EUROPE-AFRIQUE: QUEL « PARTENARIAT » ?
10 avril 2014 at 5:21 1 commentaire
La semaine dernière s’est tenu à Bruxelles le quatrième « Sommet Union européenne-Afrique ». On en a peu parlé. Pourtant, il a réuni pendant deux jours près de 80 dirigeants des deux continents et son enjeu était rien moins que l’avenir de la relation entre deux communautés humaines -l’une comptant 28 pays et 500 millions d’habitants; l’autre 54 nations et plus d’un milliard de personnes ! Un beau défi stratégique ! Mais, hélas, un de plus que l’UE actuelle s’avère incapable de relever et qui appelle une refondation de la construction européenne.
Depuis plusieurs années, des voix s’élèvent en Europe pour inviter de façon pressante États et entreprises non à prendre leur part à la promotion d’un développement humain durable et conjoint de ces deux grandes régions du monde liées par l’histoire et la culture, mais à profiter de « l’Eldorado » que représenterait l’émergence d’une minorité « solvable » en Afrique, sans se soucier particulièrement du contexte plus que problématique de cette divine surprise. « En 2040, sur le milliard et demie d’habitants que comptera l’Afrique subsaharienne, il y aura 240 millions d’urbains au revenu moyen équivalent à 20 dollars par jour, soit un marché annuel de plus de 1700 milliards de dollars » salivait déjà en 2010 le directeur général d’une filiale de…l’Agence française de développement -moins prolixe sur le sort des 1 milliard 260 millions d’hommes , de femmes et d’enfants restants ! (1) Dans la même veine, le cabinet McKinsey prédisait l’an dernier à l’adresse des « investisseurs » une hausse de 300 milliards du chiffre d’affaires du secteur de la consommation en Afrique d’ici 2020 , précisant même que l’Afrique offrait « le second taux de retour sur investissement » au monde.(2) Jusqu’à un diplomate comme Hubert Védrine qui en est venu , plus récemment, à s’extasier devant les « potentialités impressionnantes » que recèlerait l’apparition de ces fameuses « classes moyennes africaines », voire celle des « 40 Africains les plus riches (qui) ont une fortune cumulée de 70 milliards de dollars » ! (3) Bien sûr qu’il ne s’agit de négliger ni le commerce ni les investissements, mais la relation Europe-Afrique mérite mieux qu’une course aux bonnes affaires.
C’est pourtant cet esprit mercantile qui a marqué le Sommet de Bruxelles. »Il ne sera pas dit que l’Europe se fait damer le pion par la Chine et les autres pays émergents qui courtisent l’Afrique » résume l’Agence Europe. De fait, hormis l’envoi prochain de 800 soldats en République Centrafricaine , c’est surtout la finalisation des « Accords de partenariat économique » (APE) qui a motivé les dirigeants européens. Autrement dit, la mise en place de zones de libre-échange entre l’UE et chaque sous-région d’Afrique subsaharienne (Ouest, Centre,Est) -un projet dominateur auquel nos « partenaires » africains résistent depuis 2002, tant ils redoutent , pour leur économie, le choc du pot de fer contre le pot de terre et , pour leurs finances, la perte substantielle de droits de douane. Désormais, ils se voient,en cas de refus prolongé des APE, menacés de perdre le bénéfice d’accords préférentiels acquis de longue date. Quant au traitement des migrants « illégaux », après la terrible tragédie de Lampedusa, rien de nouveau sous le soleil: renforcement de la gestion des frontières, retour, réadmission.
De quoi conforter dans leur frustration tous ceux qui soupçonnaient l’Union européenne de chercher avant tout à « sécuriser ses marchés en Afrique, et notamment l’accès aux matières premières et aux ressources extractives » et appelaient de leurs vœux un « aggiornamento de l’approche européenne du partenariat avec l’Afrique, tenant compte des préoccupations majeures de transformation économique et sociale du continent » et visant à établir un « partenariat égalitaire » entre l’Union africaine et l’Union européenne.(4) Amis africains, nous vous entendons! Voilà encore une dimension du projet européen du Front de gauche comme du Parti de la Gauche européenne à faire vivre résolument!
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(1) « Le consommateur africain, nouvel Eldorado » ( Le Figaro – 10/9/2010)
(2) « L’Afrique,nouvel Eldorado des investisseurs » (Le Monde – 1/1/2013)
(3) « L’Afrique peut devenir le nouvel Eldorado de la France » (Nouvel Observateur » – 3/12/2013)
(4) « Un regard critique sur le partenariat Afrique-Europe »(IAG :Think tank reconnu par l’Union africaine et le Programme des Nations-Unies pour le Développement ).
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1.
Gourmel Michel | 16 avril 2014 à 2:23
Chronique hallucinante de Francis Wurtz dans l’HD 21.398 du 10/4/14
Le titre parait sympathique : « EUROPE-AFRIQUE : préférer un partenariat égalitaire », qu’il reprend sur son propre site Internet sous le titre « EUROPE-AFRIQUE : QUEL « PARTENARIAT » ? »
https://franciswurtz.net/2014/04/10/europe-afrique-quel-partenariat/
Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, mis à part quelques « frustrations » ou quelques « soupçons », il nous montre la présence de son UE et de sa France en Afrique comme celle de la Chine ou autre ; thèse des « gentils concurrents » à la mode parmi les dirigeants du PCF ! ! ! Un texte « politiquement correct » qui ne fait du mal à personne.
Certes, on y apprend que la nouvelle classe moyenne est la cible de convoitise, mais il « oublie » le contexte général, de découvertes de richesses colossales à la fin du XXème siècle et de la manière dont l’occident fait main basse sur ces richesses.
Francis Wurtz oublie 2 petits détails :
1°) Depuis plus d’un demi-siècle, la France reçoit un tribut annuel payé par 14 pays africains depuis « l’indépendance » d’une part, et d’autre part, 500 milliards US$ des pays africains sont gérés par la France dans l’opacité totale !
La finalité reste : Les pays africains n’ont pas accès à cet argent.
Confiscation automatique des réserves nationales : Les pays africains doivent déposer leurs réserves monétaires nationales en France à la banque centrale.
La France a tenu des réserves nationales de quatorze pays africains depuis 1961 : Bénin, Burkina Faso, Guinée- Bissau, Côte-d’Ivoire, Mali, Niger, Sénégal, Togo, Cameroun, République centrafricaine, Tchad, Congo -Brazzaville, la Guinée équatoriale et le Gabon.
Les récalcitrants sont systématiquement victimes de coups d’états ! ! !
Source et suite : http://feedproxy.google.com/~r/CollectifPourLaVeriteDesUrnes/~3/empMB-_y_p0/10016?utm_source=feedburner&utm_medium=email
2°) les centaines de milliers de morts imposés par une dizaine d’années de guerres coloniales de la France au Mali, Centrafrique, Côte d’Ivoire (2002 & 2011), et toutes les interventions Françaises Tchad (N’Djamena – 2008) au Niger, au Nigeria, notre soutien au Roi du Maroc contre les Sahraoui (et qui se maintient au pouvoir contre son propre peuple grâce à l’attentat, tombé à pic, le 28 avril 2011 à Marrakech), etc… les USA en Somalie, au Soudan en Libye (avec la France) : 3 des 8 pays visés par les attentats du 11/09/2001 (d’après le général 4 étoiles Wesley Clark dont toutes les révélations ont été ultérieurement confirmées), sans remonter bien sûr depuis les années 50 sur l’ingérence militaire et le soutien à des dictatures, voir au crime de génocide des Tutsis au Rwanda, il y a 20 ans emblématique du rôle de la France, mais hélas pas isolé …
La guerre en Libye – 100 000 morts – est particulièrement importante, car elle était préparée de longue main puisqu’elle a réussi, comme prévu, non seulement à -1- enrichir les marchands de canons, -2- à piller la Libye et son pétrole au profit des occidentaux, mais aussi -3- à déstabiliser l’ensemble du Sahel et même au-delà d’où un des motifs des guerres entre autre contre le Mali et le Centrafrique, cette intervention libyenne répandant partout la nébuleuse Al Qaeda à qui l’OTAN a ouvert les arsenaux libyens au point de leur donner, entre autre, 20.000 missiles : des SAM 7, des Stingers et même quelques Igla (pour lesquels les envahisseurs – l’OTAN commence à s’inquiéter 3 ans plus tard ! ! !) et -4- des guerres sans fin qui « justifient » des interventions coloniales dans tous les pays du Sahel et au-delà, pour maintenir et surveiller l’exclusivité du pillage de toutes ces richesses d’Afrique par les trusts occidentaux comme le prouve l’affaire du tanker Morning Glory (*) arraisonné par le Pentagone il y a un mois ; Les 1ers ministres et coups d’états se succèdent actuellement tous les mois en Libye sans résultat autre que l’accroissement du « chaos constructif » selon les théories et les vœux des occidentaux « nécessitants » toujours des interventions des puissances coloniales.
(*) http://www.voltairenet.org/article182757.html
Francis Wurtz n’y a rien vu que de plus normal : de gentils concurrents dans un commerce ! ! !
Où est-il le temps où les dirigeants communistes étaient les champions de la lutte contre le colonialisme ? il est vrai que de rénovation en ouverture, ils ne trouvent plus grand-chose à reprocher à la politique de la France, ni au niveau mondial où on ne les entends pas beaucoup dénoncer les islamo-fascistes pourtant seuls survivants en Syrie des « rebelles » depuis l’anéantissement de l’armée constituée par l’OTAN, l’ASL il y a 4 mois le 11/12/13, ni au niveau européen en Ukraine, où les snipers Nazis de Maïdan, ou le soutien du coup d’État par les USA de puis 6 mois à raison de 20 millions US $ par semaine, pas même la contre-offensive contre le peuple avec à sa tête les mercenaires de Greystone encadrant l’extrême droite néo-nazi recyclée en troupe « régulière » ? Enfin aujourd’hui, l’Huma – près de 6 mois après la décision de la Trilatérale de faire un coup d’État en Ukraine – dénonce l’extrême droite en Ukraine, mains non comme les fer de lance de l’insurrection organisée et armée par l’OTAN, tout au plus comme des profiteurs « de l’instabilité politique ».