DU CHINA BASHING A LA CHASSE A LA CHASSE AUX SORCIERES !
1 octobre 2021 at 7:26 Laisser un commentaire
Peut-on encore évoquer tel ou tel aspect de la situation chinoise en termes positifs sans prendre le risque de se faire clouer au pilori par les gardiens du « politiquement correct » ?
La question mérite d’être posée depuis la publication du désormais fameux Rapport de 646 pages de l’Institut de Recherche Stratégique de l’Ecole Militaire (IRSEM) intitulé : « Les opérations d’influence chinoises. Un moment machiavélien » (1) . Retour sur une épreuve de vérité pour notre démocratie !
On connaissait jusqu’ici -et pas depuis hier !- le China Bashing . Dès les premières années de ce millénaire, la Chine avait « remplacé le Japon dans le rôle du vilain qui serait à l’origine de toutes les difficultés de l’Amérique » (Les Echos, 15/12/2003). Outre-Atlantique, notamment, le dénigrement à tout-va du grand rival systémique s’accompagne depuis une dizaine d’années d’une flambée de ce que les Allemands appellent la Schadenfreude (littéralement la « joie du dommage », ou le fait de se réjouir du malheur d’autrui) : chaque amorce apparente de crise en Chine est vécue comme le début de la fin de l’encombrant concurrent par certaines « élites » -tel Francis Fukuyama, qui, après avoir annoncé « la fin de l’Histoire » au lendemain de la chute du Mur de Berlin, pronostiquait, en 2012, le crépuscule imminent du régime de Pékin. L’ échéance espérée se faisant attendre, Donald Trump saisit l’opportunité de la crise sanitaire pour tenter d’asséner le coup de grâce à son meilleur ennemi à coup de « virus chinois » coupable d’ une « tuerie de masse ».
Pour Joe Biden, « si l’on ne s’active pas, ils (les Chinois) vont manger notre repas »…L’analyse des leaders du monde libre ne vole pas toujours très haut, mais le message est clair : pour sauver l’Occident, il faut faire haïr la Chine .
En Europe, on suit depuis belle lurette le mouvement, mais en tentant, jusqu’ici, d’y mettre un peu plus les formes -interdépendance sino-européenne oblige…
La nouveauté , avec le Rapport de l’IRSEM, largement diffusé, c’est que l’on passe -et, cette fois, en France même- de la diabolisation de la Chine à celle de quiconque refuse de s’inscrire dans la chasse aux sorcières désormais engagée à grande échelle contre ce pays.
C’est ainsi qu’un passage substantiel de cette « étude » attaque frontalement l’Institut de Recherches Internationales et Stratégiques (IRIS) et nommément son Directeur, Pascal Boniface, soupçonnés d’être sous influence chinoise, pour avoir, notamment, lors de trois colloques, en 2017 et en 2019 , « fait une présentation laudative du récit chinois des Nouvelles routes de la soie » ! Un procès gravissime en soi, et, qui plus est, mensonger, comme peuvent en témoigner tous les participants à ces événements de haute tenue ! Bien d’autres noms encore sont ainsi donnés en pâture, comme -au choix- corrompus ou naïfs, pour s’être prétendument prêtés à la diplomatie d’influence de Pékin.
Pour avoir assisté, il y a quelques années à un « Forum de haut niveau » réunissant dans la capitale chinoise des responsables politiques européens de toutes sensibilités, je figure également dans ce Who’s Who maccarthyste…aux côtés, entre autres, de Charles Michel, devenu entre-temps Président du Conseil européen ! Pas question de céder à cette police de la pensée critique !
——–(1) https://www.irsem.fr (septembre 2021)
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