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 FACE À TRUMP, L’EUROPE PEUT-ELLE SURMONTER SES DIVISIONS ? 

  (L’HUMANITÉ, 11/3/2025)

 Il arrive que, face à des enjeux quasi-existentiels, les États membres de l’Union européenne resserrent les rangs. Ainsi, le « Brexit » s’avéra représenter en définitive un puissant facteur de cohésion de l’UE jusqu’à ce que le danger redouté -le détricotage progressif de l’UE- fût conjuré. Le retour de Donald Trump au pouvoir et sa cascade de premières provocations annoncent-ils une réaction du même type ? Rien n’est moins sûr : il y a loin des postures aux actes concrets.

D’abord, parce qu’existaient au sein même de l’Union, dès avant l’élection de l’actuel Président des Etats-Unis, des gouvernements d’inspiration « trumpiste » à bien des égards -nationalisme, conservatisme, hostilité extrême aux migrants, proximité de la Russie de Vladimir Poutine…-, dont le ralliement explicite au nouveau locataire de la Maison Blanche était prévisible et s’est confirmé. C’est notamment le cas de l’équipe de Viktor Orban, en Hongrie, rejoint par celle de Robert Fico, en Slovaquie. Bien plus grave pour la cohésion future de l’UE est le cas de la « post-fasciste » Meloni. La Présidente du Conseil de l’un des six pays fondateurs de l’UE ne cache ni sa proximité idéologique et ses liens anciens avec la droite la plus réactionnaire des Etats-Unis ni sa complicité avec Elon Musk. Elle s’est auto-désignée médiatrice entre l’UE et Trump. Déjà, certains la soupçonnent de favoriser ses intérêts propres ou ceux de ses alliés au détriment de ceux de l’Europe. Ce clivage est probablement appelé à se creuser dans la période à venir. 

Par ailleurs, la guerre commerciale lancée par Trump touche, certes, tous les pays européens, mais inégalement. Pour les uns, c’est un gros inconvénient, pour les autres une catastrophe. En outre, si les uns sont favorables à une riposte ferme, d’autres préconisent la recherche d’un « deal » avec le puissant partenaire. Concernant la défense de l’Europe, la fin de la garantie de la protection de l’OTAN (en fait, des Etats-Unis) suscite, elle aussi, des réactions disparates. Si le Chef du gouvernement polonais est fier d’avoir porté ses dépenses militaires au niveau exigé par Trump (5% du PIB) et si la France vise entre 3 et 5%,  des pays comme  l’Autriche, l’Irlande ou Malte, voire l’Espagne, la Belgique, le Luxembourg ou la Slovénie et d’autres…sont très loin de les suivre. Le cas de l’Allemagne est singulier : hier pays le plus proche de Washington, elle est aujourd’hui au centre des attaques du nouveau pouvoir américain. De quoi déstabiliser ses « élites » et expliquer, par exemple, le ralliement du futur Chancelier, Friedrich Merz, à l’idée iconoclaste et fort  périlleuse d’un parapluie nucléaire franco-britannique de l’Europe -une option loin de faire l’unanimité dans l’UE ! Le simple fait de faire son deuil de la tutelle militaire des Etats-Unis n’est pas acquis par nombre de gouvernements qui ne voient tout simplement pas d’alternative crédible à l’OTAN. 

On risque donc d’assister à un double mouvement au sein des « 27 » : une large convergence dans le désarroi, propice à un rapprochement dans la recherche d’une issue ; mais, dans le même temps, la ré-émergence des divergences de vision politique et d’intérêts matériels face aux solutions envisagées. 

17 mars 2025 at 7:00 Laisser un commentaire

QUELLE SÉCURITÉ POUR L’EUROPE À L’HEURE DU « NOUVEAU SHÉRIF » ?

Jusqu’ici, les choses étaient (en apparence) simples : la sécurité de l’Europe, c’était l’OTAN. Ou, plus exactement, c’était l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord : « une attaque contre un pays membre est considérée comme une attaque dirigée contre tous ». Bref, si les Russes nous agressaient, les Américains nous sauveraient ! À vrai dire, personne n’a jamais su ce qu’il en aurait été si l’impensable s’était produit. La seule conséquence vérifiée de cette dépendance au gendarme du monde a été le consentement des « alliés » à la limitation de leur souveraineté, depuis leur souveraineté juridique (bridée par les lois extraterritoriales des Etats-Unis) jusqu’à leur souveraineté stratégique (qui a, par exemple, conduit l’Europe occidentale à rejeter en juin 2008 le « traité paneuropéen de sécurité »  que lui proposait la Russie de l’époque, car Washington y voyait un frein à l’extension de l’OTAN vers l’Est). Quoiqu’il en soit, cette garantie de protection, qu’elle ait été réelle ou supposée, vient d’expirer de fait avec l’arrivée d’un « nouveau shérif dans la ville », selon l’élégante métaphore du Vice-Président  américain. 

Dès lors, que faire ? Le moment est venu d’ouvrir un débat de fond sur cet enjeu majeur aux implications fondamentales : quelle sécurité pour l’Europe, non dépendante des aléas de l’agenda géopolitique des dirigeants des Etats-Unis ? Depuis des années, les dirigeants européens parlent de « défense européenne », mais toujours dans le cadre de l’OTAN. Comme l’a encore rappelé Emmanuel Macron au lendemain de l’élection de Donald Trump : « L’OTAN a évidemment un rôle-clé et, au sein de l’OTAN, (…) le pilier européen n’a rien à retrancher à l’Alliance » (1). La conception même de la sécurité européenne -et, dans ce cadre, d’une éventuelle défense authentiquement européenne- est donc à réinventer. 

On pourrait envisager la mise en commun de troupes et d’équipements entre certains pays européens dans deux cas : soit pour aider l’un des pays concernés à défendre son territoire contre un agresseur, soit dans le cadre d’une mission de maintien de la paix des Nations unies. En tout état de cause, la décision de prendre part à une  action relèverait de la souveraineté de chaque Etat concerné, à partir d’une évaluation sérieuse et responsable de la situation. En outre, toute « autonomie stratégique » européenne digne de ce nom supposerait, pour les pays concernés, de se libérer de la tutelle des Etats-Unis en matière d’armements. 

 Mais l’essentiel devrait toujours être une grande politique de prévention des tensions et des conflits. Dès lors, la priorité des priorités devrait être de reconstruire un système de sécurité collective de tout le continent européen, incluant par définition la Russie. Naturellement, la guerre atroce menée par ce pays en Ukraine et, partant, la défiance abyssale qu’inspire Poutine rendent cet objectif quasi-inatteignable à court terme. Il n’en est pas moins vital de s’y atteler au plus vite. On en est, hélas, très loin dans l’UE, où les débats tournent exclusivement autour de  l’explosion des budgets de la défense, quand ce n’est de l’européanisation de « la défense antimissile, (des) tirs d’armes de longue portée, (voire de) l’arme nucléaire » selon Emmanuel Macron, qui, dans ce contexte, envisage ni plus ni moins que  d’augmenter le budget de la défense en France de…90 milliards d’euros PAR AN ! (2) Oui, décidément, un vrai débat de fond s’impose ! Si les États calent ou s’égarent,  c’est le moment de lancer des initiatives citoyennes sur ce sujet. La sécurité est l’affaire de toutes et de tous.

———

(1) Discours au Sommet de la « Communauté politique européenne »,  Budapest (7/11/2024) 

(2) France Info (20/2/2025)

27 février 2025 at 4:38 Laisser un commentaire

GUERRE DU LIBAN : « LA FENÊTRE DIPLOMATIQUE EST PETITE, MAIS ELLE EXISTE »

Comment en finir avec le déluge de feu qui s’abat sur le Liban ? La terreur semée par les frappes israéliennes incessantes a déjà chassé de chez eux plus d’un million d’habitants, soit 20% de la population ! Y-a-t-il encore le moindre espoir d’une solution politique à un conflit qui conduit chaque jour un peu plus le Proche-Orient au bord du gouffre ? « La fenêtre diplomatique est petite (…), mais elle existe » estime Tarek Mitri, qui  fut ministre des Affaires étrangères du Liban lors de la précédente guerre entre Israël et le Hezbollah, en 2006. Il joua un rôle majeur dans les négociations qui aboutirent à la fameuse « résolution 1701 » du Conseil de sécurité des Nations unies , ouvrant la voie au cessez-le-feu. Il n’est donc pas sans intérêt de prêter attention à son analyse de la situation actuelle, parue dans le grand quotidien libanais, « L’Orient-Le Jour » (1). 

Selon lui, la première condition concerne directement la société libanaise. Saura-t-elle préserver son unité, sachant -« quelle que soit la responsabilité du Hezbollah »- qu’une division entre partisans et adversaires de ce mouvement servirait les desseins de Netanyahu,  déterminé à dominer toute la région  ? Car, pour le diplomate, « La guerre actuelle est une guerre contre le Liban, pas seulement contre le Hezbollah ». Il faut donc « comprendre que l’affaiblissement du Hezbollah ne sera pas une victoire pour ceux qui s’opposent à sa politique ». Compte tenu de sa pratique de la guerre -« qui ne fait pas la distinction entre  les objectifs militaires et la population civile »- l’armée israélienne finira par « détruire une partie du Liban en prétendant se concentrer sur le Hezbollah ». En outre, Netanyahu ne parle que du conflit avec l’Iran en ignorant le problème palestinien « alors qu’il est au cœur de ce qui nous arrive ». Il est donc vital d’ en finir au plus vite avec cette guerre en travaillant à un cessez-le-feu permanent . 

C’est possible, selon le diplomate, en revenant à la résolution 1701 (qui implique le retrait des troupes israéliennes comme de celles du Hezbollah du Liban-Sud au profit de l’armée libanaise et des casques bleus de l’ONU). Le Liban se dit prêt à déployer son armée dans cette zone tampon de 30km de large séparant le fleuve Litani de la frontière israélienne . Quant au Hezbollah, il serait vraisemblablement d’accord pour s’en retirer sans condition préalable, même si, dans l’immédiat, « ne serait-ce que pour les siens, il doit continuer à se battre ». En revanche, il y a chez Netanyahu « cette ivresse du succès et une ambition de changer la région » qui le poussent à une guerre sans limites. 

C’est là qu’intervient la responsabilité de la communauté internationale. Sur les 15 pays membres du Conseil de sécurité, rappelle l’ancien ministre libanais, pas moins de 14 seraient favorables à un arrêt immédiat des combats. Qu’en serait-il du 15 ème, les Etats-Unis ? Voteraient-ils pour une telle résolution ? Quelles pressions seraient-ils prêts à exercer sur leur allié stratégique pour arrêter sa criminelle aventure ? L’heure de vérité approche.

———

(1) « L’Orient-Le Jour » 2/10/2024

12 octobre 2024 at 6:14 Laisser un commentaire

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