LES INCENDIAIRES PASSENT AUX AVEUX
9 mai 2013 at 4:30 Laisser un commentaire
L’un après l’autre, les « ténors » de l’Union européenne passent , d’une certaine manière, aux aveux sur l’impasse dramatique où nous a conduits leur politique d’austérité draconienne. Le premier à sembler battre sa coulpe fut José-Manuel Barroso. Le président de la Commission, jusqu’alors adjudant-chef zêlé dans la chasse aux « déficits excessifs », reconnaissait le 22 avril dernier que « cette politique a atteint ses limites » faute de « bénéficier d’un minimum de soutien politique et social ».
Le très orthodoxe président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, ne fut pas longtemps en reste. Le 2 mai, il est allé jusqu’à réclamer des « mesures immédiates » en faveur de la croissance et de la création d’emplois. « Prendre ces mesures » lui parait même subitement « plus urgent » que tout le reste. En effet, confesse le coordinateur de toute la stratégie d’ « assainissement des comptes publics » mise en oeuvre sous l’égide des Chefs d’Etat et de gouvernement : « Après trois ans de combats, la patience à l’égard de l’austérité est pratiquement épuisée ».
Et voilà que Jean-Claude Juncker, qui fut, jusqu’à ces dernières semaines, le « patron » de l’Eurogroupe (qui réunit les ministres des finances de la zone euro), s’épanche à son tour sur les conséquences , non plus seulement sociales mais politiques , gravissimes, des choix austéritaires des principaux dirigeants de l’UE tout comme des humiliations désastreuses qui les ont accompagnés. Dans un entretien au magazine allemand « Der Spiegel », il s’alarme ainsi, particulièrement au sujet de la Grèce et de l’Italie, de la renaissance du « ressentiment national » -notamment dirigé contre Berlin- en des termes qui frisent l’affolement: « ceux qui croient que la sempiternelle question de la guerre et de la paix en Europe est derrière nous risquent de se tromper lourdement » diagnostique l’ex-leader de la zone euro, qui va jusqu’à oser un parallèle entre « le contexte européen de 2013 » et celui de…1913 ! On ne peut dresser plus implacable acte d’accusation contre ce qu’est devenue une construction européenne dont la première raison d’être officielle fut jadis de rendre à jamais impossible toute guerre entre ses peuples et ses Etats!
Serions-nous donc face à une prise de conscience salutaire, prélude à une révision déchirante des politiques poursuivies jusqu’ici ? Hélàs, non. Si le réalisme impose un report des échéances pour atteindre les mythiques « 3% », la logique libérale est, elle,réaffirmée: celle de la « compétitivité » par la « baisse du coût du travail » , le rationnement des dépenses publiques et sociales , les « réformes structurelles » du marché du travail et du système des retraites…afin de « gagner des parts de marché » sur les partenaires de la zone euro.
Alors, rien de neuf ? Oh que si! Quand les dirigeants européens sont eux-mêmes contraints de constater qu’ils se sont gravement fourvoyés, ils perdent ce qu’il leur reste de légitimité pour continuer d’ imposer leurs vues comme « les seules solutions possibles ». L’heure est au débat citoyen sur les alternatives. L’Europe est décidément un enjeu trop important pour que les peuples s’en laissent désaisir.
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