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GAZA : LE CRI D’ALARME DE « MEDECINS DU MONDE » !

« On attend autre chose des Etats que des discours humanitaires ! » a lancé le vice-Président de « Médecins du monde » , Jean-François Corty, à l’adresse de gouvernements européens qui, « à l’exception de celui de l’Espagne ou de la Belgique, notamment, s’alignent sur le récit radical d’Israël », selon lequel « Tout le monde, à Gaza, est responsable, et donc, d’une certaine manière, tout le monde peut mourir » (1). Comment ne pas se rappeler à cet égard les déclarations du Ministère français des Affaires étrangères se disant « gravement préoccupé » par l’annonce par Israël de l’intensification des frappes sur Gaza tout en assimilant fondamentalement cette guerre faite aux civils à l’exercice par Israël de son « droit de se défendre », ou encore celle de la Présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, assurant, la main sur le cœur, que « nous pleurons toutes les familles de victimes »,  sans demander le cessez-le-feu ! 

Avec raison, le responsable de « Médecins du monde » fut très clair sur « le drame absolu du 7 octobre », appelant au « respect des 1200 morts » et à la « dénonciation sans pitié » de ce massacre et des prises d’otages. Tout aussi légitimement a-t-il condamné « l’attaque russe ignoble en Ukraine et les morts civils ». Ce qu’il mit en cause, c’est « le deux poids-deux mesures » qui désoriente l’opinion publique, soulignant qu’il y a « 50 fois plus de civils innocents morts par jour à Gaza qu’en Ukraine »; des « bombardements indiscriminés »;  « des quartiers entiers rasés » ; « 80% de la population déplacés »; « une aide alimentaire qui ne peut pratiquement pas rentrer »; « des poches de famine »; « un défaut d’accès à l’eau potable »; « une médecine de guerre obligée de faire le tri des blessés »; « des centaines d’employés des Nations unies et d’acteurs humanitaires tués »… Il cita le cas du médecin chargé de coordonner les opérations de sa propre organisation, sans lien avec le Hamas, tué dans le bombardement de sa maison, puis le drame des proches de ce même médecin, tués à leur tour par un second bombardement alors qu’ils tentaient de déblayer les décombres du premier ! « Jusqu’où (laissera-t-on) aller cette cruauté monstrueuse ? » lança-t-il à l’adresse des dirigeants européens, dont il dit attendre qu’ils respectent les préconisations de la Cour internationale de Justice en empêchant le risque d’un génocide : « des hôpitaux sont ciblés; des écoles construites grâce à des fonds occidentaux sont détruites et vous ne dites rien ! »

 Encore sous le choc de cet irrécusable réquisitoire fondé sur l’expérience de terrain, j’entendis Netanyahu annoncer son « Plan combiné d’évacuation et de destruction » du secteur de Rafah, dernier pseudo-refuge pour plus de 1,3 millions de Gazaouis, en grande majorité civils, fuyant une guerre dévastatrice. « Gaza doit-il disparaître ? » titrait le grand quotidien genevois « Le Temps » !  Cette nouvelle offensive laisse présager une telle explosion des morts et des blessés graves que même la Maison Blanche s’est cru obligée de dire sa crainte d’ « un désastre » et que l’allié indéfectible No 1 de l’organisateur de ce désastre, Joe Biden  -qui a « livré 10 000 tonnes d’armements et d’équipements militaires à Israël depuis le début de la guerre » (2)-  s’est fendu d’un communiqué qualifiant  de « riposte excessive » les nouveaux crimes de guerre programmés par son protégé, …sans l’accompagner de la moindre mesure coercitive. Eh, Paris ! Eh, l’Europe ! Réveillez-vous, ou l’Histoire ne vous pardonnera pas votre hypocrisie ni votre complicité ! 

———

(1) Sud-Radio, 7/2/2024

(2) Times of Israël (26/12/2023) . S’y ajoutent les 147,5 millions de dollars d’armements envoyés « en urgence » le 30/12/2023. (Pas de chiffres pour 2024) 

16 février 2024 at 7:30 Laisser un commentaire

Union Européenne : « Cette adhésion pourrait être un cadeau empoisonné pour les Ukrainiens »

L’ HUMANITÉ (18/12/2023)

Après la décision du Conseil européen, le processus d’adhésion de l’Ukraine à l’UE est lancé. Pour Francis Wurtz, député honoraire du Parlement européen, d’autres formes de coopération et d’association auraient été plus justes. Après avoir obtenu son statut formel de candidat, en juin 2022, l’Ukraine a débuté officiellement son processus d’adhésion à l’Union européenne. Les Vingt-Sept pays membres réunis au Conseil européen ont acté cette décision, jeudi 14 décembre. Député honoraire du Parlement européen, Francis Wurtz décrypte ce choix et ses conséquences.

En acceptant que l’Ukraine soit candidate à l’Union européenne, il acte une décision essentiellement « géopolitique ». Cet accord est une réponse à l’agression russe. Si le pays n’avait pas été envahi, la perspective d’une adhésion rapprochée aurait été impensable. 

Ce processus déroge complètement aux conditions prévues pour être candidat et fixées par les critères de Copenhague, en 1993. Trois prérequis doivent être respectés. Le premier est le critère politique : avoir des institutions stables garantissant la démocratie, l’État de droit, et le respect des minorités. Une condition délicate à remplir pour l’Ukraine quand on regarde ses difficultés depuis l’indépendance. 

Le deuxième critère est économique et se définit comme suit : « Il faut une économie de marché viable et la capacité à faire face aux forces du marché et à la pression concurrentielle à l’intérieure de l’Union européenne. » Est-ce que, aujourd’hui, nous pouvons affirmer que l’Ukraine est en capacité de faire face aux « forces du marché » ? Il s’agit du seul pays de l’espace post-soviétique en Europe à s’être appauvri depuis la chute de l’URSS.

En 2021, juste avant une invasion qui n’a pas arrangé les choses, Kiev se trouvait, par rapport aux autres membres de l’UE, avec un PIB par habitant trois fois moins élevé que la Bulgarie, qui se révèle l’État le plus pauvre de l’UE. Si on réfléchit rationnellement, cette adhésion dans de telles conditions apparaît comme un cadeau empoisonné au peuple ukrainien. 

Troisième condition à remplir : être apte à assumer toutes les obligations liées à ce qu’on appelle l’acquis communautaire. C’est-à-dire respecter les dizaines de milliers de pages de droit communautaire. Il faudra ensuite négocier des dérogations, des périodes transitoires. L’agression de la Russie a bouleversé ces critères d’évaluation.

Un dernier critère demeure totalement absent du débat : la clause de défense mutuelle. Lors du traité de Lisbonne en 2007, cet article 42 stipule que tout État membre victime d’une agression armée sur son territoire a le droit à l’aide et à l’assistance par tous les moyens des autres États membres. Dans un pays qui demeure en guerre et dont l’issue semble de plus en plus complexe, la tension sera permanente pour l’Ukraine et le continent européen.

Autre conséquence pour l’UE, l’Ukraine est une superpuissance agricole qui absorberait l’essentiel des aides du secteur. Elle bénéficierait aussi de la majorité des fonds de cohésion étant donné son taux de pauvreté. Cela va créer d’importantes controverses et des oppositions de la part des pays bénéficiaires de ces aides. 

La Pologne, un allié de l’Ukraine, a décidé en pleine guerre de fermer ses frontières face à la concurrence agricole. L’UE sera également confrontée à des problèmes institutionnels. Comment préserver les prises de décisions qui posent déjà souci à 27 ? Quand notre secrétaire d’État Clément Beaune dit que cette adhésion est nécessaire pour garantir la sécurité et la stabilité du continent, on peut en douter.

Auparavant, il y avait ce qu’on appelait une préadhésion. Elle permettait, sur plusieurs années, de familiariser le pays avec les obligations liées à l’entrée dans l’UE, une aide financière à la clef. Lors du grand élargissement de 2004-2007, une deuxième étape existait avec des accords d’assistance. Puis la véritable négociation débutait autour des 35 chapitres qui résumaient l’acquis communautaire et qui débouchaient sur de longues tractations. 

On ne peut pas faire l’impasse sur tout ce travail. Elle générait aussi des frustrations parmi les candidats. En Europe centrale et orientale, il n’y a pas un enthousiasme à être dans l’UE. Ils en font partie pour ne pas être isolés, mais les conditions de leur présence ont créé des dissensus. La mise en concurrence impitoyable qui caractérise l’Europe libérale a engendré de vraies crises dans ces pays membres.

Le président du Conseil européen, Charles Michel, affirme que l’UE et l’Ukraine doivent être prêtes pour 2030. Pour la Croatie, dernier État à entrer dans l’UE, en 2013, les négociations beaucoup moins complexes ont duré dix ans. Je crains que, si on se précipite, les conséquences d’une adhésion avec un pays comme l’Ukraine ne soient être décuplées.

D’autres formes de coopération sont envisageables pour aider légitimement le peuple ukrainien. Un accord très poussé d’association, adapté à la situation de l’Ukraine, apparaît la meilleure solution. Il faut trouver en négociant avec Kiev des formes de complémentarité qui permettent à l’Ukraine de se reconstruire, en espérant que la guerre s’arrête au plus vite. Il faut l’aider à lutter contre la corruption, la mauvaise gouvernance et faire fructifier ses atouts réels. 

Cet accord devrait être modifiables avec le temps et les besoins de l’Ukraine. Cette forme de coopération m’apparaît moins risquée pour les deux parties. On ne peut ni laisser tomber les Ukrainiens, ni les jeter dans une Union européenne hyper concurrentielle, fondée non pas sur de bons sentiments mais sur des règles néolibérales extrêmement strictes.

La pire des choses serait de cacher des problèmes dont on connaît la réalité et la dangerosité. Il faut que les négociations à l’adhésion se passent dans la transparence absolue pour comprendre les risques encourus de part et d’autre. Ensuite, en connaissance de cause, que chacun prenne ses responsabilités. 

Le chercheur du Cevipof Olivier Costa pense que les dirigeants européens mèneront les réformes minimale et à bas bruit pour ménager les sensibilités. Ce serait d’autant plus irresponsable que le président du Conseil européen, Charles Michel, entend faire adhérer l’Ukraine en 2030.

18 décembre 2023 at 12:36 Laisser un commentaire

UKRAINE : NON À LA STRATÉGIE DE L’HUILE SUR LE FEU !

Le gouvernement polonais n’a rien trouvé de plus utile à la cause ukrainienne que de remplacer, sur les cartes de son pays, le nom russe de la ville voisine de Kaliningrad par la version polonaise de son ancien nom allemand. Un non-événement, diront certains : pourquoi s’y arrêter ? Un petit détour historique aide à comprendre pourquoi cette décision est « certes symbolique, mais à forte connotation émotionnelle » (Les Echos). 

Le 2 août 1945, à la Conférence de Potsdam, les Etats-Unis, l’Union soviétique et la Grande-Bretagne sont réunis pour déterminer l’avenir de  l’Allemagne après la défaite du nazisme. Dans ce cadre, ils décident de partager la Prusse orientale entre la Pologne, qui en obtient les deux tiers, et la Russie, à laquelle -en dédommagement des destructions et des pertes subies durant la seconde guerre mondiale-  est rattachée le tiers restant, jusqu’alors appelé Königsberg. Moscou donnera à cette région et à sa capitale le nom de Kaliningrad. Ces nouvelles réalités furent universellement reconnues.

Depuis la chute de l’URSS, le sort de cette ville et de sa région est un enjeu d’autant plus sensible que celles-ci constituent désormais une enclave russe isolée entre deux pays hostiles: la Pologne et la Lituanie ex-soviétique. Le principal acteur de la marche de ce pays balte vers l’indépendance, le très conservateur V. Landsbergis, n’avait-il pas annoncé dès 1990 qu’en cas de dislocation de l’Union soviétique, la région de Kaliningrad aurait le choix de rejoindre l’un de ses deux voisins  -aujourd’hui membres particulièrement zélés de l’OTAN ? Il y a un an, la Lituanie n’a-t-elle pas restreint le transit de marchandises de Russie vers son territoire « exclavé »?

C’est en pleine connaissance de cause de ces réalités explosives que Varsovie a crû bon de provoquer gratuitement l’opinion russe, quitte à renforcer en son sein les courants les plus nationalistes. De fait, si l’ambassadeur russe en Pologne a tenté de minimiser la portée de l’initiative de Varsovie en soulignant que celle-ci « ne change rien d’un point de vue pratique », le porte-parole du Kremlin l’a, quant à lui, dramatisée en évoquant « un processus proche de la folie »…

Dans le contexte de cette guerre, aussi cruelle qu’absurde, jeter de l’huile sur le feu est une stratégie contre-productive qui peut s’avérer dévastatrice. 

A cet égard, que dire de la dangereuse surenchère du gouvernement britannique, prêt à livrer à l’Ukraine des missiles « Storm Shadow » d’une portée de 250 km (version bridée) , pouvant aller jusqu’à 500, voire 1000 km -autrement dit capables, sinon d’atteindre le territoire russe très en profondeur, du moins de frapper le port de Sébastopol , où stationne la flotte russe de la mer Noire…C’est précisément pour prévenir le risque de se voir entraînés vers un niveau d’escalade immaîtrisable que la Maison Blanche et le Pentagone eux-mêmes ont jusqu’ici opposé un refus net aux demandes répétées de Kiev d’armes à longue portée. En confondant solidarité et irresponsabilité, Londres pose un vrai problème à toute l’Europe et au-delà. Les puissances du G7, qui ont fait le choix symbolique de se réunir à Hiroshima, du 19 au 21 mai prochains, feraient bien de s’en saisir .

18 Mai 2023 at 3:36 Laisser un commentaire

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