EUROPE-GRECE: SCANDALEUSE HUMILIATION
28 juillet 2011 at 1:22 Laisser un commentaire
« La souveraineté de la Grèce sera énormément restreinte » a averti Jean-Claude Juncker au début du mois dans un entretien accordé au magazine allemand Focus. »Pour la vague de privatisations à venir,il faudra une solution qui se fonde sur le modèle de la Treuhand allemande » a poursuivi le président de l’ « eurogroupe »(les ministres des finances de la zone euro).Pour mesurer à quel point la référence à ce « modèle » constitue une scandaleuse humiliation vis à vis de la Grèce,il convient de revenir sur la terrible épreuve imposée à partir de 1990 à la population de l’ex-République démocratique allemande.Les « vainqueurs » de l’ Ouest avaient alors créé une agence « indépendante »(la Treuhand) chargée de privatiser qelque 14 000 entreprises d’Etat est-allemandes -mission dont cet organisme honni s’était acquittée à la hussarde en moins de quatre ans. Bradant sans scrupule le patrimoine économique d’un pays de 17 millions d’habitants pour un dixième de la valeur estimée au départ, la Treuhand organisa la destruction de plus de 2,5 millions d’emplois et offrit aux grands groupes de la République fédérale un nouveau et énorme marché vierge de tout concurrent. Ce dépeçage colossal fut, en outre, ponctué par une série d’affaires de corruption et de spéculations dont on n’a jamais connu toute la substance,les conclusions de la commission d’enquête chargée de faire la lumière…ayant été classées « secret d’Etat ».
Voilà donc l’expérience historique dont le responsable politique de la zone euro entend s’inspirer pour réaliser l’énorme programme de privatisations de biens publics engagé en Grèce,comme condition du déblocage d’une tranche de 12 milliards d’euros de prêts consentis par l’UE, la BCE et le Fonds monétaire international.De fait,une « agence de privatisation »,formellement créée par un vote du Parlement d’Athènes,a été chargée de la besogne,sous la houlette d’ « experts européens ».Comme en Allemagne,il y a vingt ans,les gros prédateurs sont sur les rangs pour s’octroyer à vil prix les « actifs » grecs les plus rentables, parmi lesquels les principaux ports et aéroports,les compagnies d’électricité,de chemins de fer et de téléphonie,la poste,les plages ,les mines…Gageons que les « plans d’assainissement » sont fin prêts.Et tant pis si le produit de ces gigantesques enchères réalisées au pas de charge (une privatisation tous les dix jours en moyenne selon la « Tribune » qui juge ce pari intenable) ne résoudra en rien les problèmes de solvabilité du pays ou de productivité de son économie! La leçon,espère-t-on à Bruxelles,portera en Grèce et au-delà: la « crise de l’euro » est appelée,dans les prochains temps, à tout justifier- la superaustérité,les privatisations ,et ,au besoin,la mise sous tutelle d’un pays au mépris de toute souveraineté -ce que l’ancien Secrétaire général de la Confédération européenne des syndicats, John Monks, avait appelé,non à tort, un régime « semi-colonial ».
Ce n’est vraiment pas le moment, pour un parti se réclamant d’une alternative de gauche,de mettre le doigt dans l’engrenage de cette caricature de solution à la crise de l’euro! Avis aux principaux candidats à la candidature du PS à l’élection présidentielle, qui viennent -pour prouver le « sérieux » de leur programme…- de s’engager à respecter à la lettre non seulement le principe mais le calendrier comminatoire de Bruxelles d’un retour aux mythiques 3% de déficits publics d’ici 2013,quoiqu’il en coûte à la société. Voilà un vrai sujet de débat politique en vue de 2012.
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