RÉFORME DE LA PAC : GOUVERNEMENTS CONTRE PARLEMENT
3 juin 2021 at 3:36 Laisser un commentaire
Des négociations cruciales entre les deux co-législateurs européens -les gouvernements et le Parlement- portant sur une importante réforme de la Politique agricole commune (PAC) viennent d’échouer à Bruxelles. Elles doivent reprendre courant juin. Les enjeux de ce bras de fer concernent naturellement au premier chef les agriculteurs et le monde rural, mais nous touchent indirectement toutes et tous. Bref rappel de quelques repères de ce grand dossier. A ce jour : si les positions de la majorité des députés ne sont nullement satisfaisantes, celles des Etats membres visent à les tirer encore en arrière dans plusieurs domaines.
La dimension sociale, tout d’abord. Le Parlement européen (PE) demande une réduction des aides en cas d’infraction à la réglementation sur le droit du travail. Le Conseil (les gouvernements) s’y refuse très majoritairement, certaines capitales proposant, à la place, que les Etats adressent à la Commission d’ici le 1er janvier 2025…une évaluation de la situation sociale dans le secteur agricole ! Les positions respectives en matière de réduction des inégalités mérite également une mention. La question à trancher est : quelle part des paiements directs faut-il réserver aux petites et moyennes exploitations -« ces petites fermes qui assurent de la production, de l’emploi, la préservation de l’environnement et un tissu rural dense, gage d’une activité sociale et économique intense »(Confédération paysanne) ? 12% demande le PE. 7,5 rétorque le Conseil.
Quant au plafonnement des aides, qui va dans le même sens, la présidence du Conseil en exercice suggère qu’il soit…facultatif, chaque gouvernement restant libre de l’appliquer ou non. Cette tendance à aller vers une « PAC à la carte » s’affirme d’ailleurs plus généralement dans le cadre de cette réforme, avec le risque d’une distorsion de concurrence entre pays membres. Le PE, là encore, y est opposé, tandis que les Etats les plus libéraux -par ailleurs également chauds partisans des accords de libre échange- y sont très favorables.
Enfin, il y a les controverses sur le « verdissement » de l’agriculture européenne. Cette évolution vise à garantir une alimentation durable et de qualité, à protéger l’environnement, à préserver la biodiversité. Elle passe par la réduction drastique de l’utilisation de pesticides dangereux; la diminution sensible du recours aux engrais et, d’une façon générale, le renforcement des pratiques agro-écologiques.
Dès lors, quel pourcentage des aides consacrer aux « éco-régimes », ces paiements couplés à des pratiques plus respectueuses de l’environnement ? 30% demandent les députés. 20 à 25, répliquent les représentants des gouvernements.
Par delà ces chiffres, l’on ne peut isoler cette question de toutes les autres dimensions des problèmes à résoudre pour sortir par le haut de la crise que subit le monde agricole. Un débat de société associant les premiers intéressés serait le bienvenu avant le compromis final .
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