HOLLANDE ET L’EUROPE : RETOUR SUR UNE PETITE PHRASE
4 avril 2013 at 9:39 Laisser un commentaire
Durant sa récente émission télévisée, le Président de la République a lâché une petite phrase, manifestement pas improvisée, qui mérite analyse et commentaire : « Être dans l’austérité , c’est condamner l’Europe à l’explosion « -a-t-il déclaré- » Je ne ferai pas une politique qui conduise l’Europe à l’austérité (…) Je ne veux pas que l’Europe soit une maison de redressement . « En entendant ces mots de la bouche du Chef de l’Etat qui bat des records d’impopularité , précisément à cause de ses mesures de « rigueur » à répétition, les téléspectateurs ont dû avoir des réactions variées. Celles et ceux qui continuent de lui témoigner leur confiance auront peut-être décelé dans ses propos la confirmation qu’il faisait ce qu’il pouvait dans un environnement européen décrit comme « conservateur ». Beaucoup d’autres auront, à l’inverse, éprouvé de la colère face à ce qu’ils auront considéré comme un monument d’hypocrisie de la part d’un dirigeant politique qui applique à la lettre les dogmes « austéritaires », qu’il contribue au demeurant lui-même, sinon à élaborer, du moins à cautionner , dans les étroites et opaques instances bruxelloises. D’autres enfin, conservateurs eux-mêmes, ne se seront vraisemblablement pas arrêtés à ce passage de l’interview, trop contents d’avoir, par ailleurs, entendu le Président reconnaître qu’il ne parviendra pas à ramener le déficit public à 3% de la richesse nationale cette année.
Je préconiserais, pour ma part, vis-à-vis de la « petite phrase » présidentielle en question, une riposte différente de ces trois options. D’abord, je ne me reconnais évidemment pas dans les critiques de droite : ce n’est pas le non respect des 3% qui nous pose problème, c’est la régression sociale et les atteintes aux droits démocratiques. Ensuite, il est malheureusement inexact d’imaginer -comme un certain nombre d’électeurs de gauche continuent de le faire…- que François Hollande « fait ce qu’il peut » dans les cercles dirigeants européens ! Il a ni cherché à renégocier le traité budgétaire ni contesté les directives et règlements inspirés par Madame Merckel qui font de l’austérité la « règle d’or » européenne . Il a validé jusqu’à ces derniers jours l’obsession absurde des 3% alors que les experts du Fonds monétaire international eux mêmes -c’est un comble!- en avaient reconnu l’effet contre-productif. Il a gravement manqué de solidarité aux pays de la zone euro écrasés par la « troïka », depuis la Grèce jusqu’à Chypre. Il a même réitéré devant David Pujadas le leitmotiv effarant des orthodoxes européens selon lequel la crise de la zone euro en général et celle de Chypre en particulier, « c’est réglé » ! Non, ce n’est pas cette attitude conciliatrice avec les pouvoirs dominants que l’on est en droit d’attendre d’une France de gauche,en Europe aujourd’hui .
C’est dire combien est légitime la colère face à la posture, si éloignée de sa politique effective, adoptée par l’hôte de l’Elysée sur France 2 . Simplement la colère seule ne suffit pas pour faire avancer les consciences sur les exigences à faire grandir à gauche . Or, la clarification des idées est une condition indispensable pour faire bouger les rapports de force en faveur de changements véritables. Si François Hollande a évoqué le refus de l’austérité et de l’autoritarisme , c’est qu’il mesure l’étendue du rejet de cette politique au sein du « peuple de gauche » qui l’a porté au pouvoir. C’est donc avec toutes ces femmes et tous ces hommes qu’il y a lieu de mener le dialogue sur les mesures à promouvoir et les luttes politiques qui en ouvrent la voie: l’emploi, le développement social et la transition écologique comme nouvelles priorités des priorités pour l’Europe; la transformation des missions de la Banque centrale européenne pour nous libérer de la domination des marchés financiers; la restauration de la démocratie représentative et l’épanouissement de la démocratie citoyenne pour reconstruire l’Europe à partir des peuples…
Tél est le sens de la campagne en cours, du Front de gauche: l’alternative à l’austérité , c’est possible!
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