BIDEN ET L’EUROPE: APRÈS LE SOULAGEMENT, LES QUESTIONS
11 mars 2021 at 12:50 Laisser un commentaire
Voilà 50 jours que Joe Beiden, le classique, a remplacé Donald Trump, le sulfureux, à la Maison Blanche.
Ce changement au sommet vient d’améliorer spectaculairement l’image des Etats-Unis en France: plus 18 points d’opinions favorables, qui restent néanmoins légèrement minoritaires (51% d’opinions défavorables contre 49% d’opinions favorables, dont 6% « tout à fait favorables ») (1).
Ces réponses sont à rapprocher de celles recueillies dans une autre enquête, réalisée, elle, dans 11 pays européens , dont la France, après l’élection américaine mais avant la prise de fonction du nouveau Président : « à chaud », donc (2). À l’époque, seules 9% des personnes interrogées déclaraient avoir « confiance en l’Amérique », tandis qu’ un Européen sur trois -et plus d’un Allemand sur deux- estimaient que « les Américains ne sont plus dignes de confiance » pour avoir massivement soutenu le milliardaire populiste. On peut conclure de l’évolution positive des opinions exprimées au fil des premières apparitions de Joe Biden que celui-ci bénéficie pour un temps d’un « état de grâce » . À ce stade, cela se comprend aisément : le nouveau dirigeant n’a-t-il pas, d’emblée, renoué avec l’Accord de Paris sur le climat, réintégré l’Organisation mondiale de la santé, reconduit l’accord américano-russe, Start 2, sur la réduction des armes stratégiques, et, quoique de façon ambiguë, affirmé son accord de principe pour une relance de l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien ?
Problème : il y a nombre de domaines où Biden n’opèrera pas de volte-face par rapport à la politique de son prédécesseur. Tout simplement parce qu’il y a des « fondamentaux » que tous les Présidents américains appliquent, chacun dans son style propre, obnubilés qu’ils sont par l’exercice de leur leadership sur le reste du monde. « America first » et autres pratiques unilatérales et dominatrices en font partie, qu’elles soient commerciales, monétaires, technologiques, juridiques (l’extraterritorialité du droit américain) ou militaires : l’administration Biden n’a nullement l’intention d’y renoncer. À l’inverse, Washington rejette farouchement, aujourd’hui comme hier, toute « ingérence » de la justice pénale internationale dans les affaires intérieures des Etats-Unis… et même dans celles de certains de leurs alliés : ainsi, l’équipe de Biden « s’oppose fermement » à l’enquête ouverte par la Cour pénale internationale (CPI) sur des crimes de guerre présumés que l’armée israélienne est susceptible d’avoir commis dans les territoires palestiniens occupés !
Pourtant, c’est au nom des droits de l’homme et de la démocratie que le nouveau Président américain veut coûte que coûte enrôler l’Union européenne dans une croisade contre la Chine…
Après le soulagement de voir enfin, à nouveau, à Washington, un interlocuteur « normal », viendra très vite, pour l’UE, l’heure des questions sur ce qui ne peut plus durer dans un « partenariat transatlantique » digne de ce nom.
———(1) Sondage Odoxa pour les « Entretiens européens d’Enghien »-IRIS (6/3/2021)
(2) Sondage réalisé par les instituts YouGov et Datapraxis pour le think tank European Concil on Foreign Relations entre novembre et décembre 2020 (voir Le Monde, 19/1/2021)
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