BON ANNIVERSAIRE, HANS MODROW !
8 février 2018 at 9:18 Laisser un commentaire
Hans Modrow, ancien Premier Ministre de RDA (novembre 1989-mars 1990) entré dans l’Histoire comme artisan de la gestion pacifique des lendemains de la chute du mur de Berlin, vient de fêter ses 90 ans. C’est l’occasion de rendre hommage à un homme que j’ai le privilège de connaître depuis près d’un demi-siècle et dont la droiture ne s’est jamais démentie .
Ce fut le cas dès le début de sa carrière de premier dirigeant du parti SED de la région de Dresde, où son attitude tranchait singulièrement avec celle d’autres « apparatchiks » de l’époque. Comme je lui faisais remarquer, alors qu’il venait d’être investi de hautes fonctions, combien j’appréciais le respect qu’il témoignait aux employés des administrations placées sous sa responsabilité, il eut cette réplique prémonitoire : « Je me conduis avec les gens que je croise pendant mon ascension de telle manière que je puisse encore les regarder dans les yeux le jour où je perdrai ma position ». Et, de fait, me promenant avec lui dans les rues de Berlin-Est aux lendemains de la la fin de la RDA, je fus frappé par la déférence et même la cordialité que lui témoignaient les passants, « après » comme « avant ».
Dans les années 80, sa franchise sur les dysfonctionnements du système lui valut d’être popularisé dans la presse de la République Fédérale d’Allemagne comme un « contestataire de la ligne Honecker » (alors 1er Secrétaire du SED). Cette « promotion » contribuera à nourrir toujours plus le ressentiment que lui vouait sa direction nationale. Ironie de l’Histoire : c’est la chute du mur qui empêchera Honecker de faire tomber Modrow ! En effet, à l’occasion des cérémonies du 40ème anniversaire de la création de la RDA -en octobre 1989, donc à la veille de l’ouverture de la frontière- , Hans Modrow souhaita me voir et me confia avec gravité : « Demain, je vais avoir la visite d’une centaine d’inspecteurs envoyés par Berlin. Ils sont chargés de passer au peigne fin tous mes champs d’activités pour me mettre en accusation… » Mais « Berlin » n’en eut pas le temps. Au contraire, c’est au pestiféré de Dresde que l’équipe dirigeante fera appel pour prendre les rênes d’un navire prenant l’eau de toutes parts. Modrow réussira, avec tout l’esprit de responsabilité qui l’a toujours caractérisé, à gérer sans effusion de sang la phase si délicate séparant la fin du régime de la réunification.
« Je voulais une réunification entre égaux », dira-t-il, mais dut se résoudre à ce qui s’apparentera à une annexion. Cette profonde frustration -et le climat de revanche impitoyable que fit régner le pouvoir de Kohl à l’encontre des « vaincus »- n’empêcheront pas Hans Modrow de poursuivre son action dans les nouvelles conditions. En particulier, en contribuant à l’émergence du « Parti du socialisme démocratique », le PDS, dirigé par Gregor Gysi, et dont Modrow sera le Président d’honneur, comme il le sera, plus tard, de « Die Linke ».
Quelques années -et deux procès politiques (gagnés)- plus tard, Hans Modrow fera partie des premiers élus de l’Allemagne unifiée au Parlement européen, où il gagna une large estime. Désormais « retraité », l’infatigable acteur politique écrit des livres, tient des conférences, parcourt le monde…et continue de susciter des événements : à la réception donnée à l’occasion de ses 90 ans, les ambassadeurs des deux Corées ont tenu à poser ensemble à ses côtés ! Sacré bonhomme. Bon anniversaire, Hans Modrow !
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