L’EUROPE ET CHAVEZ : QUELQUES EXPÉRIENCES VECUES
14 mars 2013 at 9:52 Laisser un commentaire
Ma première expérience européenne de l’ère Chavez se situe un an après l’élection du « Commandante », en décembre 1998. L’effondrement simultané et spectaculaire, lors de ce scrutin, des deux forces politiques qui s’étaient , trente ans durant, partagé le pouvoir (la démocratie chrétienne et la social-démocratie) laisse deviner le degré de sympathie que nourrissaient les dirigeants des principaux partis européens à l’égard du nouveau leader de Caracas…Prôner devant eux une initiative de solidarité européenne en direction du Vénézuéla revenait à leur suggérer d’attribuer le Prix Sakharov à Fidel Castro !
Ils ont pourtant dû faire contre mauvaise fortune bon coeur au moment où le nouveau gouvernement vénézuélien a eu à affronter sa première et très douloureuse épreuve. Le 15 décembre 1999, des pluies torrentielles venaient de provoquer non loin de la capitale de gigantesques glissements de terrain,entraînant dans les éboulements les innombrables habitations ultra-précaires des favélas de cette région sinistrée. Le bilan de ce drame de la misère -15 000 morts! – imposait à l’Europe de réagir. Nous avions donc proposé à la Conférence des présidents de groupe l’envoi d’une délégation officielle du Parlement européen, porteuse d’une mission de solidarité humaine et matérielle. La proposition fut, bon gré, mal gré, acceptée à l’unanimité. Nous nous rendirent sur les lieux de la catastrophe avant d’avoir un entretien approfondi avec le Président Chavez, dont l’engagement dans une action résolue contre la pauvreté massive dans ce pays riche de ses hydrocarbures impressionna toute la délégation. L’espace d’une rencontre, le climat ne fut plus à la confrontation , mais à la coopération.
La deuxième expérience que je tiens à relater fut mois glorieuse pour l’Europe…Le 11 avril 2002, un coup d’Etat éclata à Caracas à l’initiative de quelques généraux félons , du chef du patronat et des propriétaires de grands media, avec le soutien de l’administration Bush. La totale ! Et l’Union européenne, cette championne de l’Etat de droit ? Elle…avalisa immédiatement le putsch par une Déclaration officielle de sa Présidence (espagnole). Son ambassadeur à Caracas rendit visite dès le lendemain – en compagnie de son homologue américain- à l’imposteur, Pedro Carmono. Celui-ci héritera du surnom de « Pierre-le-Bref », car il dut prendre la fuite quelques heures plus tard, quand la formidable mobilisation populaire permit le retour du Président légitime. Chavez rappellera cette forfaiture aux dirigeants espagnols, tout en réitérant à l’Union européenne son offre de coopération. En vain.
Un troisième épisode illustre parfaitement cette incapacité de l’UE telle qu’elle est à saisir l’opportunité de construire de nouvelles relations avec les jeunes démocraties qui, depuis la brèche historique ouverte par Chavez, ont émergé dans cette région. Il s’agit du quatrième sommet Europe-Amérique latine qui s’est réuni à Vienne en mai 2006. A l’attente d’un « nouveau partenariat » axé sur les droits des populations défavorisées, les Européens ont répondu « libre-échange » conformément à « l’économie de marché ouverte où la concurrence est libre. » Au « sommet alternatif » des mouvements sociaux qui se tint en marge de la rencontre officielle, Hugo Chavez tira devant nous la leçon de ce blocage: « Notre tâche est d’être des multiplicateurs de conscience, car de la conscience nait la volonté, et de cette volonté nait le projet ».
Chavez est mort,mais ce combat continue.
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