ARIANE : UN AUTRE VISAGE DE L’EUROPE.
27 septembre 2018 at 6:08
A l’occasion du 100 ème tir d’une fusée Ariane 5, le 25 septembre dernier, arrêtons-nous sur une dimension très particulière de « l’Europe » : l’ Agence spatiale européenne (ESA), indépendante de l’UE, mais co-élaborant avec elle la politique spatiale . Celle-ci est intéressante à plusieurs égards. D’abord, pour les nombreux services qu’elle est capable de générer. Certains sont connus, comme ceux concernant les télécommunications, l’accès à internet, la météorologie ou la navigation-localisation. D’autres le sont moins, tels l’observation de la Terre pour la protection de l’environnement, la gestion des ressources naturelles (agriculture, eau…) à l’échelle de la planète, ou l’évaluation de l’efficacité des mesures prises contre le réchauffement climatique. Sans oublier ses importantes retombées en matière de développement scientifique et technologique, de création de nouveaux métiers et de nouvelles filières industrielles.
L’Europe spatiale mérite également notre attention du point de vue de son mode de fonctionnement, très différent des règles en vigueur au sein de l’Union européenne . Fondée sur une coopération intergouvernementale, l’ESA est dirigée par un Conseil où chacun de ses 22 Etats membres dispose d’une voix, quelle que soient sa taille et son poids financier (1). Le budget de l’Agence est composé d’une partie fixe et obligatoire (20% du total) -à laquelle chacun contribue en fonction de sa production de richesses (PIB)- et d’une partie variable et facultative (80%) alimentée par chaque pays à la hauteur… de son choix. Mais, en retour, à la proportion de sa contribution financière correspondra celle des commandes confiées par l’Agence à ce pays. Celui qui décidera de verser 10% du budget facultatif bénéficiera de 10% des travaux de recherches ou de production d’engins spatiaux. C’est ce qu’on appelle le principe du « retour géographique » , par opposition à celui de la mise en concurrence, pratiquée dans l’UE à travers les appels d’offres. Ajoutons que l’excès de centralisation est, ici, clairement évité : si le siège de l’Agence est à Paris et le centre de tir en Guyane, le « Centre européen de technologie spatiale » chargé de concevoir la plupart des véhicules spatiaux est situé aux Pays-Bas; le Centre de formation des astronautes en Allemagne ; l’Institut européen de recherches spatiales en Italie; le Centre européen de l’astronomie spatiale (qui traite les données issues des missions) en Espagne…Quant au personnel, il provient de tous les Etats membres.
Enfin, l’ambition de l’ESA est d’assurer l’indépendance technologique et la « préférence européenne », tout en coopérant activement avec les autres grandes agences mondiales -Etats-Unis, Russie, Chine, Inde…- Ce modèle original resistera-t-il aux pressions en faveur de « l’ouverture des marchés à la concurrence » ? « Space X », le lanceur « low-cost » américain, sous contrat avec la NASA, aura-t-il raison des acquis remarquables d’Ariane et de l’ESA ? Comment réagir ? Ce type de défi a, lui aussi, toute sa place, dans le débat sur l’avenir du projet européen.
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(1) Sur les 22 Etats membres de l’ESA, 20 sont dans l’UE, auxquels s’ajoutent la Norvège et la Suisse.
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