NOTRE AMI GERRY ADAMS : HOMME DE PAIX; ARTISAN DE L’UNIFICATION DE L’IRLANDE; FIGURE DE LA GAUCHE EUROPEENNE

11 février 2018 at 8:55 Laisser un commentaire

Il y a peu de dirigeants politiques en Europe qui peuvent se targuer d’avoir autant marqué l’histoire contemporaine de leur pays que Gerry Adams , le Président du parti de gauche irlandais Sinn Fein depuis 35 ans. Il était donc logique de s’arrêter sur son parcours exceptionnel alors qu’il s’apprête à passer le relai, le 10 février prochain. Ce jour-là, le congrès de la formation républicaine élira une nouvelle dirigeante. Le choix annoncé sera en soi un symbole du rayonnement que Gerry Adams aura grandement contribué à assurer à son parti. Il devrait, en effet, se porter sur l’ actuelle Vice-présidente du parti , une femme de 48 ans, originaire, non plus d’Irlande du Nord, comme l’étaient traditionnellement la plupart des responsables de Sinn Fein, mais de la République d’Irlande elle-même. La promotion de Mary-Lou McDonald, hier déjà première parlementaire européenne de son parti ( en 2004 ), aujourd’hui ( depuis 2011 ) députée au Parlement de Dublin, illustrera ainsi à elle seule l’une des réussites les plus importantes de l’action de Gerry Adams : faire de Sinn Fein un acteur politique de premier plan dans toute l’Irlande et crédibiliser , par là même, toujours plus, l’objectif stratégique central de son parti, qui est la réunification du pays .

Un petit rappel historique s’impose à ce propos : lors de la création du nouvel Etat libre d’Irlande, en 1922, les « Unionistes », descendants des colons anglais et écossais, majoritaires dans la région du nord du pays, avaient décidé de rattacher « leur » province à la Grande-Bretagne. Depuis lors, Londres considère cette partie de l’Irlande comme l’une des quatre « nations » constitutives du Royaume-Uni. Dès lors, les  républicains d’Irlande du nord, favorables au retour de la province dans la nation irlandaise, engagèrent le combat que l’on sait  -y compris, par la voie militaire avec l’IRA , opposée à la « Royal Ulster Constabulary »- contre les forces d’occupation. Sinn Fein fut longtemps présenté comme la « vitrine politique » de l’IRA, et Gerry Adams comme un membre clandestin de l’IRA, ce que l’intéressé a toujours démenti.

C’est, au contraire, dans son action inlassable pour que soit définitivement tournée la page de la lutte armée au profit de la seule lutte politique que Gerry Adams a acquis sa stature de leader incontournable , tant en Irlande-même que , progressivement, vis-à-vis des dirigeants britanniques successifs. Et les succès enregistrés sur cette voie sont spectaculaires. L’étape-clé de ce défi historique fut, on le sait, le fameux « Accord du Vendredi saint » du 10 avril 1998, par lequel « unionistes » et « républicains » d’Irlande du nord ouvrirent la voie à une co-gestion de la province dans des institutions spécifiques ( Conseil des ministres et Assemblée propres à l’Irlande du nord) et à la création d’instances de coopération entre la République d’Irlande et l’Irlande du nord. En outre, Londres et Dublin s’engagèrent à reconnaître la double citoyenneté -irlandaise et britannique- aux habitants de l’Irlande du nord. Cet accord fut massivement approuvé tant par les citoyens de l’Irlande du nord que par ceux de la République d’Irlande. Encore fallait-il s’assurer, côté républicain, du respect durable de la décision arrachée deux ans auparavant à l’IRA de renoncer à la lutte armée, et, dans le même temps, arriver à gérer tant bien que mal la cohabitation plus qu’atypique avec les chefs unionistes , souvent ultras et anciens ennemis jurés . Or, si cette expérience ne fut évidemment pas exempte de crises (comme c’est le cas en ce moment-même) , elle aura permis d’instaurer la paix dans la province et de déplacer le conflit sur le seul terrain acceptable en démocratie : celui de la politique. « Nous allons modifier le paysage politique du tout au tout -déclara Gerry Adams- Nous allons réussir ». Depuis lors, en effet, lui qui avait subi  la sinistre prison de Long Kesh -sans jugement- ; qui fut victime de deux attentats qui ont failli lui coûter la vie; lui dont même la voix fut bannie de la radio britannique par Margaret Thatcher, fit preuve d’un détermination sans faille pour faire « réussir » cette métamorphose. Aussi, lorsque, quatre mois à peine après ce fameux « Vendredi saint » , un groupe dissident de l’IRA opposé au processus de paix fit exploser une bombe tuant 29 personnes, il se montra d’une fermeté implacable dans la condamnation de ce crime. Gerry Adams est aujourd’hui reconnu comme un homme de paix.

Ces vingt années furent naturellement semées d’embuches. Plus d’une fois, en Irlande du Nord, de vieux démons de l’ex-IRA surgirent à nouveau, aussitôt exploités par les irréductibles adversaires de Sinn Fein. Mais jamais Gerry Adams n’a renoncé devant l’obstacle : « Nous avons perdu l’initiative ; il faut vite la reprendre ! » m’avait-il expliqué un jour, avec sa calme assurance. En République d’Irlande, les coups reçus ne sont pas moindres . C’est que, sous la conduite de son emblématique leader, Sinn Fein est devenu un authentique parti de gauche, proche du peuple et investi dans toutes les grandes questions sociales : « Ce qui inquiète les partis traditionnels, c’est que Sinn Fein a réussi à capter l’électorat ouvrier et populaire au détriment des partis centristes , ce qui introduit une logique de classe dans la politique irlandaise » notait fort justement,  à la veille des dernières élections générales dans la République d’Irlande, il y a tout juste deux ans, un éminent universitaire de Dublin (1). De fait, Sinn Fein est aujourd’hui un acteur majeur de la gauche irlandaise et européenne . « Il y a 20 ans, nous n’avions qu’un député. Aujourd’hui,  nous en avons 23 en Irlande et 27 en Irlande du nord » rappelait Gerry Adams en annonçant son prochain départ. De fait, Sinn Fein, seul parti présent dans les deux parties du pays, est la deuxième force politique en Irlande du nord et la troisième en République d’Irlande. Ses parlementaires européens siègent au groupe de la gauche unitaire européenne (GUE). « L’idéologie du républicanisme irlandais trouve ses racines dans la Révolution française : liberté, égalité, fraternité ! » déclarait Declan Kearney, un élu de l’Assemblée d’Irlande du nord , lors d’une récente rencontre avec Pierre Laurent au siège du parti communiste français.
Le « Brexit » constitue le dernier défi majeur auquel se sera attelé le président de Sinn Fein : plutôt que de le subir (puisque la future frontière extérieure de l’UE risque en principe de couper l’Irlande en deux !), il a, là encore, choisi l’offensive en soulignant que la réunification des deux Irlandes était la vraie solution au problème. « Le Sinn Fein fera campagne pour la tenue d’un référendum et pour la victoire dans les cinq prochaines années ! »
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(1) Aidan Regan,  professeur à l’University Collège of Dublin (« La Tribune » 22/2/2016)

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