NUCLÉAIRE: POURQUOI LE DÉBAT EST RELANCÉ DANS L’UE
4 novembre 2021 at 6:28 Laisser un commentaire
Les traités européens reconnaissent à tout État membre « le droit de déterminer les conditions d’exploitation de ses ressources énergétiques, le choix entre différentes sources d’énergie et la structure générale de son approvisionnement énergétique ».
Pourquoi alors ce regain de polémiques entre les gouvernements désireux de conserver durablement une part, plus ou moins grande, de nucléaire dans le mix énergétique, et ceux qui sont partisans du tout-renouvelables ?
La réponse à cette question tient en deux mots : « taxonomie verte ». Il s’agit d’un règlement européen récemment adopté, et qui classe les activités économiques de chaque État membre selon leur contribution aux objectifs environnementaux de l’UE, au premier rang desquels la lutte pour le climat. Les activités considérées comme « durables » (c’est à dire répondant à ces critères) bénéficieront d’un éco-label susceptible d’orienter vers elles les investissements futurs.
La question est de savoir si les activités utilisant le nucléaire auront, ou non, droit à ce label.
Elles ne doivent pas pouvoir y prétendre, ont plaidé les uns -l’Allemagne, l’Espagne, l’Autriche, le Danemark et le Luxembourg- dans une missive adressée à la Commission européenne en juillet dernier.
Au contraire, viennent de répliquer, à la mi-octobre, 10 autres Etats membres, dans un texte insistant sur la contribution du nucléaire à la réduction des émissions de CO2, à l’indépendance de l’UE pour les sources de production énergétique, ou encore à la stabilité des prix pour les usagers. Il s’agit de la France, de la Finlande et de 8 pays d’Europe centrale, entre-temps rejoints par les Pays-Bas.
Il y a longtemps que l’on n’avait plus observé une attitude aussi offensive des Etats partisans de l’option nucléaire , quelle que soit, par ailleurs, la part de cette énergie prévue dans le mix énergétique des pays concernés.
La situation et les perspectives de l’UE en matière d’énergie ne sont pas pour rien dans cette évolution . Elle est le troisième plus gros consommateur d’énergie au monde, après la Chine et les Etats-Unis. Sa dépendance aux importations dépasse 60% dans 15 des 27 pays, et atteint même 90% pour sa consommation de gaz. Les 3/4 de ses émissions de CO2 proviennent de la production et de la consommation d’énergie. Or, l’UE s’est engagée à atteindre la neutralité carbone (qui signifie de limiter les émissions à la quantité que l’on est capable de retirer de l’atmosphère) en 2050, avec un premier palier en 2030. À quoi s’ajoute la flambée des prix de l’énergie…
C’est dans ce contexte peu favorable à une confrontation d’idées sereine et rationnelle sur les atouts indéniables, tout comme sur les risques réels du nucléaire et les moyens de les prévenir que doit être tranchée la question épineuse de la taxonomie verte.
C’est l’attente imminente de cette décision qui fait monter la fièvre dans les chancelleries européennes.
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