EUROPE : UNE AVANCÉE DÉMOCRATIQUE INATTENDUE !
25 mai 2017 at 11:14 Laisser un commentaire
Une fois n’est pas coutume : l’on ne peut que se réjouir de la décision de la Cour de Justice de l’Union Européenne publiée le 16 mai dernier. Elle qui nous a habitués à des arrêts d’inspiration ultra-libérale vient de décider que, dorénavant, tous les traités commerciaux du type TAFTA (UE-USA) ou CETA (UE-Canada) devront être adoptés non seulement par les institutions européennes (Parlement et Conseil des Ministres) mais aussi par la totalité des parlements nationaux (et même des parlements régionaux dans les Etats à système fédéral) pour pouvoir entrer pleinement en vigueur ! En particulier, les dispositions visant à « protéger les investisseurs » -les fameux « tribunaux d’arbitrage » spéciaux et privés, destinés à trancher les litiges entre multinationales et Etats membres- , ne pourront désormais voir le jour que si chacun des 28 parlements nationaux et de la dizaine de parlements régionaux de l’UE donne explicitement son accord avec ces mesures !
C’est l’histoire de l’arroseur arrosé ! En effet, c’est le Commissaire européen qui était en charge des négociations de l’un des tout premiers accords de ce type ( l’accord de libre-échange UE-Singapour ) avant de diriger celles concernant le traité transatlantique TAFTA , le Belge Karel de Gucht, qui avait lui-même, en 2014, saisi la plus haute juridiction de l’UE avec un seul objectif : faire établir une fois pour toutes que ce type d’accord relevait de la « compétence exclusive » de l’UE, et que, par conséquent, cela ne regardait pas les parlements nationaux. Il pensait ainsi faire taire définitivement les nombreuses voix -y compris celle de certains Etats membres- qui contestaient ce déni de démocratie. Trois ans plus tard, le voilà spectaculairement désavoué. Et avec lui, tous ceux qui l’avaient clairement soutenu dans sa volonté de court-circuiter les représentations nationales -depuis les services juridiques de la Commission jusqu’à une majorité de députés européens !
Et lorsque le Président de la Commission européenne , Jean-Claude Juncker, a finalement cédé, en 2016, aux pressions des défenseurs de la souveraineté des parlements nationaux en acceptant que le traité CETA (UE-Canada) soit ratifié dans chaque pays membre, il a été sévèrement critiqué par les « ténors » du commerce international. Ainsi, Pascal Lamy, ancien Directeur général de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), lui avait reproché d’avoir commis « une erreur grossière » mettant en danger la politique commerciale européenne ! C’est dire si la récente décision de la Cour européenne a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans les milieux « pro-business » des institutions européennes ! Quant à la Première Ministre de Sa Gracieuse Majesté, Theresa May, qui envisage de négocier avec l’UE un accord de libre-échange post-Brexit, la voilà prévenue : pour arracher un accord axé sur les « investissements », il lui faudra convaincre…38 Parlements nationaux et régionaux de l’UE. Pas gagné !
Quelle est la morale de cette histoire ? Que rien n’est inamovible dans cette construction européenne à la réputation de forteresse imprenable ! Que des forces de progrès, des citoyens en grand nombre (et de plusieurs pays), et si possible quelques gouvernements influents se mobilisent et se fassent entendre, et aussitôt les « certitudes » s’effritent et une vraie confrontation d’options contradictoires devient possible… jusqu’au sein de ce sanctuaire du libéralisme qu’est la Cour de l’UE ! Une expérience inattendue qui mérite réflexion.
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