LA « FIN DE L’HISTOIRE » A 30 ANS !

11 novembre 2019 at 7:44 Laisser un commentaire

Article publié dans l’Huma quotidienne le 8/11/19

À l’été 1989, quelques mois, donc, avant la chute du mur de Berlin, Francis Fukuyama, professeur de sciences politiques américain et rien moins que directeur adjoint du service de planification du Département d’Etat (l’équivalent du ministère des Affaires étrangères) des Etats-Unis, s’interrogeait doctement sur le fait de savoir si l’humanité n’était pas arrivée au « point final de (son) évolution idéologique » ! « Mon argument était que le dernier stade de notre Histoire était la démocratie bourgeoise » précisera-t-il un peu plus tard. Que déduire, trente ans après, de cette affirmation à la fois lucide sur la profondeur de la crise du « camp socialiste »et imbécile en matière de prospective ? OUI : avant même la chute du mur, on pouvait observer l’effondrement progressif d’une conception de la société et d’un mode de gouvernement qui avaient fait leur temps. NON, l’échec final d’une tentative d’organisation sociale post-capitaliste n’a évidemment pas mis un terme à l’affrontement de classe -y compris sur le plan des idées- entre les tenants du système dominant et les forces à la recherche de son dépassement.

Cet échec  de l’expérience soviétique ( au sens large ) ne nous fait, certes, pas oublier les apports des régimes politiques qui s’en réclamaient, tant à leur société respective qu’à l’humanité tout entière et tout particulièrement aux peuples opprimés du « tiers-monde », à différents moments de l’Histoire. Les travailleurs des pays occidentaux les plus développés ont eux-mêmes indirectement profité, pendant un temps, de l’existence du « camp adverse »,  attentifs qu’étaient les idéologues du monde capitaliste à ne pas laisser s’installer dans les esprits une quelconque forme d’attractivité du « socialisme réel » susceptible de devenir une menace existentielle pour le « monde libre ». Mais c’est aujourd’hui une banalité de rappeler -par-delà les crimes insoutenables du stalinisme- les signes d’essoufflement croissant manifestés par un système incapable de regarder en face ses contradictions pour les surmonter, tant en ce qui concerne la question-clé de la démocratie que celle de l’ouverture au monde et aux enjeux planétaires, insolubles dans le cadre d’un «  camp » introverti et cadenassé. « Celui qui vient trop tard est puni par la vie » :Gorbatchev mesura-t-il lui-même l’impitoyable vérité de sa formule, prononcée à Berlin, un mois avant la chute du mur ? L’impasse que représentait ce type de « socialisme »face aux grands défis de notre époque est un fait établi. Telle est l’une des leçons de l’événement du 9 novembre 1989.

L’autre enseignement à en tirer n’est pas moins essentiel. L’expérience de ces trois dernières décennies, loin d’avoir crédibilisé la fable de « la fin de l’Histoire », a révélé au monde entier l’enfoncement du capitalisme dans une crise existentielle. L’économiste libéral qui avait prédit le krach de 2008, Nouriel Roubini, fit, trois ans plus tard, cet aveu de taille: « Marx avait raison. À certains égards, le capitalisme se détruit lui-même (…) Nous pensions que le marché, ça marchait. Mais ce n’est pas le cas. » (1) En réalité, bien pire que de ne « pas marcher », le système en vigueur met en danger l’humanité tout entière, comme en témoigne l’irresponsabilité de ses « élites » face aux inégalités explosives et aux décompositions sociales et institutionnelles qui s’ensuivent, tout comme face aux dangers qui menacent la planète : du prélèvement sauvage des ressources naturelles à l’appauvrissement de la biodiversité et de la pollution de l’air au réchauffement climatique. Ces dernières années ont encore vu s’aggraver les risques pour l’avenir -et pour la paix- avec l’exacerbation de l’unilatéralisme et l’illusoire obsession de l’hégémonie à tout prix, dont le chef de la puissance de référence en matière de « démocratie libérale », Donald Trump,  est la figure de proue.

Empruntons notre conclusion à Edgar Morin qui, tournant résolument le dos à un nouveau « grand soir » souligne que « des symptômes d’une civilisation qui voudrait naître, civilisation du bien vivre, bien qu’encore dispersés, se manifestent de plus en plus » , même si, pour le moment, « les forces obscures et obscurantistes énormes de la barbarie froide et glacée du profit illimité qui dominent la civilisation actuelle progressent encore plus vite que les forces du salut ». L’alternative est aux antipodes d’une « fin de l’Histoire » ! Elle est : « nouvelle civilisation ou barbarie » . (2)

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