QUEL TYPE D’ « EUROPE » VOULONS-NOUS ?
21 novembre 2013 at 11:32 Laisser un commentaire
Le Parti communiste français vient d’adopter un document, à plus d’un égard novateur. Intitulé « Refonder l’Europe », il est destiné à nourrir un débat dont nous avons grandement besoin, à gauche, sur les grands traits d’un « nouveau projet européen » (1). Parmi ceux-ci, arrêtons-nous aujourd’hui sur la notion d’ « Union de nations et de peuples souverains et associés ».
Dans cette phrase, chaque mot compte pour définir le type de construction européenne proposé. D’abord, il s’agit d’une « Union », ce qui exclut le « chacun pour soi ». Ce n’est pas parce que l’actuelle « Union européenne » a trahi les espoirs des peuples qu’il faut jeter aux orties la belle idée que les dirigeants européens ont ainsi dévoyée: « On nous dépeint comme eurosceptiques. Nous récusons ce qualificatif. Nous sommes à la fois foncièrement critiques par rapport au modèle européen actuel et profondément favorables à une construction européenne refondée » peut-on lire dans le « nouveau projet européen »du PCF. Il ne faut pas revenir en arrière, mais dépasser positivement ce qui a échoué.
Ensuite,les « nations »: le choix est ici fait de réaffirmer sans ambiguïté l’importance de ce cadre historique, culturel et politique et d’en revendiquer l’acception républicaine et progressiste, celle d’un creuset privilégié de l’intervention citoyenne, des luttes sociales et des combats pour la solidarité internationale -à l’opposé absolu des thèses nationalistes et xénophobes. Ce n’est évidemment pas le seul espace de mobilisation populaire, comme en témoignent fort heureusement les (trop rares) « euromanifestations » ou « eurogrèves », et les mouvements émancipateurs altermondialistes autour d’enjeux sociaux, écologiques, pacifiques, féministes . Mais ces initiatives elles-même plongent leurs racines dans la riche diversité des réalités nationales.
Cette « Union de nations » doit, en même temps, être celle « des peuples », précise le texte. Cette précision semble aller de soi. Et pourtant…Une partie de la droite voit dans la nation le seul pouvoir de l’Etat. Ici, à l’inverse, on met l’accent sur les droits des citoyens comme des assemblées élues et sur la légitimité des mouvements sociaux et non pas uniquement celle des Présidents et des gouvernements.
Enfin, dans cette Union, nations et peuples doivent être « souverains et associés », est-il encore écrit. Ce point est naturellement fondamental! Le document dont nous parlons insiste sur « le besoin impérieux d’un cadre européen dans la mondialisation » , notamment pour être « plus forts pour faire face aux marchés financiers » (en particulier grâce à la force de frappe financière que pourrait constituer une banque centrale européenne refondée) , pouvoir « porter ensemble un modèle social et écologique avancé dans la mondialisation » et « avoir collectivement prise sur le monde ». Cela passe par un « exercice partagé de la souveraineté » mais aucun abandon de souveraineté . Ainsi, les futurs traités ne devront plus imposer de modèle économique ou politique prédéterminé.Un pays qui s’estimerait entraîné par tel ou tel champ de la politique européenne « dans un engrenage aboutissant à un modèle de société qui violerait ses choix fondamentaux », pourra ne pas participer au champ concerné. Bref: les peuples qui en décideront ainsi organiseront des « mises en commun des forces et des atouts des nations » tout en préservant » la maîtrise de leur destin ». Cette esquisse d’une Europe coopérative et solidaire pour gérer démocratiquement l’interdépendance de notre époque vient à son heure. Nous y reviendrons.
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(1) Voir HD No 21295 (14-20/11/2013)
Entry filed under: Chroniques de l' "Humanité-Dimanche, Europe, France, Francis Wurtz, PCF, PGE.
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