Archive for 5 juillet 2019
QUE RÉVÈLE L’INEDITE BROUILLE FRANCO-ALLEMANDE ?

Ce n’est pas pour autant qu’on peut voir un progrès de la démocratie européenne dans les actuels échanges « brut de décoffrage » entre les leaders des deux rives du Rhin. Un jour, la nouvelle Présidente de la CDU agite la proposition -totalement gratuite mais qu’elle sait provocatrice aux yeux de Paris- de supprimer le statut de la France au Conseil de sécurité des Nations-Unies au profit d’un siège unique de l’UE. Pour quel profit, si ce n’est celui de flatter des sentiments anti-français ? Deux mois plus tard, c’est autour du Chef de l’Etat français d’évoquer publiquement « le déclin de l’Allemagne » et « la fin (de son) modèle de croissance (qui est) le contraire du projet social (que lui-même) porte au niveau de l’Europe » (!) Dans la bouche d’Emmanuel Macron, il n’y a là également que démagogie à usage politicien dans l’espoir de se blanchir à peu de frais sur le dos du voisin. Un nouveau seuil a été franchi de part et d’autre dans cette surenchère d’amabilités au sujet du choix du futur Président de la Commission européenne. Récusant -avec raison- le candidat du Parti populaire européen, arrivé en tête le 26 mai dernier, (l’Allemand Manfred Weber), le locataire de l’Elysée s’est livré -à tort- à une description méprisante de l’intéressé, qui n’est guère plus que « tête d’une liste en Allemagne : la belle affaire ! » Il s’est aussitôt fait taxer de « germanophobie » par le chef de la délégation CDU au Parlement européen. Plus les jours passent, plus le climat ambiant devient délétère, le choix des postures indigne et le risque de dérapages politiques préoccupant.
Que nous révèle ce pitoyable défoulement de potaches ? Qu’il y aurait subitement des dissensions ou des conflits d’intérêts entre la France et l’Allemagne ? Non. Cela a toujours été le cas : sur les dettes publiques, les déséquilibres commerciaux, l’énergie, les institutions, la diplomatie, la défense , les migrations…Les deux États justifiaient précisément « l’axe franco-allemand » par le fait que les compromis trouvés entre deux pays aussi différents faciliteraient d’autant l’accord avec les autres partenaires. Serait-ce alors le signe d’un réveil du pouvoir français, décidé qu’il serait à rompre avec le mortel alignement de ses prédécesseurs sur les « réformes » allemandes ? Pas vraiment ! Comme le notait un observateur allemand très compréhensif pour le Président français (Tagesspiegel, 3/5/2019) : « C’est précisément cette voie de réformes, qui a rendu l’Allemagne économiquement forte, qu’Emmanuel Macron s’efforce de convaincre ses compatriotes de suivre. Au lieu de l’appuyer, les Allemands n’ont pas répondu à sa demande de soutien ». En vérité, nous sommes plutôt en face d’une médiocre bataille de leadership , qui intervient, qui plus est, au plus mauvais moment car elle ne peut qu’exacerber la décomposition en cours de l’espace politique européen. Halte au feu !
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