la liberté et de la sécurité partout dans le monde », il faut espérer qu’un courant suffisamment fort, de citoyens sinon d’Etats, s’exprimera pour disqualifier cet unilatéralisme anachronique et promouvoir ce qu’Edgar Morin appelle si justement « la communauté de destins de toute l’humanité ».
——-
(1) « Entretien géopolitique » avec Pascal Boniface (4/9/2024).
Entry filed under: Francis Wurtz.




Trackback this post | Subscribe to the comments via RSS Feed